Prise 2

l'annonce de la création d'un nouveau parti résolument indépendantiste ne devrait surprendre personne

Option nationale - Jean-Martin Aussant



Le Canada anglais (et de nombreux Québécois) a toujours cru que le projet québécois d'indépendance n'était pas légitime et que jamais il ne serait tenu de négocier le retrait du Québec de la fédération canadian. Il se contentait de terroriser le Québec - PET : "si le Canada est divisible, le Québec l'est aussi"; Conrad Black : thuriféraire de la partition; S. Dion: "plus ça fera mal, plus l'appui à la souveraineté baissera"... Qu'ils se retrouvent tous en enfer!
Mais le renvoi de la Cour suprême dit le contraire - le Canada doit négocier si la volonté des citoyens québécois s'exprime démocratiquement dans ce sens. Le refus de négocier prendra dès lors une autre figure: la Loi sur la clarté par laquelle Ottawa se donne le droit d'exiger une "majorité opportuniste" qui a fait la risée du monde (re: Raymond Barre). Le but: sécuriser le Canada anglais, toujours sûr de son droit..., et terroriser les intellectuels québécois par sa prétention à une morale supérieure (S. Dion) et à un arsenal juridico-politique invincible.
Donc, la perspective d'un OUI n'est pas de tout repos - "une période de 5 ans de turbulence", selon P. Marois. La peur de triompher excite certains à différer sine die la confrontation annoncée (Gérard Bouchard). Au fait, vous la voyez, Pauline, dans ce rôle, elle qui ne sait pas différencier son soulier droit de son soulier gauche, elle dont le jugement politique est quelques fois très "incertain"?... - Vigile

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Les mêmes causes produisant généralement les mêmes effets, l'annonce de la création d'un nouveau parti résolument indépendantiste ne devrait surprendre personne.
Il y a de notables différences entre le «beau risque» qu'avait jadis voulu prendre René Lévesque et la «gouvernance souverainiste» de Pauline Marois. L'actuelle chef du PQ n'a jamais parlé de la souveraineté à l'imparfait. Peu importe, aux yeux de nombreux souverainistes, en parler au conditionnel est tout aussi condamnable. Seul le futur simple est acceptable.
En 1985, les «orthodoxes» du PQ, rebaptisés «purs et durs» depuis, qui avaient claqué la porte dans la foulée des Parizeau, Laurin, Léonard, Lazure et compagnie, avaient décidé eux aussi de fonder un nouveau parti. Comme Jean-Martin Aussant, ils ne pouvaient pas se satisfaire d'un peut-être.
D'entrée de jeu, Jacques Parizeau avait refusé d'assumer la direction du Parti indépendantiste (PI), préférant se garder en réserve. Aucun des autres ministres démissionnaires n'avait voulu du poste, qui avait finalement échu par défaut au politologue Denis Monière.
Aux élections générales de décembre 1985, le PI avait présenté seulement 39 candidats et recueilli 0,45 % des voix. Quatre ans plus tard, après que M. Monière eut été remplacé par Gilles Rhéaume, la proportion est tombée à 0,14 %. Le PI a été officiellement dissous en juin 1990, avant de renaître en février 2008. Aux dernières élections, il a présenté 19 candidats et obtenu 0,13 % des voix.
Il y a tout de même une différence entre le PI de 1985 et la future Option nationale de M. Aussant. Aux élections de 1989, M. Parizeau avait déjà succédé à Pierre Marc Johnson et remis le cap sur la souveraineté, ce qui rendait le PI quelque peu obsolète, tandis que Mme Marois ne donne aucun signe indiquant qu'elle aurait l'intention de changer sa stratégie.
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La chef péquiste déclarait en fin de semaine que la perspective d'un nouveau parti souverainiste ne l'inquiétait pas du tout. Hier, elle n'avait manifestement pas envie de s'étendre sur le sujet. Au moment où le rapport Duchesneau permet enfin de braquer de nouveau les projecteurs sur le gouvernement, cette diversion est certainement malvenue. Elle n'en constitue pas moins une autre épine à son pied.
En dehors de sa circonscription de Nicolet-Yamaska, M. Aussant n'a pas une notoriété suffisante pour provoquer un mouvement d'opinion significatif, et les autres démissionnaires de juin ne semblent pas avoir l'intention de lui emboîter le pas. En revanche, la création d'un nouveau parti va encore renforcer l'impression d'un désordre permanent — et rebutant — au sein du mouvement souverainiste.
Le dernier sondage de Léger Marketing, dont Le Devoirpublie aujourd'hui les résultats, ne permet pas de mesurer les effets du rapport Duchesneau. Il serait cependant très étonnant que les électeurs qui tourneront le dos aux libéraux se rabattent sur le PQ. C'est vraisemblablement François Legault qui en héritera.
Son futur parti est déjà crédité de 34 % des intentions de vote, 9 points devant le PLQ (25 %) et 17 devant le PQ (17 %). Les voix que grappillera M. Aussant ne peuvent que contribuer à marginaliser un peu plus le PQ.
Au cours de la prochaine campagne électorale, sa présence aura surtout pour effet de placer Mme Marois entre deux feux. Pour limiter l'hémorragie, elle devra tenter de convaincre les souverainistes qu'elle partage leur objectif, ce qui risque d'effaroucher tous ceux qui ne veulent même plus en entendre parler.
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Depuis l'adoption de la Loi sur la clarté, qui permet à Ottawa de fixer les règles du jeu à sa convenance, plusieurs souverainistes estiment que la voie référendaire est piégée.
Le congrès péquiste de 2005 avait donné lieu à un débat sur la stratégie dite des «gestes de rupture», proposée à l'époque par le directeur de l'Action nationale, Robert Laplante, mais personne au sein du PQ ne remet sérieusement en question le passage obligé par un référendum, qu'il porte sur la souveraineté elle-même ou sur un projet de constitution d'un État indépendant.
Ceux qui s'opposent à la «gouvernance souverainiste» reprochent surtout à Mme Marois de ne pas être suffisamment pressée d'en tenir un. Plusieurs se satisferaient volontiers du fait qu'elle accepte le principe du référendum d'initiative populaire.
Jean-Martin Aussant, lui, propose carrément le retour au principe de l'élection référendaire, qui a disparu du programme péquiste en 1974, sauf pendant une brève période après le congrès de décembre 1981. Il interpréterait donc l'élection d'une majorité de députés à l'Assemblée nationale comme un mandat légitime de collecter tous les impôts, faire adopter toutes les lois et signer tous les traités internationaux, peu importe ce qu'en dit la Constitution canadienne.
Créer un nouveau parti constitue une tâche herculéenne, reconnaît M. Aussant. Malgré l'appui des membres de son exécutif de comté, il ne se fait sûrement aucune illusion sur ses chances de réélection.
Contrairement à d'autres, il ne voit cependant aucun intérêt à demeurer en politique si c'est pour faire autre chose que la promotion de la souveraineté, encore et toujours. On pourra toujours l'accuser de diviser le vote souverainiste, mais on peut difficilement le taxer d'opportunisme.


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