Deuils migratoires

sait-on combien d’immigrants le Québec peut accueillir et intégrer chaque année

Immigration — une politique de dénationalisation

Il y a quelques semaines nous apprenions qu’en 2010, le Québec avait connu une immigration record, recevant 53,981 personnes. En mai dernier, le vérificateur général du Québec affirmait pourtant qu’on ne connaissait pas la « capacité » d’accueil du Québec. Aujourd’hui sort en librairie le livre « Pourquoi l’immigration ne sauvera pas le Québec » De Benoît Dubreuil et Guillaume Marois. Le sujet, récurrent : sait-on combien d’immigrants le Québec peut accueillir et intégrer chaque année. Aucun parti politique ne se penche pour l’instant sur la validité des quotas d’immigration et sur notre capacité d’intégration, ayant peur des étiquettes culpabilisantes.
Laissez-moi vous donner un aperçu global de ce que je vois sur le terrain, dans nos classes. Plusieurs de ceux qui sont déjà ici peinent à travailler, à s’intégrer et à apprendre le français. On leur ouvre la porte, mais on ne montre pas comment se rendre à destination. Notre gouvernement réduit sans cesse les classes de francisation qui est le premier outil d’intégration, par souci d’économies. Pourtant, il est prouvé qu’une immigration non francisée ou en méconnaissance des codes culturels coûte cher à l’État. À Montréal, le taux de chômage chez les immigrants arrivés depuis moins de cinq ans est trois fois supérieur à celui des chômeurs nés ici ! Par ailleurs, selon statistiques Québec, 35% des nouveaux arrivants ne maîtrisent pas le français à leur arrivée. Plusieurs, étiquetés comme « maîtrisant le français », ne peuvent réussir un examen de niveau intermédiaire, inaptes, donc, à travailler.

Les classes de francisation comme la mienne se doivent d’intégrer les gens et les outiller pour réussir ici. Cependant, n’étant pas obligatoires, plusieurs n’y vont pas, préférant travailler dans des manufactures pour subvenir à leurs besoins. Une avenue à envisager serait de multiplier les cours de francisation dans les entreprises. Il s’agit non pas d’une dépense, mais d’un investissement. Effectivement, cela ferait en sorte que ces néo-Québécois se franciseront à même leur travail, ce qui éviterait la sous-estimation des nouveaux arrivants surqualifiés. Présentement, en prenant compte la propension anglicisante du milieu de travail montréalais, nous ressentons l’échec de nos politiques d’intégration.

Lors d’une demande d’immigration, ceux qui désirent s’établir ici doivent passer des entrevues de sélection. On leur y construit une belle utopie, spécifiant qu’ils sont aptes au travail, que nous avons besoin d’eux et qu’ils obtiendront rapidement leurs équivalences, permettant d’obtenir un emploi pour lequel ils sont qualifiés. On ne leur parle pratiquement pas des examens d’entrées à une profession ou de la quasi-nécessité d’une expérience québécoise.

Les immigrants déchantent rapidement en voyant qu’on leur a vendu une illusion. Que le « rêve Québécois » n’existe que dans les fascicules d’immigration Canada. La frustration ressentie lors de la réception des « équivalences » d’études est démesurée. Ils se doivent souvent de refaire leur formation. On ne doit pas voir ici une attaque contre les ordres professionnels qui veulent s’assurer que les gens aient des formations adaptées à la réalité du milieu québécois, mais on ne peut fermer les yeux face à la désinformation des services d’immigration. Un programme de stage en entreprise pourrait d’ailleurs être créé, permettant aux immigrants d’obtenir les connaissances requises de leur domaine de travail, évitant de refaire leur formation intégralement.

Cessons de sélectionner des gens pour leurs compétences si ces dernières ne valent rien et choisissons les gens dont nous avons réellement besoin. Ayons comme devoir et obligation de posséder les ressources et les structures d’accueil nécessaires avant d’augmenter le nombre d’immigrants que nous recevons annuellement. Nous réussirons alors à intégrer les nouveaux arrivants, qui seront en mesure de réussir au Québec. Nous répondrons alors aux objectifs économiques et démographiques pour lesquels nous faisons appel à l’immigration. Gardons en tête que dans le quotidien des néo-Québécois, derrière ces « records » se cache un nombre « record » de frustration et de rêves brisés.


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