Faux scandale à Rouyn-Noranda

À hauteur d’homme ou l’art de bien s’entourer

Chronique de Louis Lapointe

Qui n’a pas déjà assisté à des sautes d’humeur de politiciens fatigués ou exaspérés ?

Je me souviens avoir vu à la télévision un soir d’élection Lucien Bouchard pester contre un scrutateur qui refusait de lui serrer la main.

J’ai également assisté en personne à une sainte colère de René Lévesque à l’endroit de Gilles Baril parce qu’il avait mal organisé une assemblée publique où des contestataires qui avaient établi un campement d’hiver au milieu du lac Osisko à Rouyn-Noranda avaient monopolisé le micro et lui avaient posé des questions auxquelles il ne souhaitait pas répondre. Cette journée devait être consacrée à l’émission de lettres patentes de la toute nouvelle UQAT. C’était en 1984.

Que Pierre Karl Péladeau vive le même genre de situation 31 ans plus tard dans la même ville est pour le moins ironique.

Pierre Karl Péladeau a été invité à l’édition hivernale du Festival de la musique émergente par Sandy Boutin, le président de ce festival, un homme qui s’avère également être un de ses organisateurs politiques.

En plein milieu d’un spectacle, Pierre Karl Péladeau a demandé à un groupe de chanteurs québécois d'interpréter une chanson en français alors que tout leur répertoire était en anglais, ce qu’il ne savait manifestement pas.

Cet incident est devenu un événement national quand la Presse a décidé de le rapporter deux semaines après le fait en citant les propos de Jean-Guy Côté, un partisan de Québec solidaire, et ceux de l’ancien député libéral du coin, Daniel Bernard. Un bel exemple du professionnalisme de la Presse. Les journalistes Denis Lessard, Jasmin Lavoie, Marie-Michèle Sioui, Martin Croteau, Émilie Côté sont sur le coup depuis samedi dernier. Le chroniqueur Alain Dubuc en a rajouté une autre couche ce matin.

Afin de désamorcer l’incident, l’attaché de presse de Pierre Karl Péladeau a avoué que ce dernier s’attendait à des chansons en français et a suggéré que son horaire avait été très chargé cette journée-là.

On comprend de tout ça que Pierre Karl Péladeau a dit tout haut ce qu’il pensait tout bas parce qu’il était fatigué.

Pourtant, Pierre Karl Péladeau a raison lorsqu’il propose que des chanteurs francophones du Québec puissent inclure au moins une chanson en français, si ce n’est pas plus, dans leur répertoire même s’ils ont pris la décision de chanter en anglais.

De petits esprits ont suggéré que si Pierre-Karl Péladeau était cohérent avec lui-même il devrait imposer le français aux interprètes de l’émission La Voix diffusée à TVA.

Les gens intelligents ont tous compris que PKP souhaitait qu’on fasse une meilleure place au français dans la musique québécoise sans exclure l’anglais.

Les gens intelligents ont aussi tous vu que Pierre Karl Péladeau était aussi mal entouré que l’avaient été les derniers chefs du Parti Québécois.

À Hauteur d’homme, ce documentaire de Jean-Claude Labrecque sur la dernière campagne de Bernard Landry, nous a donné une bonne idée du manque de perspicacité des conseillers qui entourent parfois nos chefs.

À mon avis, il appartient à celui qui l’a invité dans ce guêpier de le sortir de là.

Il appartient à Sandy Boutin, qui a été organisateur de Bernard Landry, André Boisclair et de Pauline Marois, de désamorcer toute cette histoire en déclarant que Pierre Karl Péladeau a bien raison de demander aux chanteurs québécois d’inclure au moins quelques pièces en français dans leur répertoire, même s’ils font carrière en anglais.

Il n’y a rien de honteux à cela. Même Arcade Fire chante en français.

Toutefois, si Pierre-Karl Péladeau doit retenir un seul enseignement de ce faux scandale de Rouyn-Noranda monté en épingle par l'armada de la Presse, c’est que, s’il veut vraiment faire face à la musique et réaliser un jour l’indépendance du Québec, il devra s’entourer des meilleurs conseillers et surtout les écouter.

***

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Où est l’anglais ? Il est partout !

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Louis Lapointe534 articles

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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12 commentaires

  • Louis Lapointe Répondre

    22 février 2015

    M. Bélisle,
    « Honi soit qui mal y pense ». Ce proverbe que vous citez vous va comme un gant, M. Bélisle.
    L.L.

  • Jean-Pierre Bélisle Répondre

    22 février 2015

    Je vous lis et je vous relis, sans comprendre exactement à quoi vous voulez en venir finalement.
    En mode exégèse, je me risquerais à suggérer que votre intervention est timorée et que vous ne parvenez pas à proclamer clairement l’immense gêne que vous a causé Monsieur Péladeau.
    De fait, votre expression « faux scandale » me semble cacher celle de « faux pas ».
    Le conformisme est le propre de bon nombre d'avocats. Je doute fort que de toute votre vie, vous n’ayez jamais osé lancer un seul pavé du genre dans la mare. Sinon, vous auriez certainement écrit votre texte autrement.
    Honi soit qui mal y pense.

  • Chrystian Lauzon Répondre

    14 février 2015

    Bonjour M. Lapointe, heureux de votre retour pour porter le meilleur de Nous-même!
    Un grain de madelinot, un seul, mais quel GRAIN d’affirmation, dans l’engrenage du hachoir fédéraliste assimilateur de la nation Québécoise-française et en peur l'offensive se médiacrassise.
    Comment se fait-il que le « En français, svp! » de PKP, d’un soir de spectacle anglo mur à mur, provoque la réprobation médiatisée et organisée, alors que celui d’un fanatique Sugar Sammy fédéralo-libéral, méprisant en spectacles répétés une nation française entière et majoritaire, ne soulève pas la honte ni l’opprobre médiatique, mais la jubilation aliénée d’un prix de l’humour de l’année?
    Alors qu'il a suffi d'une seule organisation juive, pour supprimer à la veille de sa première montréalaise, le spectacle de Dieudonné.
    Un humour, 2 mesures de tolérabilité de fait?
    Poser la question est une chose, PKP fait ressortir la réponse : tout un progrès hygiénique de dépathologisation politique en ce Québec d’automuetants léthargisés!
    Fier de vous M. Péladeau : JE SUIS PKP!
    Vous redonnez la bite à tibi!
    Allez Office de la langue française! donnez-lui SON prix comme étant le Nôtre, puisqu'il est inestimable pour l'avenir d'un Québec sans canada - dont j'ai inversé, en esprit, feuille tombée, le drapeau ce 14 février, jour d'expulsion des faux "love-in".
    Chrystian Lauzon

  • Archives de Vigile Répondre

    14 février 2015

    Une autre bonne raison pour bien s'entourer rapidement,le gouvernement Harper est actuellement très actif dans les délimitations des frontières du Québec,au Grand-Nord.
    Nouveau positionnement du Québec dans l'Arctique
    ...«La Convention des Nations unies qui porte sur le droit de la mer stipule que les états côtiers ont un droit d’accès aux ressources des fonds marins qui constituent le prolongement de leur plateau continental et cela jusqu’à concurrence de 200 miles marins, ce qui est considérable. Voilà pourquoi le Canada et la Russie s’acharnent depuis ces dernières années à cartographier l’essentiel des fonds marins arctiques qui pourraient être rattachés à leur territoire respectif. Le Québec doit se doter d’une constitution qui fera en sorte de délimiter son territoire respectif et de réaliser son indépendance dans les meilleurs délais. »...

  • Archives de Vigile Répondre

    14 février 2015

    Erratum: Qu'attendent Drainville, Ouellet, Cloutier et Céré pour CONCÉDER la victoire immédiatement... au lieu de céder immédiatement...
    André Gignac 4/2/15

  • Archives de Vigile Répondre

    13 février 2015

    Monsieur Lapointe
    M. Péladeau aura tout un ménage à effectuer à la direction du PQ après la course à la chefferie. Si ce parti n'a plus la cote des Québécois, c'est à cause de l'infiltration dans ce parti par la CIA, le SCRS, la GRC et les fédéralistes de tout acabit qui y sèment la bisbille. Cette image de division interne, de chicanes continuelles ne donnent pas au peuple québécois une image positive de ce parti. Pourquoi pensez-vous que cette course à la chefferie n'est pas encore terminée? C'est pour nuire à M. Péladeau.
    Durant ce temps, Couillard s'en donne à coeur joie en sabrant dans tous nos programmes sociaux et personne au PQ, faute de chef, ne donne la réplique à Couillard. Nous avons l'impression que le PQ n'existe plus, qu'il est totalement absent des débats actuels. Et comment faire l'indépendance du Québec en mettant la charrue devant les boeufs en parlant continuellement de référendum?
    Et je rajouterai que jamais l'indépendance du Québec ne se fera si M.Péladeau laisse tout le champ libre à ses adversaires fédéralistes qui contrôlent le message avec leur propagande fasciste, à la prochaine élection, qui selon moi devrait être référendaire. Qu'attendent Drainville, Ouellet, Cloutier et Céré pour céder la victoire immédiatement à M. Péladeau; des divisions supplémentaires, nous n'en voulons plus. Le Québec a besoin, présentement, d'un vrai chef d'opposition pour contrer la dictature de Couillard.
    André Gignac 13/2/15

  • Louis Lapointe Répondre

    13 février 2015

    M. Bourassa,
    Dans une chronique du 15 février 2012, j’exprimais exactement les mêmes craintes que vous au sujet du projet de loi C-30 faussement appelé Loi sur la protection des enfants contre les cyberprédateurs

    «Séparatistes» sous surveillance policière
    Dans le Devoir de ce matin, Ed Broadbent et Roy Romanow énoncent les risques de C-51, un projet qui va encore plus loin que C-30 :
    La lutte contre le terrorisme menace nos droits

  • Archives de Vigile Répondre

    13 février 2015

    Bonjour Mr.Lapointe.
    Je me garde une réserve au sujet de PKP.il a dit qu'il avait beaucoup appris ,auprès de Brian Mulroney et de Lucien Bouchard,un n'est certainement pas souverainiste et l'autre ,je ne me pose plus la question. Reste à savoir ce qu'il a appris.Le plus grand défit, à mon avis c'est de redonner confiance aux Québécois, qui souffrent d'un déficit d'estime de soi. Ça fait plus de vingt ans,que l'on nous martèle,que nous sommes les plus endettés,les plus corrompus ect, tout ceci laisse des traces,et les médias de PKP y sont joués un rôle.

  • Archives de Vigile Répondre

    12 février 2015

    «À hauteur d’homme ou l’art de bien s’entourer»
    Effectivement M. Lapointe et ce qui s'en vient va être autrement plus délicat à contenir qu'un concert rock en anglais.Je parle de l'angle avec lequel le fédéral et le PLQ aborderont la prochaine campagne électorale.Le gouvernement Harper a profité d'un incident à Ottawa pour faire passer en catastrophe une nouvelle loi antiterroriste et puis vlan! Charlie Hebdo, et une autre loi pour donner plus de pouvoir SCRS,dont Couillard a déjà fait parti.Nous avons vu lors des dernières élections le mot d'ordre donné aux militants péquistes en ce qui a trait aux questions des journalistes sur le référendum.On pourrait le résumer à: cou-couche--panier.
    Ces nouveaux outils du fédéral vont bien plus loin qu'avant.Les mesures de guerre d'octobre 70 sont maintenant légalisées et croyez-moi que Couillard va s'en servir pendant la prochaine campagne, comme cela se fait chez nos voisins du sud:
    Aux E.U.le FBI cogne aux portes des opposants aux sables bitumineux:
    Les propos indépendantistes seront épinglés comme radicaux et pourquoi pas extrémistes dans une mondialisation de la narration et seront montés en épingle et en boucle justement par l’armada de la Presse pour effrayer la population et c'est là que la partie va se jouer.
    Qui préférera céder à la peur ou bien s'épanouir comme nation indépendante d'un pays qui n'a plus aucune affinité avec le peuple de Canadiens français que nous sommes et même aussi de bien des anglophones et allophones du Québec?
    Rajoutons à cela ce que disait Gilles Proulx à Radio-Infocité dimanche matin dernier:depuis 1995,il y a 1 million de nouveaux immigrants qui se sont installés au Québec et qui penchent majoritairement vers le fédéral,et vous avez là toutes les raisons du monde pour que PKP s'entoure non seulement de bons conseillers,mais des conseillers de génie!
    Ce sera la partie de la dernière chance.Les efforts de tous et leur courage seront vitaux.Que le sort en soit jeté.

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    12 février 2015

    Oui, l'auteur a dit: " il devra s’entourer des meilleurs conseillers..." MAIS il a aussi dit, et c'est le plus important: "... et surtout les écouter."
    PKP est un esprit libre, convaincu que son expérience personnelle pourra le mener à la "politique autrement". Mais l'ennemi du Québec ne travaillera pas autrement, il va le dénigrer! Ne soyons pas complices de l'ennemi: quand on sort une nouvelle à sensation, voyons d'abord d'où elle vient.
    Écoutons aussi Bock-Côté: Montréal la postmoderne est fière de parler les 2 langues en même temps et les coquets (petits coqs) entreprenants se moquent des vilains nationalistes qui refusent d'y applaudir... un peuple qui veut se suicider ne veut pas qu'on le sache.

  • Archives de Vigile Répondre

    11 février 2015

    Je pense comme vous monsieur Lapointe. Ma hantise, c'est que PKP soit mal entouré... C'est ce que je crains le plus.
    C'est ce qui nous a coûté la dernière campagne électorale et je tremble à l'idée qu'il ne dispose pas d'un entourage solide...

  • Archives de Vigile Répondre

    11 février 2015

    Heureux retour Monsieur Lapointe,
    Toujours la réponse exacte à un problème embettant, que dire de plus...
    Marcel Boucher