Réplique à André Pratte - "Le bon sens en péril"

Un «bon sens» à sens unique

Tribune libre 2008

M. André Pratte dans son texte intitulé Le bon sens en péril publié dans La Presse du 2008 09 25, nous dit :

« Les réaménagements des budgets de Patrimoine Canada ne mettent pas la culture en péril. Ils occasionnent des tracas à certains acteurs de l’industrie culturelle, ce qui n’est pas la même chose. C’est déplorable, des correctifs doivent être apportés. Mais ça ne justifie pas une mobilisation d’une telle ampleur. »

«  Des correctifs doivent être apportés », le contraire ferait courir un grave péril au «  bon sens ». Effectivement ! Tellement que le seul fait de le dire aurait dû tout changer de ces « déplorables... tracas ». Une simple suspension des décisions jusqu’à l’annonce de programmes de remplacement aurait pu suffire. Or, les Conservateurs de la Art-Peur n’ont pas reculé, contre tout « bon sens », ils ont plutôt activé la machine du péril.
Et pour cause... Aucun «  bon sens » ne leur donnait de suffisante raison de retraiter, puisqu’il n’a jamais été question de saine gestion mais plutôt de « bon sens » idéologique de leur clientèle de droite qu’ils voulaient fédérer. Les raisons données appuient ce constat, il s’agissait de ne plus subventionner ce qui était considéré indigne du « Canada » de l’avis des Conservateurs. Il s’agissait d’arracher aux actuelles instances décisionnelles ce qui, en matière d’art et de culture, devait ou pas « représenter le Canada ». Un autrement plus grave péril au « bon sens » que le simple fait de couper unilatéralement quelques programmes de subventions. Cela n’a pas échappé aux artistes.
Les Conservateurs et leur bataille idéologique
Les conservateurs ont jusqu’à aujourd’hui encore appliqué leur plan de bataille idéologique. Ils ont donc via leur machine internautique et médiatique, lancé leurs troupes de la droite désormais fière de ses dires, à l’assaut des Courriers des lecteurs, Forums, blogues, lignes ouvertes, via aussi les chroniqueurs, éditorialistes et animateurs qui dans les médias épousent de près ou de loin leur cause, inondant ce tout artistique d’accusations indignes, démagogiques, allant jusqu’à l’encontre même de leur logique qui leur faisait dire en même temps, « les artistes sont « gâtés » » et « nous augmentons les budgets à la culture ». N’importe quoi et son contraire partisan pourvu que les artistes en souffrent, ces souverainistes, ces écologistes, ces empêcheurs de réchauffer la machine de guerre en même temps que la planète terre et politique.
Faudrait savoir ! S’ils sont gâtés les artistes, pourquoi augmenter les budgets ? Si le bon sens avait prévalu du côté Conservateur, comme semble artificiellement et rétrospectivement le souhaiter M. Pratte, la mobilisation « d’une telle ampleur » n’aurait pu poindre, ni avoir quelqu’effet. Si le bon sens n’était pas en péril du côté Conservateur, si les Conservateurs n’avait pas voulu instrumentaliser quelques coupures arbitraires et purement politiques ( tout le contraire de la saine gestion ), si les Conservateurs constatant leur « erreur » avaient annoncé la suspension de leurs coupures, comme le « bon sens » le commandait, il n’y aurait pas eu de mobilisation, ni telle décriée ampleur, augmentant au fur et à mesure de l’expression de l’obstination conservatrice.
Les apprentis sorciers Conservateurs ont voulu se servir des coupures dans les arts pour fédérer leurs appuis hors les grands centres à peu de frais, en tablant sur les plus vils et démagogiques préjugés de leur clientèle. Tête baissée, en dépit de tout « bon sens » ils ont persisté et signé. Que faire d’autre que de résister. En vertu de quel « bon sens » fallait-il retraiter pour paver la voie à leur rouleau compresseur débilitant ? Il y avait péril certes. Et, le péril n’a pu être contré que par une mobilisation sans précédent que déplore aujourd’hui notre prosélyte du « bon sens », avide de tancer les souverainistes.
Au moment où les artistes du Canada emboîtent le pas, au moment où de nouveaux sondages montrent que les Conservateurs reculent au Québec, cela n’indique-t-il pas que lorsque, via ses artistes, le Canada aura pris la pleine mesure de la vindicte partisane de la droite, il en sera de même qu’au Québec ? Cela n’indique-t-il pas que la « mobilisation de telle ampleur » était bien la bonne réplique ? Le bon sens l’indique. Au lieu de tenter encore d’affaiblir les artistes en les accusant de méprise, M. Pratte n’aurait-il pas dû les remercier d’avoir su réagir avec fermeté, en toute symétrique et réciproque ampleur s’opposant à celle à laquelle ils devaient faire face, en vertu du « bon sens » ? Mais pour cela, il lui faudrait cesser d’être le partisan de l’écrasement des souverainistes. Et, c’est au dessus de ses forces.
Le péril contré par l’ampleur de la réplique des artistes
Si le péril est finalement jugulé, si le « bon sens » peut un jour prévaloir, n’est-ce pas justement à cause de l’ampleur de la mobilisation des artistes ? Seule la menace du recul électoral des Conservateurs pouvait faire en sorte que ces apprentis sorciers se rendent compte que leur jusqu’auboutisme partisan sans « bon sens », occasionnait de « déplorables » « tracas à certains acteurs de l’industrie culturelle » auxquels il aurait d’abord fallu « apporter des correctifs ». Rien, ni aucun avertissement n’a semblé pouvoir les raisonner. Au contraire, ils en profitaient pour jeter de l’huile sur le feu, mettant en péril non seulement le « bon sens », mais aussi l’ensemble de la confiance que l’on est en mesure d’accorder à de tels boutefeux.
Ce ne sont pas «  les réaménagements des budgets de Patrimoine Canada » qui ont justifié une mobilisation d’une telle ampleur, mais c’est bien plutôt l’intention pressentie par les artistes, et qui s’est confirmée dans le démagogique entêtement des conservateurs et la bassesse des arguments d’une minorité d’opinion de droite tentant de se faire passer pour la majorité de l’opinion publique du Québec et du Canada, qui en a provoqué l’augmentation au fur et à mesure de leur déploiement.
Le 400e et les canadianisateurs
Il aurait donc fallu en vertu de ce même principe que défend contre tout « bon sens » André Pratte, que les artistes «  se réjouissent » que les dépenses fédérales du 400e aient été orientées de manière à cacher les couleurs de Québec, du Québec, «  plutôt que de dénonc[er] la « canadianisation » des fêtes ». Pourtant, quand le Canada dépense sans obliger les Québécois à nier, cacher, leur sentiment d’appartenance nationale, comme cela a été le cas pour le Moulin à images, les artistes et les souverainistes abondent, sans que cela ne fasse de Robert Lepage un zélote souverainiste. Ce que nous propose André Pratte, c’est le « bon sens » du seul sens qui lui convient, celui d’un Canada quel qu’il soit... même celui de la droite la plus « sans bon sens » qui soit, et qu’il faudrait accepter sous prétexte que les artistes verseraient à l’entendre dans la « démagogie sur le dos d’un gouvernement qui, en plus d’avoir le malheur d’être de droite, menace d’affaiblir le mouvement souverainiste. »
Les Conservateurs menacent d’affaiblir le mouvement souverainiste
Tiens donc ! Le chat sort du sac à la dernière phrase. Les coupures et la charge tous azimuts contre les artistes de la droite... « menace(nt) d’affaiblir le mouvement souverainiste ». Comme si le but de ces coupures n’avait justement pas été ça. Comme s’il avait fallu se laisser faire ! L’embuscade conservatrice permettant d’isoler les artistes qui ne manqueraient pas de monter au front ? Depuis le temps qu’ils mettent les bâtons dans les roues de celles et ceux qui veulent le canadianisateur bien du peuple. Il était temps qu’ils subissent la défaite et qu’ils soient dénigrés, si possible par le peuple lui-même.
Je comprends bien que M. Pratte et les canadianisateurs comptaient bien remporter la bataille qui aurait fait selon leurs plans, crouler sous la vindicte publique les artistes « gâtés », après qu’ils aient instruit le procès de l’inutilité du Bloc. Tout cela était congruent. L’ampleur de la réplique des artistes n’étant qu’un obstacle qu’il faut discréditer pour mieux les écraser. « Chers artistes, montez au front pour nous donner le prétexte dont nous avons besoin pour vous enfoncer le Canada dans la gorge, mais surtout, protestez, mais pas trop, quand même ! On vous discrédite et on vous humilie, mais si vous protestez faites-le sans ampleur ! De grâce, laissez-nous une chance de vous écraser ! Couchez-vous ! Vous voyez bien que le « bon sens » le commande. Ça marche sur tous les autres, pourquoi faudrait-il que ça ne marche pas sur vous ! »
M Pratte refuse de reconnaître que les artistes ont mené une fière et périlleuse bataille contre une droite sans « bon sens », sous le prétexte démagogique qu’ils veulent aussi défendre leurs idées souverainistes contre les attaques indues, indirectes et sournoises à leur encontre masquant mal une charge contre leur appui à la souveraineté du peuple du Québec, dont ils expriment à bon droit l’âme qui se veut libre et souveraine, hors les menaces de représailles et autres chantages de toutes natures, peu importe l’État qui le gouverne pourvu qu’il émane nommément de lui. Ce qui n’est pas le cas. Ce Canada unilatéral de Trudeau jusqu’à Harper, coupe unilatéralement contre l’avis de tout parti, sans autre appui que celui de sa petite clientèle qu’il espérait mobiliser pour former un gouvernement majoritaire. Si cela n’est finalement pas le cas, on le saura le soir de l’élection, la bataille menée par les artistes du Québec n’y sera pas étrangère, les artistes du Canada pourront les en remercier, puisque M. Pratte lui, s’en abstiendra. Contre tout bon sens, il ne voit de péril que dans l’essor souverainiste que ne manquerait pas d’engendrer la charge sans « bon sens » du va-tout jusqu’auboutiste de la droite conservatrice du Canada, si elle n’avait pas fait face à jumelle ampleur.
Tancer ou remercier les artistes ?
Tout péril extirpé, non sans que l’ampleur de la réplique ait forcé un recul, du moins dans les sondages, facile après coup d’affirmer que l’ampleur n’était pas utile. D’évidence, elle l’était, aujourd’hui encore, malgré l’ampleur injustement décriée et en attendant le verdict des urnes, les Conservateurs persistent et signent, contre tout « bon sens », dos au mur qu’ils sont. Le bon sens prévaudra-t-il dans leur cas ? Suspendront-ils l’effet de leurs coupures avant l’échéance électorale ? Les paris sont ouverts ! Dans tous les cas, l’ampleur de la réplique aura seule pu faire différence. Soit parvenir à ce que les Conservateurs renoncent à leurs extrêmes, soit faire en sorte de les faire apparaître avec clairvoyance dès maintenant telles, pour qu’il ne soit pas dit qu’on n’était pas averti, lorsque, parvenant malgré toute ampleur à emporter la majorité des suffrages, nous nous plaindrions en pleurs, de pires extrémités encore que ne font qu’annoncer les prémisses unilatérales sur lesquelles se fondent les actuelles et idéologiques coupures de la droite conservatrice de la Art-Peur. Si tout va bien, cependant, et que les suffrages correspondent à l’ampleur que décrie M. Pratte, ce n’est pas de si tôt qu’on pourra s’en prendre à nouveau aux artistes, et c’est tant mieux, non seulement pour la souveraineté, mais simplement en vertu d’un certain simple « bon sens » auquel adhèrent les Libéraux, le NPD, les gouvernements du Québec et de l’Ontario, ainsi que les artistes, les institutions, le milieu qui gravite autour des artistes et des arts au Québec et au Canada, incluant des gens du milieu des affaires, fédéralistes et souverainistes confondus. Une société fâchée avec ses créateurs, ses artistes, et toutes celles qui gravitent autour, de la jeune musicienne qui veut un coup de pouce pour se lancer, à l’artiste mature qui nous fait rayonner à travers le monde, n’augure rien de bon, rien qui n’ait quelque « bon sens ». C’est ce péril que devrait craindre M. Pratte. Au contraire, il continue à tancer les artistes alors qu’il devrait les féliciter.
Luc A.
PS
Le clip des artistes et la caricature des censeurs de la droite conservatrice canadienne.

Maintenant qu’a fait long feu la manœuvre des canadianisateurs Conservateurs contre les artistes supposés à tort « gâtés », comme semble le démontrer les récents sondages au Québec, va-t-on fafiner et ajouter l’injure à l’insulte en accréditant la fausse équation «  artistes souverainistes = xénophobie ethnique haineuse et méprisante  » ?

Avant que telle falsificatrice instrumentalisation prenne de l’ampleur, tel que la lettre d’opinion publiée dans la version papier du Soleil semble l’initier, ( Commentaire - Peter Stuart, Québec, «  Des excuses, M. Rivard  ». Je ne l’ai encore pas trouvé dans Cyberpresse ), mieux vaudrait prendre la caricature du clip que commente M. Peter Stuart pour ce qu’elle est, et non pas pour ce que l’on veut qu’elle soit pour accuser à tort les artistes souverainistes de commentaires « haineux et méprisants », à savoir, et je cite : « Le ton du clip de ce groupe d’artistes, diffusé sur You-Tube, est très méprisant envers les anglophones et le Canada en général. »

Or, il n’est absolument pas question de ça. Il est plutôt question dans ce clip de caricaturer d’éventuels nouveaux censeurs des programmes de remplacement annoncés par les « Conservateurs », photo de Art-Peur et Verner en fond de scène, à l’appui. Il ne s’agit pas de caricaturer les « anglophones et le Canada en général », mais bien de caricaturer leurs propres « Elvis Gratton » de la droite conservatrice canadienne qui tente de s’imposer à Ottawa. Une telle caricature pourrait être faite sans changer une ligne de la présentation loufoque qui est faite des prosélytes de la droite conservatrice de la Art-peur, tel qu’elle pourrait être, toutes choses égales par ailleurs, caricaturée par des anglos eux-mêmes. Comme si le Canada anglais n’avait pas lui aussi ses propres Elvis Gratton. Comme si ces coupures avaient été faites avec l’assentiment du NPD, des libéraux et des verts du Canada, en somme du Canada tout entier ! ?
Luc A.


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    26 septembre 2008

    Peut-on espérer une opinion sérieuse de journaliste qui travaillent pour le capital de Power Corp, lequel choisit le fédéralisme pour mieux servir sa fortune et voit le PLC comme le parti qui incarne le plus ses intérêts? Avec la collusion Gesca - RC la boucle est bouclée. Le contrat secret lie toujours ces des compères. À preuve ce sont toujours les journalistes de Gesca qui sont invités à Radio-Canada aux affaires publiques 98% du temps. Alors il faut remplacer le bon sens par la contribution du bon cens.