La bataille des Plaines d'Abraham

La valse-hésitation

Fêter pour oublier?

Chronique de Louis Lapointe

Déjà que j’ai de la misère à fêter la St-Jean, imaginez la commémoration de la bataille des Plaines d’Abraham. Est-ce que la France commémorerait l'invasion de la France par l'Allemagne si de Gaulle ne l'avait pas libérée en 1944 avec l'appui des Alliés? La France remerciant les descendants d’Hitler de les avoir débarrassés des juifs. Ce serait complètement surréaliste!
Même si elle a perdu des batailles comme celle de Waterloo, la France est aujourd’hui un pays libre. Dans son cas, on ne peut donc parler de gestes de soumission lorsqu’elle commémore ses défaites.
Il y a pourtant plusieurs Québécois qui défendent la thèse voulant que l’Angleterre nous ait libérés du système féodal français pour nous donner la démocratie. Plusieurs d’entre nous ont déjà oublié le rôle qu’a joué le soulèvement des patriotes dans cette quête et le malheureux incendie du Parlement de Montréal par les Anglais qui s’opposaient à ce que les Canadiens aient trop de pouvoir.
En lisant dans le journal de ce matin les propos tenus par l’ancien chef du Parti Égalité, Robert Libman, invitant ses collègues anglophones du cabinet à démissionner si Jean Charest protégeait la loi 104 contre un éventuel jugement de la Cour Suprême qui lui serait défavorable, j’ai bien compris que les enjeux étaient toujours les mêmes 250 ans plus tard.
Comme les Français en 1944, plusieurs sont ceux qui attendent secrètement de voir défiler la parade de la libération dans les rues de Québec. Pendant ce temps, philosophes, les Québécois laissent les collaborateurs du régime tricher pour mieux se remplir les poches alors que plusieurs préféreront fêter, non pas pour commémorer, mais bien pour mieux oublier. Nul doute que la fête peut avoir des effets somatiques chez certains, comme c'est probablement le cas pour le maire de Québec.
***
L’année dernière, j’ai critiqué Mme Marois et le PQ à maintes reprises parce que je trouvais qu’ils ne parlaient pas assez de souveraineté, que ça leur jouerait de mauvais tours une fois l’élection venue. Le PQ a sorti la souveraineté des boules à mites dans les derniers jours de la campagne et sa cote s’est aussitôt mise à remonter.
Mme Marois préfère la prudence à l’audace. Parce qu’elle veut ravir les votes des adéquistes fatigués, elle continuera à adapter son discours en conséquence ; parce qu’elle veut obtenir les votes des électeurs de la région de Québec, on ne l’entendra pas parler du projet de Rabaska. La controverse qui entoure présentement les fêtes de commémoration de la bataille des Plaines d’Abraham est un sérieux indice nous suggérant que l'histoire risque de se répéter au cours des prochaines années.
Nous le savons tous maintenant, nos adversaires aussi, Mme Marois hésite à prendre position parce qu’elle ne veut pas s'aliéner le vote des électeurs indécis, comme si elle avait choisi l'indécision comme marque de commerce pour les attirer vers le PQ. La valse-hésitation recommencerait-elle donc pour quatre ans? Après avoir entendu le discours de Mme Marois le soir du 8 décembre dernier, plusieurs ont cru que cette question était réglée puisque selon ses dires, le PQ était redevenu le grand parti souverainiste qu’il avait jadis été. Vivement le bâton de pèlerin!
Louis Lapointe

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    29 janvier 2009

    Vous avez de la misère avec la St-Jean, de la misère avec le 250ième et maintenant, je pense, de la misère avec Mme Marois.
    Maudite misère. Et Mme Marois a bien de la misère avec le fédéralisme qu'elle ne parvient pas à combattre, prise dans le noeud gordien que constitue une éventuelle victoire électorale à laquelle s'oppose, croit-elle (?), l'indépendance politique.
    GV

  • Archives de Vigile Répondre

    28 janvier 2009

    Mme Marois ne peut quand même pas passer son temps à se prononcer sur tout et sur rien. Elle n'a pas à se mêler à des chicanes de clochers qui concernent un projet de reconstitution sur des territoires du gouvernement fédéral et de la ville de Québec. C'est au maire Labeaume à donner son accord ou non à ce projet à saveur touristique là.
    Je n'y vois rien de politique dans cette reconstitution là à part ceux qui veulent en faire ou en voir. Si on sortait un film des évènements, ça serait pareil à moins qu'on y souligne, à tort, que les Français étaient des incapables. Se faire battre à la guerre par un adversaire plus nombreux et mieux armé n'est pas un déshonneur qu'il faut cacher éternellement...me semble...genre.