Ça commence à sentir les élections

Québec - prochaines élections 2007


Entre un sondage et une assemblée de maires, je préfère la seconde pour bien avoir le pouls politique du Québec. On le dit tellement souvent que c'est devenu un cliché : les maires sont connectés directement sur leur population. Si on le dit aussi souvent, c'est que c'est vrai.
J'ai donc eu la chance de participer au congrès de la Fédération québécoise des municipalités, en fin de semaine à Québec. La FQM regroupe les plus petites municipalités plutôt que les grandes villes. Précisément le genre de circonscriptions francophones qui font et défont les gouvernements. Or, les maires sentent des élections cet automne et disent que ça ne sent pas trop mauvais pour le gouvernement Charest.
Il est vrai que majorité des maires seraient plutôt d'allégeance libérale. Mais comme ils ont à se faire élire tout comme les députés, ils sont aussi les premiers à savoir si la colère gronde dans la population. Pour avoir parlé à bâtons rompus avec plusieurs d'entre eux, il ressort que la colère contre le gouvernement Charest se serait largement calmée - sauf chez ceux qui, de toute façon, ne voteront jamais libéral.
Qu'on se comprenne bien : il n'y a pas un nouvel enthousiasme pour Jean Charest. Les citoyens ont vu les gaffes qui ont marqué son mandat. Mais il n'y a pas, actuellement, de dossier chaud qui canalise les frustrations contre le gouvernement. À part, peut-être, le fiasco des défusions municipales qui, dans certaines régions, va causer des problèmes aux libéraux.
S'il n'y a pas d'enthousiasme pour le premier ministre, il n'y en a pas, non plus, pour le chef de l'opposition. Sur le terrain, disent les maires, bien des gens ne sont pas à l'aise avec André Boisclair. Cela se reflète dans les candidatures, qui sont plus souvent des attachés politiques péquistes ou bloquistes que des vedettes locales.
Les maires ont eu des problèmes avec le gouvernement libéral et ils n'ont pas manqué de le faire savoir aux ministres qui se sont pointés à leur congrès. Cela va des interminables moyens de pression de la Sûreté du Québec à la décentralisation qui avance avec une lenteur tectonique.
Mais ils se souviennent aussi que, du temps du PQ, ils avaient simplement d'autres problèmes. Ainsi, ces temps-ci, les plus petites municipalités sont toutes obligées d'acheter de coûteux camions de pompiers. Une politique de réduction des risques décidée à Québec et dont les maires doutent encore de l'utilité réelle.
Alors, il y a de l'insatisfaction contre le gouvernement Charest, certes, mais pas de grosse colère. Nous ne sommes pas en novembre 1976 ou en septembre 1984 ; il n'y a pas de sentiment qu'il faut mettre ce gouvernement dehors.
Autre chose qui ressort de conversations avec les élus municipaux : on ne parle plus guère de Mario Dumont et de l'ADQ. Ce n'est nullement comparable au printemps de 2003.
Cela dit, ça prendra quand même un acte de foi pour que Jean Charest décide de plonger tout de suite quand les sondages - qui restent une donnée incontournable - disent que 45 % des francophones pensent voter PQ, contre 28 % pour le PLQ.
Dans le dernier sondage CROP, il y avait aussi une question qui devrait troubler M. Charest. Quand on demande aux Québécois s'il faut "continuer avec Charest ou changer de gouvernement", 59 % voulaient changer et 33 % seulement qui voulaient continuer. Exactement les résultats qu'on obtenait en 2003, deux semaines avant les élections.
Si M. Charest pense quand même déclencher des élections, c'est aussi parce que cet automne risque d'être le dernier moment où il contrôlera le calendrier électoral. Avec un nouveau chef libéral à Ottawa et le Bloc qui a pratiquement déjà confirmé qu'il ne pourra voter pour le prochain budget, on a de fortes chances d'avoir des élections fédérales dès ce printemps.
De plus, si les chiffres des sondages ne sont pas très bons, la tendance, elle, est encourageante pour les libéraux. Avec une bonne campagne électorale - et ça compte pour beaucoup dans le résultat - les libéraux ne partent peut-être pas dans une si mauvaise situation.
En tout cas, à voir la manière dont le gouvernement Charest veut mettre le couvercle rapidement sur le dossier de l'effondrement d'un viaduc à Laval - avec une enquête publique présidée par un ancien premier ministre péquiste, ce que les circonstances n'exigent nullement - on voit qu'il ne veut pas laisser un accident perturber un éventuel calendrier électoral.
La décision n'est pas prise, loin de là, parce que ça reste un très gros pari pour les libéraux. Mais il est clair que le premier ministre veut se garder l'option d'aller visiter la lieutenant-gouverneur.
Les sondages disent que les chiffres ne sont pas trop bons. Mais les maires, et l'air du temps, disent que ça commence à sentir les élections.
Pour joindre notre chroniqueur : mcauger@lesoleil.com


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé