M. Luc Archambault a récemment soulevé une [théorie intéressante par rapport
à l'impasse du mouvement indépendantiste->http://www.vigile.net/La-crise-du-souverainisme], soit la perte « d'imminence » de
la réalisation de l'indépendance. Je tiens à apporter certaines nuances à
son jugement.
« Jamais n’a pu s’imposer une telle impression qui nous place devant un
fait accompli, la souveraineté ne semble pas prête de s’imposer. Ce qui
pose la question de l’a propos de la stratégie souverainiste de «
l’imminentisme ». […] Faire valoir qu’il suffit de parler de souveraineté
pour que l’imminence soit de nouveau le moteur de notre mobilisation, ne
fait que reporter le problème dans le temps s’il est question de
recommencer ailleurs que dans le PQ, la lutte pour la souveraineté de
l’État. »
Je crois que ce discours mélange deux choses, soit la promotion de
l'indépendance et sa réalisation. Bien sûr, à mon avis, la réalisation
passe par la promotion, mais essentiellement ce sont deux actions
indépendantes. Aussi, l'imminence n'est pas ce qui mobilise en soi (surtout
pas d'un référendum); cela motive, mais c'est la cause et surtout les
convictions qui mobilisent. Les plates-formes sur la santé, l'économie et
l'éducation ne sont pas aptes à créer des passions et former des
convictions profondes, sauf chez les citoyens fortement politisés et les
doctrinaires. Le Québec n'est pas la France. Ce qu'il faut, c'est un projet
de société concret qui, même s'il n'est pas réalisé à très court terme
(lire imminence), garde la flamme allumée. Ce projet, c'est l'indépendance.
Ainsi, moins on parle de souveraineté, moins les gens en voient la
nécessité, mois cette option est crédible. Ce, non parce qu'elle n'est pas
imminente, mais parce qu'elle semble infiniment moins importante qu'elle ne
l'est en réalité.
Maintenant, le PQ n'offre qu'un portrait de plus en plus flou de l'idée de
souveraineté dont il parle à peine, entretenant par le fait même la
stagnation, sinon la diminution, de l'intérêt des électeurs pour
l'indépendance. Cette réalité se fait de plus en plus sentir sur le terrain
alors que pour plusieurs l'indépendance est une idée du passé, comme l'ont
colporté les médias, implicitement ou explicitement, étant confortés dans
leur discours alors que le PQ même ne s'intéresse concrètement que très peu
à l'indépendance. En bout de ligne, cela devient un cercle vicieux: on n'en
parle pas parce que l'intérêt diminue et l'intérêt diminue parce qu'on n'en
parle pas. Ainsi, la seule façon de briser ce cercle vicieux est de parler
d'indépendance. Certains objecteront qu'il s'agit d'un pari risqué au point
de vue politique; je rétorquerai que les acteurs de la Révolution
tranquille et les fondateurs du Parti Québécois furent aussi confrontés à
ce pari et ils ont fait le choix du risque. On ne fait pas d'omelettes sans
casser des œufs. Je dirais même que l'adversité rendra notre victoire
encore plus grande.
Par ailleurs, dans la perspective de la lutte dans un autre parti que le
PQ, il ne s'agit pas de recommencer, il s'agit de continuer. Tout ce
qu'efface une telle lutte est la notoriété politique du PQ. Certes, le
report demeure, mais l'intérêt pour le projet d'indépendance étant en ce
moment assujetti au silence du Parti Québécois, un autre parti peut quant à
lui relever cet intérêt en gardant le plus possible la question nationale
au centre des débats, à conditions bien sûr que les militants
indépendantistes lui donne la chance de paraître suffisamment crédible en
tant que parti politique électoral aux yeux des médias.
« […] ce défaut de légitimité du Canada serait acceptable, selon les «
imminentistes », parce qu’il n’est que temporaire étant donné l’imminence
de la création de l’État souverain. […] Ce double défaut de consulter le
peuple souverain [à l’égard de l’invalidité d’un Canada refusé par le
Québec], prive le peuple démocratique et souverain du Québec d’État valide.
Un détail... qui dans l’imminence peut à la rigueur être toléré, mais qui
devient intolérable dans la dissolution de l’imminence. »
Ici, le sujet « imminentiste » est abstrait. En effet, je crois qu'aucun
indépendantiste reconnaisse comme acceptable ce défaut de légitimité (sinon
des exemples seraient de mise), sauf peut-être ceux du PQ, de l'ADQ et de
QS, ces partis voulant tout d'abord gouverner une province dans le cadre de
la constitution en place. Pis encore: le PQ, plus autonomiste que
souverainiste par sa plate-forme de gouvernance provinciale, incite
pratiquement cette tolérance. Que ce soit au travers d'une constitution
provinciale, de simple élargissements de champs de compétences respectant
fondamentalement l'ordre canadien, de telle ou telle mesure économique sans
insister sur l'importance d'être un pays pour participer aux sommets
économiques importants, etc. Encore une fois, le Parti Québécois passe à
côté de la plaque. En 2007, il était référendiste; en 2008, il est
autonomiste. S'il est sincère, pourquoi ne se contente-t-il pas d'être
souverainiste?
« Ce qui est plus difficile à contrer c’est l’attentisme. […] on table
sur la défaite de Pauline Marois, pour la renverser. On n’a qu’à attendre.
Sa défaite fera le reste. On n’a qu’à attendre, pour la remplacer par
Gilles Duceppe. Lui sera mieux faire. »
En réalité, si certains indépendantistes ont quitté le PQ pour un autre
parti, c'est qu'ils n'attendent justement plus grand chose du PQ. Plus
encore, leurs tentatives de redynamiser le mouvement souverainiste
indépendamment des caprices du Parti Québécois témoigne de l'inutilité de
les attaquer au niveau de « l'attentisme ». Ce sont ceux qui tentent de
battre Mme Marois en tant que chef dans l'intention de réintégrer le PQ
subséquemment pour élire un autre chef qui sont à blâmer.
- Antonis Labbé
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --
Réplique à Luc Archambault
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3 commentaires
Archives de Vigile Répondre
25 novembre 2008Mobilisation citoyenne souverainiste extra-parti
Mon parti c'est le parti du peuple souverain du Québec
APPEL AUX RALLIEMENT DES SOUVERAINISTES
Laurent-Paul Maheux dans Sherbrooke Péquiste
Françoise David dans Gouin Solidaire
VLB dans Rivière-du-Loup-Témiscouata Indépendantiste
Étant donné que les directions des partis concernés se garderont de faire l'Union du peuple souverain du Québec d'ici le 8 décembre pour déloger Jean Charest et élire Pauline Marois comme première Première ministre du Québec à la tête d'un gouvernement souverainiste minoritaire ;
J'appelle les souverainistes de tous les partis à voter en faveur du parti souverainistes QS ou PQ le plus en mesure de battre Jean Charest dans Sherbrooke. Au moins ça.
En contrepartie pour le QSsistes qui devront voter pour le PQ et Laurent-Paul Maheux dans Sherbrooke, j'appelle les PQuistes à voter pour Françoise David dans Gouin.
Pour que les impatients indépendantistes ne soient pas en reste.
Votons VLB dans Rivière-du-Loup-Témiscouata
Le début de l'Union du peuple souverain du Québec commence dans l'action citoyenne souverainiste. À défaut de scrutin proportionnel, donnons une voix diversifiée à la députation du peuple souverain du Québec, une voix proportionnelle à la diversification des allégeances souverainistes.
Le peuple souverain vote stratégique... la stratégie de l'Union souverainiste
Je prend le parti du peuple souverain du Québec, hors parti...
Archives de Vigile Répondre
25 novembre 2008Suite...
Premier paradoxe de l'imminentisme virtualiste
Le paradoxe, le premier de cette stratégie qui voue le PQ à l’éclatement, c'est qu'au moment où il est crucial de former les rangs, au moment où l’on doit faire face à un retour de vague canadianisateur à la hauteur de la frousse que notre succès a engendrée, au moment où nous devrions plutôt être fédéré par ces attaques, on choisit plutôt que de faire face aux reports, plutôt que de faire face à cette vague qui nous apparaît être un mur, on choisit de rompre les rangs, de se diviser, de se disperser... Montcalm croirait revivre la funeste bataille du 13 septembre 1759. Au lieu de faire front, les Québécois se sont dispersés en pagaille. Il faut dire que le Général avait choisi de combattre sans attendre les renforts, de combattre sur le terrain choisi par l’adversaire, et de combattre avec une armée formée pour la guérilla et non pour les batailles rangées. Comme si, puisqu'on a perdu, puisqu'on ne sent pas comment on pourra engager à nouveau la bataille, pourquoi donc ne pas faire une pose, quitte à reculer...
Deuxième paradoxe
Deuxième paradoxe, sous prétexte de d'accélérer les choses, parce qu’on trouve que le PQ fait du sur place. Et, c’est vrai, il ne recule pas... On ne lui donne pas tout l’appui qu’il lui faudrait, et sondages après sondages, Pauline Marois ne recule pas, elle monte même dans les sondages, de peu, mais la tendance est là. Imaginez si nous serrions les rangs...
Ainsi... sous prétexte d’accélérer les choses, cela, contre le sur place, on ne trouve rien de mieux que de proposer qu’on s'engage dans un processus qui ne peut que ralentir la marche. Mettre la hache dans le PQ ne peut que ralentir la marche. Il faudra du temps pour reconstruire un autre parti indépendantiste. Qu’on ne vienne pas me dire que cette donnée ne compte pas, que les convictions seules comptent. Il s’agit là non plus de stratégie, mais bien d’aveuglement.
D'autant qu'il y en a deux partis. D’autant qu’il faudra du temps pour départager qui de l’un ou de l’autre pourra supplanter le PQ. QS ou le PI. Nous sommes donc face à trois partis souverainistes qui se feront la lutte... sans parler d'un électorat autonomiste adéquiste auquel adhèrent des souverainistes de droite... un électorat qui est aussi fait de cet électorat qu'il faudra convaincre pour fonder l’État souverain du peuple souverain du Québec, tel que nommément et directement fondé par le peuple. Cet électorat autonomiste qu’il faudra convaincre en espérant qu’il pourra l’être quand l’imminence retrouvée nous pourrons créer l’élan qui nous permettra d’emporter l’adhésion majoritaire du peuple souverain du Québec.
Bien sûr on ne part pas à zéro, mais il ne faut pas sous-estimer les ressources, le temps, l'énergie qui devront être mobilisés pour reconstruire ailleurs un parti politique ou une coalition de partis politiques aptes à prendre le pouvoir. Ce qui a déjà été fait par le PQ... j'estime au bas mot, à de 2 à 3 élections, de 10 à 15 ans... Pour des gens qui trouvent que le PQ ralentit le pas... il s'agit de proposer une stratégie qui me semble, pour dire le moins... douteuse... et paradoxale.
Les « attentistes » du PQ qui attendent en retrait, qui espèrent que Madame Marois va s'effondrer, sont à blâmer certes, mais il n'y a pas qu'eux.
Le nouvel « imminentisme »
Vous dites :
Vous proposez donc me semble-t-il un nouvel imminentisme. L'ancien se fondait sur une conjecture où les succès du PQ, la valeur des ses leaders, l'ampleur et la valeur du nombre des ses adhérents, sa capacité de rassembler les souverainistes, l’unité fédérée qui en découlait, nous permettaient de croire que la création de l'État souverain pouvait advenir rapidement, politiquement parlant, soit dans un délai motivant de 5 à 10 ans. Ce n'est plus le cas.
Ce nouvel imminentisme, se fonderait sur le « ce qui mobilise », et sur la valeur de la « cause et les convictions ». Il suffirait donc de croire en la cause pour que nous apparaisse l'imminence perdue. Il suffirait qu'un parti propose « un projet de société concret qui, même s’il n’est pas réalisé à très court terme (lire imminence), garde la flamme allumée. » Il est question ici d'imminentisme virtuel. L’imminence n’est pas là... la réalisation n’est pas pour le court terme, mais l’imminence est néanmoins réelle puisqu’elle ne saurait tarder dans le moyen terme. Elle nous semble présente, mais reportée dans le temps. « La flamme » serait le projecteur de cette projection virtuelle dans l’écran radar de cet espace-temps militant.
Parce qu’il est question de flamme, parce que de flamme, il ne saurait être question que de « projet de société » pour l’allumer, peu importe ce qu’il en coûte pour ce faire. Peu importe les retards, peu importe la destruction qu’on laisse derrière, peu importe la division actuelle, peu importe la campagne électorale en cours, peu importe que le PQ ne recule pas malgré cette division, malgré le fait qu’il n’a pas tout l’appui qu’il pourrait avoir, de nous, peu importe que Pauline Marois soit défaite, peu importe que cette défaite nous livre à 4 ou 5 ans de consolidation de la canadianisation en cours de notre économie, de notre culture, de notre environnement, de notre environnement politique et naturel, peu importe même que cette canadianisation tempérée depuis 18 mois par une majorité d’opposition forte soit maintenant majoritaire en minorisant les souverainistes, peu importe n’importe quoi... Ce qu’il nous faut c’est retrouver la flamme... et il n’y a que de détruire l’ancien qui peut nous satisfaire à cet égard, il n’y a que la fièvre de reconstruire à neuf, sur cette démolition en règle qui nous procurerait cette flamme perdue.
Ce ne peut être en aucun cas, une victoire du PQ de Pauline Marois, fédéré par une victoire rendue possible par l’appui des souverainistes convaincus. Ce ne peut être cette victoire imminente, à portée de main. À peine 4 à 5 points de pourcentage nous séparent d’un gouvernement minoritaire du PQ. À 7 ou 8 points d’avance sur le PQ, le PLQ n’est plus certain de former un gouvernement minoritaire. Tout est possible. Le PQ pourrait faire le plein des 38% des suffrages accordés au Bloc il n’y a pas deux mois... Pourquoi le PQ ne pourrait-il pas y parvenir... Restent encore 13 jours de campagne électorale...
En lieu et place... Ce que les « imminentistes flammistes » nous proposent, ce que celles et ceux qui prônent l’imminence de la flamme retrouvée nous proposent, c’est de battre Pauline Marois, c’est de battre le PQ, c’est de piller ses biens, dévoyer ses membres, le vouer à l’éclatement par la défaite, pour voir naître de ces cendres fumantes un phénix, hôtes de ses bois, nous livrant aux déchirements entre trois partis souverainistes... C’est déjà commencé, Andrée Ferretti a choisi QS, VLB ne choisit même plus le PI, et quoi encore !
J’appuie le Parti québécois de Pauline Marois, il faut faire Bloc. C’est le temps de le faire ou jamais. Ne reste que 13 jours pour ce faire. Mais nous avons 13 jours encore pour nous fédérer derrière un PQ qui ne recule pas, malgré la division dont nous sommes victimes, dont nous sommes tous victimes, dont le peuple souverain du Québec est victime. Je suis fier de n’avoir pas contribué à la division en appelant à nous fédérer derrière Pauline Marois, avec conviction, flamme et constance. Nous sommes en élections, nous devons gagner ces élections. Une défaite sera la défaite des souverainistes et des indépendantistes. Il faudra vivre avec cette défaite, avec un nouveau découragement, un nouveau report. En lieu et place, une victoire, sera la victoire de tous les souverainistes, ce sera la victoire des souverainistes enflammés. Cet élan pourrait créer l’imminence retrouvée, au lieu de la reporter encore dans la défaite.
Celles et ceux qui ont appuyé Gorbatchev et sa perestroïka, s’ils et si elles s’étaient abstenu(e)s de l’appuyer, parce qu’il ne proposait pas l’idéale et flamboyante fin du communisme, ils et elles n’auraient pu ensuite descendre dans la rue à Berlin Est pour scander « Nous sommes LE peuple ! ». D’autres les auraient écrasés avec leurs chars, comme ils l’ont déjà fait à Prague... Entendant cela, le peuple de Berlin Ouest n’aurait pas scandé à son tour « Nous sommes UN peuple ! ». Entendant cela, l’Allemagne entière s’est mobilisée... le monde entier s’est mobilisé... Le mur est tombé, parce que Gorbatchev au pouvoir a été débordé par le pouvoir du peuple souverain... En lieu et place ici, ce que l’on nous propose, c’est de ne pas abonder dans un changement progressif propitiatoire au renversement des canadianisateurs, au renversement du statut quo qui à terme avec la défaite du 8 décembre prochain aura duré près de 10 ans en comptant les 4 ou 5 prochaines années du gouvernement démissionnaire de Jean Charest. Tout cela sous prétexte de flamboyance perdue. Vous en voulez de la flamboyance... Je vous en donne, et... qu’est-ce que vous en faites ? À voir ce que vous en faites, je doute que vous puissiez faire mieux... Pour le moment ce que je vois, ce que j’entends, ce n’est que de la fumée, que des appels aux cendres... je ne vois pas de lumière...
Pourquoi ne pas tenter quelque chose...
Quel mal y aurait-il à faire élire le PQ, maintenant ? Quel mal y aurait-il à nous fédérer derrière Pauline Marois, qui ne recule pas ? Pour avancer ! Qu’est-ce que cela empêcherait une fois qu’elle serait au pouvoir ? Vous seriez empêché d’investir le PQ pour le rénover? À défaut, vous seriez empêché de construire un mouvement pour l’indépendance en appui aux souverainistes, au PQ ? Vous seriez empêché de fonder un PI pro-indépendance en appui à la quête du peuple souverain du Québec ? Nous serions empêchés de bâtir une coalition souverainiste diversifiée, de la gauche à la droite en passant pas le centre, à travers une Union du peuple souverain du Québec ? Nous aurions de 3 à 5 ans de gouvernement minoritaire du PQ pour nous préparer à le faire, pour évincer majoritairement les canadianisateurs la prochaine fois, ou nous aurions de 3 à 5 ans pour refonder le PQ, ou fonder une coalition des partis souverainiste de gouvernement majoritaire, pour créer l’État souverain qu’on espère. Quel est le risque ?
En appuyant maintenant le PQ de Pauline Marois, au moins dans ce cas, l’histoire ne retiendra pas que ce c’est vous qui aurez grandement permis que les souverainistes perdent ces historiques élections du 8 décembre 2008. Qui sait quand nous pourrons une fois encore les gagner ? !
Respectueusement vôtre. Je ne m'attaque pas à vous, peut-être un peu à vos idées... Même pas, je m’attaque à celles que vous croyez avoir... ou que je crois que vous avez. Au plaisir. Luc A.
______________________________
PS
Cela dit, et bien que je favorise l’élection d’un gouvernement souverainiste de Pauline Marois, je prends acte d’avance d’une possible et malheureuse défaite. Elle sera celle de la division de nos forces. À charge de leçons à tirer. J’ai proposé une coalition électorale dans une Union souverainiste. Elle sera possible jusqu’au 6 décembre. Mais je prends d’avance acte du fait qu’elle n’aura pas été réalisée. À charge de proposition pour l’avenir. L’éclatement du PQ, total ou ne serait-ce que partiel suffira à nous éloigner du pouvoir. Ce qui ne manquera pas d’engager pour l’avenir l’inéluctable rassemblement, dans un PQ r^vé avec un Obama rêvé. Ou dans une concrète coalition de partis d’un souverainisme parcellarisé. Ce qui ne manquera pas d’engendrer des reports, des querelles, de la division, que vos idées auront contribué à provoquer, ce pourquoi je plaide pour l’appui au PQ, qui nous fait gagner du temps. Quelle est la différence entre un PQ abritant différentes mouvances et une coalition de pareille nature ? Aucune, sauf une, la prétention des uns et des autres d’avoir le dessus sur les autres en commençant par le faire dans un parti dont on est les maîtres, les instigateurs, les fondateurs. Une affaire de contrôle et de faire-valoir. La prétention de pouvoir mieux que les autres être le seul parti de rassemblement, fondé sur la division. Je ne vois pas comment parvenir à un résultat congruent. Mais quand même puisque ce serait ça la réalité. Tant pis pour nous qui auront choisi la division pour nous rassembler... C’est ce qu’aura choisi ce peuple pour absorber la perte de l’imminence de la souveraineté.
Comme si, incapable de fonctionner sans cet espoir vain, il fallait obligatoirement se doper à l’adrénaline de la querelle. Comme si, incapable d’affronter l’ajournement de la vraie bataille, nous ne savions que faire du sevrage ne cherchant doper que nous sommes, qu’à trouver n’importe quelle querelle pour satisfaire notre impuissance à livrer la vraie bataille qu’il nous faudrait livrer. Pour le moment, cette bataille est celle de la trêve. Le Canada est bloqué, il ne peut pas faire passer le Canada que nous refusons. Nous ne pouvons faire passer le Québec que nous voulons. Lui se contente de cette stagnation. Il gonfle le torse en criant victoire et en nous prédisant l’écrasement.
Il prend ses rêves pour la réalité. Nous sommes son cauchemar tant et aussi longtemps que nous sommes unis. Et, il rêve peinard tant que nous ne le sommes pas. Nous pourrions être unis en incarnant dans l’État ce que nous ne voulons pas, le temps que cela porte. Le temps que ce NON porte. Le temps que nous en mesurions la portée.
La disparition ( momentannée ) de l’imminence de la souveraineté ( elle reviendra un jour ), pourrait nous donner l’occasion de revoir nos stratégies, de reformer les rangs. De commencer par prendre acte de la dissolution du Canada actuel, celui qui est refusé par les Québécois. Celui que jamais ne pourra faire accepter le Canada aux Québécois. Cela, dans autre chose que la dispersion, la querelle.
Si les souverainistes prétendent être en mesure d’appeler ce peuple souverain du Québec à fonder l’État souverain qu’il désire, cela ne pourra se réaliser que dans un majoritaire rassemblement. Il faudra emporter l’adhésion des personnes que nous combattons. Comment le pourrons-nous si nous ne respectons pas ces personnes en nous attaquant à elles. Il nous faut nous attaquer à celles et ceux qui leur font croire que ce Canada unilatéral « inaccepté » est acceptable en l’État actuel de son statut quo refusé par le Québec. Il nous faut cesser de nous attaquer mutuellement.
Pour paraître aptes et capables de rassembler une majorité autour de la souveraineté, il nous faut paraître capable de nous rassembler nous-mêmes. Cette incapacité, qui se cristalliserait dans une dispersion du vote ou dans l’abstentionnisme souverainiste permettant l’élection de députés PLQuiste ou Adéquiste, est la preuve même de l’incapacité souverainiste, de l’incapacité des souverainistes, à fonder ce qu’ils disent vouloir et pouvoir fonder. Ce pourquoi toute la stratégie actuelle des canadianisateurs cible et encourage la division souverainiste. Quand ce sont les fédéralistes qui disent que le Bloc ou le PQ ne parle plus de souveraineté, c’est qu’on est en plein dans le centre de la cible de ces tirs concentrés. Quand les souverainistes disent que ce n’est pas un référendum qui fera la souveraineté, on abonde encore dans cet anti-référendisme canadianisateur qui craint comme la peste que sa Constitution soit soumise aux voix du peuple souverain du Québec et qu’elle soit rejetée. Ce serait sa mort pure et simple.
Votons en Bloc pour le Parti québécois de Pauline Marois
Archives de Vigile Répondre
25 novembre 2008M. Antonis Labbé,
Merci d’avoir pris le temps de me lire et surtout celui de répondre à mes analyses publiées dans la Tribune libre de Vigile sous le titre :
PQ, QS et PI : la crise de l’unité souverainiste
Pour plus de précision.
Vous dites :
D’abord, il ne s’agit pas d’un discours, mais d’une analyse, voire, comme vous dites, une théorie qui tente d’expliquer un certain nombre de phénomènes politiques observables et qui ont une incidence sur l’idée que l’on se fait des événements que nous avons vécu et que nous vivons. Sur la base de laquelle, nous fondons nos adhésions électives au PQ, à QS ou au PI, pour ne parler que des souverainistes, mais on pourrait aussi inclure les adéquistes souverainistes ou autonomistes.
Cette analyse me fait appuyer le PQ. Vous qui n’appuyez pas le PQ, vous voulez à la fois contredire mes conclusions, voire l’analyse elle-même. Pour cela, vous dites que je confonds un certain nombre de choses : « soit la promotion de l’indépendance et sa réalisation. ». Je veux bien, mais je ne crois pas confondre promotion et réalisation.
Quand je parle « d'imminence de la souveraineté », je tente de décrire le phénomène suivant. Moi le premier, et je ne pense pas être le seul à l'avoir pensé, quand le PQ a été créé sous la gouverne de René Lévesque, quelque chose s'est passé. D'un rassemblement « marginal », le RIN, beaucoup plus connu après sa dissolution qu'avant, le mouvement souverainiste est apparu soudain comme capable à brève échéance, de 5 à 10 ans, de prendre le pouvoir pour réaliser la souveraineté. Le phénomène d’imminence de la souveraineté s’est cristallisé dans le PQ. La réalisation de la souveraineté était imminente. Pourquoi, parce que non seulement on en faisait la promotion, comme le faisait le RIN, mais en plus, les conditions gagnantes étaient créées, ou nous apparaissaient telles. Un grand leader, une « équipe du tonnerre », au moins aussi tonitruante et compétente que celle de Jean Lesage, cristallisé dans l’adhésion de Jacques Parizeau, un point tournant. Un grand commis de l’État, un grand argentier, se joignait au grand tribun, à la flopée de grands penseurs, artistes, poètes, activistes, syndicalistes engagés, fédérés autour de sept députés inconnus, mais vedettes devenues, de Claude Charron à ces autres Camille Laurin, la liste est trop longue...
De fait, le PQ a finalement pris le pouvoir, fait un premier référendum. Par la suite, un certain flottement s'est imposé, mais l'extraordinaire élan de ces premières années de pouvoir, l'adoption de cette flopée de lois historiques qui ont changé le Québec, ( financement des partis politiques, Loi 101, assurance automobile, loi référendaire, etc. ) nous a fait croire toujours à l'imminence d'un retour. Meech entretenait l’espoir, donc l’imminence nous apparaissait toujours comme vivante. Meech et son échec appréhendé nous permettaient de croire qu’on pourrait bientôt remettre sur le métier notre ouvrage. L’imminence était toujours vivante, avérée ou factice, elle nous apparaissait réelle. De fait, Jacques Parizeau a repris du service et de force nous a fait croire à l’imminence... Après l’échec, après le choc, « on se frotte dans les mains et on recommence »... le problème c’est que Jacques Parizeau, pressé par Lucien Bouchard, Messie devenu, a compris à tort ou à raison, qu’il ne pourrait pas résister longtemps à cette poussée dans le dos, et a préféré partir... Par la suite on a encore cru un temps pouvoir revenir à la charge, l’imminence était toujours là, mais commençait peu à peu à s’effriter, l'échec de l’indignation de Lucien Bouchard, sa démission, puis celles de Bernard Landry et d’André Boisclair, ont fini par imposer une réalité tangible. Le souverainisme, l'indépendantisme est toujours vivant, mais on ne sait plus quand il pourra se mettre à nouveau en branle pour se réaliser. L’imminence a fait long feu...
C'est la perte de l'imminence.
En décrivant ce phénomène, je suis amené à me retourner vers le passé pour constater que ce phénomène a existé, et qu'il nous a fait poser des gestes en conséquence, par exemple, ne pas soumettre à l'approbation du peuple souverain du Québec, la Constitution unilatérale de 1982 rejetée par l'Assemblée nationale, par les souverainistes, par les autonomistes et même par les fédéralistes rénovateurs. Cette incurie s'expliquerait par « l'Imminentisme ». Cette stratégie politique qui nous a fait poser des gestes en fonction de l’imminence, réelle ou fabriquée, de sorte que dans la perte de l’imminence, nous posons, poserons ou avons posé d’autres gestes politiques qui tenaient, qui tiennent ou qui tiendront compte de cette perte.
En état d’imminence, pourquoi prendre le temps de soumettre aux voix du peuple souverain du Québec, la Constitution unilatérale de 1982, si bientôt peut se fonder l'État souverain ? En effet, pourquoi prendre cette peine ? C'est logique. Par contre, dans un contexte de fin de l'imminence, la situation est, me semble être, doit être, pourrait être tout autre... Peut-être vaut-il la peine d'y songer, d'y réfléchir.
En prenant conscience de ce phénomène, je suis amené aussi à considérer non seulement le passé ancien, mais aussi le passé récent, ainsi que le présent et ce qui se profile dans l’avenir proche ou lointain. J'opine, que dans un contexte d'imminence, les souverainistes, malgré les irritants, malgré les conflits, malgré tout, ont fait front et ont accepté de se rassembler dans le PQ et dans le Bloc. Or, la perte de l'imminence, a conforté nombre de souverainistes à adhérer à l'ADQ. En effet, si ce n’est que depuis un deux ou trois ans que m’apparaît reportée loin dans le temps l’imminence de la souveraineté, certains souverainistes, ou crypto-souverainistes, ont depuis longtemps cru qu’elle ne se réaliserait que dans de très nombreuses années, voire jamais. Ceux de l’ADQ, se sont dit après 1995, qu’on ne pourrait pas revenir sur la question avant dix ans... en voilà 13... et ils avaient raison... Ils sont donc devenus autonomistes pour se distinguer du PQ tout en gardant loin dans la mire, la souveraineté comme finalité possible dans le cas où le Canada rejetterait l'autonomie. ( c'est la stratégie de Meech 2 - On provoque un refus du Canada pour susciter un nouvel après Meech qui a vu la souveraineté presque gagner le référendum de 1995, mais on ne sait pas quand... et au pire, on aura au moins améliorer le sort du Québec en allant chercher des pouvoirs supplémentaires... ). L'ADQ prenant ainsi du gallon, a participé à la fin de l'imminence à plusieurs égards.
- En mettant sur la glace le référendum pour 10 ans...
- En divisant le vote souverainiste, notamment en attirant les souverainistes de droite, voire les souverainistes déçus du PQ, ( VLB ), en attirant les jeunes et les X souverainistes, ou qui pourraient l’être si les canadianisateurs n’avaient pas compris leurs malheurs...
- En facilitant l’élection des fédéralistes vainqueurs du référendum. Jean Charest du coup s'est faufilé dans la brèche entre le PQ et l'ADQ. Il s'est fait réélire... minoritaire, l'ADQ s'est effondrée.
Reste le PQ... Mais entre-temps, la perte de l'imminence, aurait favorisé parallèlement la fondation de QS, et plus tard du PI. J'opine, que la perte de l'imminence a justifié des souverainistes mécontents du PQ, à fonder un autre parti. L’unité du PQ n’est plus de mise, parce que le ciment de l’imminence n’a pas ce qu’il faut pour fédérer des composantes aussi disparates que la gauche engagée, et la droite activiste.
Je ne confonds pas promotion et réalisation quand je parle d’imminence. Si la promotion est partie des conditions qui créent l’imminence, le sentiment d’imminence, elle n’est pas la seule condition. La preuve en est que le RIN qui en faisait la promotion n’a pu à lui seul créer le sentiment d’imminence. Ce qui l’a créé c’est le rassemblement dans un PQ capable de prendre le pouvoir. Quant au sentiment d’imminence, à lui seul, il ne peut « créer » la « réalisation ». Cependant le sentiment d’imminence, permet de participer aux conditions « gagnantes » qui rendent possible la réalisation. Ce sentiment me semble avoir tendance à mobiliser, à fédérer, à passer outre ses réticences, ses déconvenues, ses frustrations, si nombreuses dans les organisations citoyennes ou politiques, cet « océan d’orteils », comme le décrivait si bien Jacques Parizeau lors de son passage récent à TLMEP.
L’imminence est comme les saucisses Grandgrade... plus elle semble l’être, plus elle le devient. A contrario, moins elle semble l’être, plus elle ne l’est pas. Les saucisses ce n’est pas tout à fait ça... mais bon... Le monde en mange parce qu’elle sont plus fraîches, et plus le monde en mange plus elle sont fraîches... Plus le sentiment d’imminence est fort plus les souverainistes se fédèrent, plus ils se fédèrent plus le sentiment d’imminence est fort. A contrario, mois le sentiment d’imminence est grand, plus on est tenté de rompre les rangs. Plus on rompt les rangs, moins l’imminence est grande.