La prétendue "sortie de secours" de Jean-François Lisée
9 juin 2016
Depuis plusieurs années je lis que le PQ, à chaque élection depuis 1995, cache son option derrière une proposition de bon gouvernement provincial. Ayant participé comme humble travailleur d'élection à quelques élections depuis 1970, j'ai pu constater que pour quelques-unes, on a effectivement tablé sur cet argument. Je dirais les élections de 1976, 1981, 1985 et 1998 surtout. Trois de ces élections ont d'ailleurs été gagnées.
Je sais que plusieurs diront qu'en 1976, on avait promis un référendum, qu'on a tenu d'ailleurs. Mais un grand nombre de votes provenaient de gens totalement écoeurés du gouvernement Bourassa. Dans les autres élections, le PQ a toujours présenté clairement son option principale dans les discours et les débats télévisés.
Je me rappelle aussi que dans toutes les élections sans exception, les dernières semaines étaient transformées par le Parti libéral en "quasi-préréférendum". Si les libéraux ont toujours utilisé cette arme, c'est que ses sondeurs lui disaient que ceci plomberait les chances du PQ de gagner. Ça veut tout dire sur la popularité réelle de l'idée de la souveraineté.
Dans la dernière élection, les analystes donnaient le PQ majoritaire après les deux premières semaines de campagne. Tout le monde est d'accord pour dire que le poing levé de Péladeau a fait basculer la campagne. La population avait voulu se débarrasser de Charest et ne voulait pas trop de Couillard, mais la perspective d'un référendum a fait changer leur vote vers la valeur "sûre" pour l'éviter. Les fervents caquistes comme Sylvain Bouchard de la radio de Québec ont même fait une campagne active pour demander aux partisans de délaisser à regret la CAQ pour les libéraux, afin de bloquer le PQ.
Je crois fermement que l'option souverainiste n'est pas à un niveau suffisant pour proposer un référendum à court terme, encore moins le gagner, car dans ce cas on va perdre la prochaine élection. C'est aussi simple que cela. Et il n'y a pas de campagne active qui va changer cela à court terme.
La seule façon d'y arriver est sur le long terme, avec le PQ toujours ouvertement souverainiste, mais dans un gouvernement péquiste (ministres et députés) aux affaires, avec le coeur à gauche comme il se doit. Pendant ce temps, on mène une campagne de fond, avec un argumentaire économique, social et émotif solide. On le fait en conjonction avec les partenaires (mais surtout pas QS).
Je suis indépendantiste depuis l'âge de 15 ans, ça fait déjà 46 ans. J'étais à Chicoutimi pour les référendums de 1980 et 1995, où le Oui a obtenu 60 et 70% des voix. Depuis je suis à Québec, où ce n'est vraiment pas facile...Là, la compagne de fond roule depuis 20 ans contre nous, avec un succès certain. Ça va prendre du temps pour tourner ça de bord.
J'ai toujours apprécié la finesse, l'intelligence et la connaissance intime des rouages de la politique qu'avaient des gens comme Levesque, Parizeau, Landry et Lisée. Ce sont ceux qui ont fait les meilleurs chefs, et trois d'entre eux ont gagné. Mme Marois a été probablement la meilleure pour gérer un gouvernement, mais son ascendant populaire a été clairement unhandicap, de façon très injuste d'ailleurs.
Avec Lisé, on peut gagner la prochaine élection, installer un gouvernement de haut calibre, et en sous-main, activer la campagne qui amènera l'adhésion de la population. Ça prendra le temps qu'il faudra; on le sent quand l'appui y est.
Les autres candidats sont voués à perdre, ne serait-ce que par la perspective, même édulcorée, d'un référendum dans le mandat courant.
Pour conclure ce long commentaire, j'ai remarqué que la plupart des textes de M. Cloutier sont inutilement vindicatifs. Je ne suis pas frileux des solides discussions, mais il suffit d'attaquer les idées, pas le gens.