C’est convenu, une langue vivante ne requiert pas, dans des conditions normales, qu’on la protège de manière excessive, qu’on la couve comme s’il s’agissait d’une espèce menacée.
La langue vernaculaire s’apprend dès la naissance et sans doute même bien avant, alors que l’enfant est encore dans le sein de sa mère. Il s’agit d’un mécanisme naturel, d’un apprentissage qui ne nécessite aucun effort particulier. Ceci étant dit, il faut que ceux qui parlent cette langue puissent l’utiliser largement, de façon à ce qu’elle exprime cette culture commune, à laquelle appartient cette personne.
On ne peut passer sa vie à jouer dans une barboteuse, il faut apprendre à nager si on veut, un jour, aller de l’avant et se lancer dans la piscine. Cela s’apprend d’abord et surtout à l’école, de façon systématique. Et apprendre une langue, c’est aussi bien connaître sa littérature que sa grammaire et ses particularités orthographiques.
Bien sûr, on pourra apprendre à nager de différentes façons, car il existe plusieurs styles de nage comme on peut également se targuer de parler plusieurs langues et connaître ainsi d’autres cultures, mais il en est toujours une qui sera celle qui nous servira le mieux, avec laquelle nous serons le plus habiles, et qui peut-être même nous sauvera la vie si nous avons à nager en eaux troubles. C’est cette langue qu’il faut protéger et privilégier, c’est cette façon de nager qu’il faut pratiquer tous les jours.
Une bonne partie des lecteurs du Journal a sûrement déjà voyagé et séjourné en France. Vous vous êtes attardés dans les marchés publics, dans une épicerie de quartier, dans une pharmacie pour vous procurer un médicament. Je suis certain que vous avez ressenti la même chose que moi, une certaine tranquillité, une certaine assurance en constatant que tout se déroulait en français, c’est-à-dire que l’affichage, l’étiquetage étaient prioritairement, sinon exclusivement en français, dans notre langue. Cela ne signifie pas que les Français ne sont pas bilingues. Bien sûr, ils ont un léger accent qui nous fait sourire lorsqu’ils prononcent the, par exemple, mais la majorité parle anglais, sans complexe. Ils peuvent même aller jusqu’à intégrer des mots anglais dans leur vocabulaire, comme parking, brushing, week-end, shopping, etc. C’est qu’ils ne se sentent pas menacés, ils peuvent nager également sur le dos, si besoin est, car ils sont parfaitement en contrôle de leur destinée et de leur style de nage.
Notre situation géographique en Amérique fait du français une langue sans cesse menacée. Nous ne pouvons même pas aspirer au statut de la langue espagnole avec ses plus de 350 millions d’Hispano-Américains. Cette force démographique de l’espagnol favorise nettement Puerto Rico. Malgré le statut officiellement bilingue (espagnol-anglais) de cette colonie américaine et de tous les efforts déployés pour l’angliciser, l’espagnol est toujours la langue d’usage de 98% de ses habitants. Cela ne se fait pas sans heurt et là-bas, comme ici, font rage les débats sur les dangers de l’anglicisation de la langue d’usage. Mais eux au moins, ils ont la force du nombre.
Vous ne pensez pas que si le Québec formait enfin un pays, tout serait plus facile? Nous n’aurions plus à craindre nos voisins du sud ou de l’ouest et nous pourrions même faire preuve d’audace, comme celle que propose madame Marois actuellement? Ou d’initiatives comme en prennent nos cousins français? Nous pourrions même fréquenter ce pub irlandais de la rue Bishop sans que les vieilles affiches publicitaires unilingues anglaises nous pompent l’air. La tolérance aurait bien meilleur goût.
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