Crise politique au Québec

Le doigt dans le tordeur

L’édifice de corruption du gouvernement libéral est sur le point de s’écrouler

Chronique de Richard Le Hir

En annonçant la mise sur pied d’une commission d’enquête sur la nomination des juges, Jean Charest s’en est tenu au strict minimum qui demeurait possible dans sa situation. Hélas pour lui, il s’est mis le doigt dans un tordeur qui finira par l’avaler tout entier. Ce n’est plus qu’une question de temps. Et, à en juger par les nouvelles révélations de Marc Bellemare ce matin, ce temps pourrait être assez bref.
Étant avocat, Marc Bellemare connaît parfaitement les règles de la partie dans laquelle il est engagé. Non seulement risque-t-il d’être poursuivi et condamné s’il s’écarte ne serait-ce que d’un iota de la vérité, mais il risque aussi sa carrière. Et pour qu’il se soit allongé le cou comme il l’a fait en avouant avoir nommé des juges sous la pression de contributeurs influents à la caisse du PLQ, il faut qu’il y ait encore dans cette affaire bien des dessous qui nous échappent. Des gros dessous, comme dans trafic d’influence et dessous de table.
En effet, le trafic d’influence est réprimé par le code criminel, et si Marc Bellemare devait avoir raison, il s’exposerait lui-même à des poursuites criminelles, sans compter les sanctions du Barreau qui pourraient le priver à jamais de son droit d’exercice. L’organisateur du PLQ Franco Fava, entrepreneur en constructeur dont on sait désormais qu’il est aussi avocat, a tout de suite senti la soupe chaude et s’est empressé hier de démentir toute intervention de sa part dans le processus de nomination des juges.
Bellemare sait fort bien que le critère de preuve en la matière est très exigeant : hors de tout doute raisonnable. S’il s’avance ainsi, c’est qu’il a en main toutes les preuves nécessaires pour satisfaire aux exigences des tribunaux. Ce qui n’est guère rassurant, car vu l’importance de l’enjeu pour lui-même, ce qu’il s’apprête à révéler dépasse en ampleur toutes les conjectures pourtant déjà peu flatteuses pour Charest et son gouvernement que nous sommes déjà en mesure de faire avec ce que nous savons ou subodorons.
À ce stade-ci, l’hypothèse la plus vraisemblable pour justifier le comportement de Bellemare, c’est qu’il a compris que tout l’édifice de corruption du gouvernement libéral était sur le point de s’écrouler. Ayant déjà démissionné pour cette raison, il cherche à mettre le plus de distance possible entre lui et le gouvernement Charest pour ne pas risquer d’être emporté dans la débâche qui s’annonce, quitte à prendre lui-même quelques coups au passage dont la sévérité se trouvera réduite par sa dénonciation.
Sceptiques ? Regardez les mansuétudes qu’on réserve aux délateurs.


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    14 avril 2010

    Financement PLQ et PQ
    Deux partis politiques, deux réalités Moyenne annuelle des contributions totales (en millions de dollars).
    Tableau comparatif de 1994 à 2008
    source ; Alec Castonguay,Le Devoir,15 avril 2010

  • Archives de Vigile Répondre

    14 avril 2010

    Petite question: Si Charest est reconnu coupable de quoi que ce soit, est-il obligé, selon la loi, de démissionner ? Je pose cette question parce que je sais que Charest ne le fera jamais, à moins d'y être obligé...
    Laurent Cambon

  • Archives de Vigile Répondre

    14 avril 2010

    Par qui est gouverné la province de Québec ? Le clown Charest ou une gang de clandestins de la construction ?
    En direct de l’Assemblée nationale ;
    « Le premier ministre prétend que les allégations de M. Bellemare sont fausses, donc, il déclenche une enquête.

    Est-ce qu'on doit conclure que s'il n'y a pas d'enquête sur le financement du Parti libéral, c'est parce que les allégations sont vraies? »
    La chef de l'opposition officielle,Mme Pauline Marois

  • Archives de Vigile Répondre

    14 avril 2010

    Un nouveau mot dans le vocabulaire politique: le FAVAritisme