Le Québec n’embarque pas là-dedans

Québec - prochaines élections 2007


Quand le premier ministre du Québec se déplace à Laval un lundi matin avec une brochette de ministres et de députés pour annoncer un investissement de 28 millions pour un nouveau service en santé offert en… 2010, c’est que ça commence sérieusement à sentir les élections.
Surtout à Laval, traditionnel champ de bataille électoral, et surtout dans le domaine de la santé, traditionnel sujet de préoccupation des électeurs. Donc, les Lavallois auront un nouveau centre de radio-oncologie en 2010, mais ce que cette visite signifie d’abord, c’est que le Québec aura très bientôt des élections. Et comme Jean Charest le fait pour toutes ses annonces depuis deux mois, il s’est assuré encore hier matin d’avoir le maximum d’impact médiatique.
On parle aussi beaucoup d’André Boisclair dans les médias ces temps-ci, mais les nouvelles sont beaucoup moins bonnes pour le chef péquiste. En fait, on a l’impression que le plancher est en train de s’écrouler sous les pieds de M. Boisclair dans son propre parti. Déjà, avant Noël, des députés, des candidats, des organisateurs et de simples militants exprimaient des doutes de voir leur chef les mener à la victoire malgré l’impopularité du gouvernement Charest. Le mouvement s’est amplifié la semaine dernière, pendant de M. Boisclair faisait la tournée des grands-ducs à Paris.
Il semble bien, selon le nouveau sondage CROP, que le plancher commence à s’effondrer aussi dans l’électorat. Si Jean Charest cherchait des signaux pour accélérer les préparatifs électoraux, il en trouvera certainement un ou deux dans cette enquête.
Refusant, l’automne dernier, de céder à la panique qui s’emparait de ses troupes, Jean Charest avait fait le pari que son adversaire péquiste échouerait au test de crédibilité au sein de la population. Le pif de Jean Charest semble l’avoir bien servi.
Dans un désormais célèbre sketch, André Boisclair disait avant les Fêtes : « Le Québec n’embarquera pas là-dedans. » Il avait raison : le Québec, apparemment, n’a pas embarqué dans cet humour douteux, pas plus qu’il n’est prêt à s’embarquer dans un nouveau référendum.
Que s’est-il passé depuis décembre pour que le PQ dégringole de cinq points de pourcentage et se retrouve derrière le Parti libéral pour la première fois depuis novembre 2004 ? Il y a eu, bien sûr, l’offensive tous azimuts du gouvernement Charest, mais le PLQ n’a pris que deux points de pourcentage malgré une succession ininterrompue d’annonces. Les Québécois ne sont pas plus entichés de Jean Charest qu’ils ne l’étaient dans les derniers mois de 2006, mais ils le sont surtout de moins en moins d’André Boisclair.
Il y a eu, aussi, tout le débat autour de la reconnaissance de la nation québécoise par Ottawa, reconnaissance qui explique peut-être la baisse de trois points du OUI (à 42 %) dans le sondage.
Mais cela n’explique pas tout.
Quiconque est allé ne serait-ce qu’à un party de famille ou de bureau dans le temps des Fêtes a entendu parler de la parodie de Brokeback Mountain, un épisode quétaine et juvénile, futile en soi, mais qui a néanmoins semé un sérieux doute sur le jugement de M. Boisclair.
C’est la première fois qu’André Boisclair tombe deuxième derrière Jean Charest, ce qui est déjà mauvais parce qu’il ne pourra plus dire à ses détracteurs au sein de son propre parti (et ils sont nombreux ces temps-ci) qu’il est en avance et en bonne position pour gagner les élections.
Mais il y a pire : c’est la première fois que M. Boisclair perd des plumes après une controverse. Les histoires de cocaïne l’avaient plutôt poussé vers le haut. Les attaques de ses rivaux aussi. Cette fois, on dirait bien qu’il y a une égratignure dans le téflon.
Ce sondage tombe mal pour le chef du PQ, qui vient de connaître une dure semaine. Ceux qui le critiquent ouvertement dans les rangs péquistes ne se priveront pas de rappeler que leur parti a perdu 16 % depuis l’élection de M. Boisclair, passant de 50 % en décembre 2005 à 34 % aujourd’hui.
Juste avant la démission de Bernard Landry, qui ronge toujours son frein, le PQ obtenait 12 % de plus qu’avec André Boisclair aujourd’hui, à quelques semaines du déclenchement des élections.
Dans les circonstances, la décision de Louise Beaudoin de ne pas revenir en politique fait encore plus mal. Quand on sait à quel point Mme Beaudoin brûlait de reprendre du service, quand on sait son engagement pour la souveraineté, il faut conclure qu’elle ne se sentait pas très inspirée par son nouveau chef.
Minces consolations pour André Boisclair : les libéraux sont toujours en retard de 12 % chez les francophones et 56 % de Québécois disent vouloir changer de gouvernement.
Mais pour changer de gouvernement, faut-il encore avoir une solution de rechange en réserve et rien n’indique qu’André Boisclair soit vu ainsi par les Québécois. Au contraire.
Pas plus que Mario Dumont, d’ailleurs, qui n’a tiré aucun dividende électoral de ses récentes sorties contre les accommodements raisonnables.


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