Éducation

Le vouvoiement n’est pas la panacée à l’irrespect (version actualisée) (1)

Tribune libre

Parmi les mesures avancées par le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, pour augmenter le civisme et le respect à l’école, l’imposition du vouvoiement envers le personnel de l’école occupe une place importante aux yeux du ministre qui y voit une marque de respect envers les adultes.

À cet effet, le vouvoiement a toujours été associé à une marque de respect envers la personne à qui on s’adresse, voire la panacée aux problèmes liés au manque de respect de certains élèves envers leurs enseignants, une assertion envers laquelle, par expérience en tant qu’ex-enseignant au secondaire, j’émets certaines réserves.

Le respect ne s’impose pas par des «vous», il se gagne avec le temps, il s’acquiert dans une attitude respectueuse des personnes humaines que nous côtoyons, peu importe leur âge et leur statut. En termes clairs, l’enseignant gagnera le respect de ses élèves pour autant qu’il leur rend la pareille. En revanche, il est utopique de croire qu’un professeur qui exige le vouvoiement gagnera de facto le respect de ses élèves. En bref, si nous fabulons sur l’effet magique du vouvoiement, nous risquons de mettre un cataplasme sur la solution au problème d’irrespect de certains jeunes car force est de constater qu’on peut fort bien manquer de respect envers quelqu’un même en le vouvoyant et, vice versa, le respecter même en le tutoyant.

« Le respect ne tient pas au vouvoiement. Et je ne pense pas que les enseignants ont besoin d’une règle de plus à faire respecter dans leur classe... C’est une idée préconçue, galvaudée, que de penser que le vouvoiement est associé au civisme. C’est une règle de bienséance qui n’est pas garante du respect qu’on accorde à un professeur. On peut tutoyer et être très respectueux » , lance la professeure et chercheuse en didactique à l’UQAM, Mélanie Dumouchel.

« D’une perspective de convention sociale en français, on sait que le vouvoiement est un indicateur de respect et de reconnaissance de l’autorité. Mais les mots ont l’importance qu’on leur accorde», a souligné Alexandra Dupuy, doctorante en sociolinguistique à l’Université de Montréal. Somme toute, si le «vous» envoie un message de politesse, il installe à contrario une distance qui, de surcroît, n’incite pas nécessairement au respect…

(1) https://vigile.quebec/articles/investir-dans-le-lab-ecole-ou-la-restauration-des-ecoles  (deuxième partie)


Henri Marineau, Québec



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