La lettre ouverte de Marc Ouellet

Mea culpa grinçant

Tribune libre - 2007


Aujourd'hui, l'archevêque de Québec et primat du Canada, Marc Ouellet, y
est allé d'une publication digne d'une boîte de positionnement stratégique
malhabile en publiant sa lettre ouverte titrée: «Pardon pour tout ce
mal!».
Évoquant son intervention à la commission Bouchard-Taylor qui a suscité
diverses réactions, M. Ouellet remercie ceux qui lui ont envoyé des
messages d'appui et il rend hommage aussi à ceux qui l'ont critiqué et à
ceux qui l'ont porté à réfléchir, dit-il, ce qui a motivé sa lettre ouverte
qui voudrait «prolonger la réflexion, dissiper les incompréhensions et
inviter à une écoute réciproque dans un esprit de paix et de
réconciliation.»
Il départage les réactions à ses déclarations devant la commission
Bouchard-Taylor comme étant de deux ordres: les «enfin il était temps!» et
les «quel retour en arrière?» Il tente de nous convaincre qu'il ne veut
pas ramener le Québec aux années de Duplessis et il semble démontrer une
certaine compréhension résignée du fait que «du point de vue sociologique
et culturel, le pluralisme et la laïcité sont installés à demeure au
Québec», allant jusqu'à se réclamer comme étant fier des accomplissements
de cette société laïque dans ses réalisations en économie, santé, culture,
services-sociaux, éducation, politique, etc.
Abordant le fait que le Québec jouit d'un niveau de vie enviable, animé
par une culture de la liberté et de la tolérance dotée d'une d'une «belle
ouverture» à l'immigration, ayant en outre du talent à revendre sur le plan
artistique et culturel, l'archevêque enchaîne en se désolant d'une certaine
quête de spiritualité qui languit et en se demandant si on pourrait imputer
cela à l'autorité excessive de l'église ou le manque d'accès à de la
formation si nécessaire à ces âmes supposées languissantes. Pour M.
Ouellet, ce vide spirituel, «c'est le fruit de l'esprit du monde», qui, en
éliminant Dieu, nous propose d'être nous-même le Dieu de notre vie.
Tout s'explique et se tient selon cet homme d'église: «la frilosité devant
la procréation, devant la vie, compromet l'avenir du Québec et sa jeunesse
cherche des modèles qui semblent lui manquer cruellement.» M. Ouellet nous
convie à «un dialogue sérieux sur les valeurs et sur notre témoignage de
chrétien pour redonner espérance et foi à l'âme québécoise.»
En regard de l'héritage religieux du Québec, M. Ouellet nous dévoile que
son église ne manque pas de figures exemplaires, sans toutefois pouvoir les
nommer et il se contente plutôt de rappeler que le pape Jean-Paul II a
canonisé ou béatifié quatorze de celles-ci, en précisant toutefois que
c'est un malheur qu'elles soient trop peu connues.
On entre dans le vif du sujet quand M. Ouellet nou dit qu'on accorde
beaucoup trop d'attention au passif de l'église par rapport à sa
contribution active à l'histoire et à la culture du Québec. Il réclame un
regard plus juste et clairvoyant sur notre passé chrétien afin de nourrir
la fierté et la confiance des québécois face à leur avenir.
S'inspirant d'un geste de Jean-Paul II dont il a été témoin à Rome en
2000, il invite les catholiques à un acte de repentance et de
réconciliation et il reconnaît que le peuple québécois traîne une mémoire
religieuse blessée. Cependant, M. Ouellet démontre sa méconnaissance face
à l'univers philosophique ou religieux situé à l'extérieur de l'église
catholique quand il nous dit que cette mémoire blessée des québécoises et
des québécois bloque l'accès aux sources vives de son âme et de son
identité religieuse.
N'ayant rien d'humble quant à moi, sa demande de pardon pour tout le mal
causé par les religieuses et les religieux de son église ne me semble pas
animée d'un sens très profond de contrition, elle est trop générale, en
bref, sans substance.
Je connais personnellement un orphelin de Duplessis qui est maintenant âgé
de 61 ans. Quand l'église de M. Ouellet le dédommagera et quand cette même
église s'excusera auprès de lui et de ses semblables devant tous les
québécois et le monde, là on pourra peut-être parler d'un acte de
repentance et de réconciliation.
Pour revenir et conclure sur la communication de M. Ouellet d'aujourd'hui,
elle est une plaidoirie pour le retour à l'enseignement religieux dans les
écoles, précédée par une demande de pardon qui démontre un manque de
sincérité patent.
Dans un autre genre de mea culpa, M. Stockwell Day, ministre de la
Sécurité publique du Canada, a offert ses excuses pour la mort de Robert
Dziekanski suite à l'intervention incompétente de quatre agents de la
sécurité frontalière à l'aéroport de Vancouver le mois dernier.
Évidemment, il n'avait pas le choix en raison de l'appareil vidéo qui a
capté cet événement et dont la bande vidéo fut diffusée à la grandeur de la
planète. M. Day dit attendre dès cette semaine un rapport de l'agence des
Services frontaliers du Canada.
On peut retrouver cette brève excuse de M. Day à la page 34 du Journal de
Montréal d'aujourd'hui.
Maintenant, dans un autre registre, le Parti Indépendantiste n'a pas à
faire d'excuses pour son programme élecoral d'accession à l'indépendance du
Québec. Certains apôtres péquisto-souverainistes avancent que ce processus
serait illégitime dans l'hypothèse où le Parti Indépendantiste prendrait le
pouvoir avec une majorité de sièges sans une majorité d'électeurs.
Quant à moi, ce genre d'hypothèse de cette école de pensée attentiste
s'apparente à spéculer sur le sexe des anges et je crois que l'avenir nous
réserve bien des imprévus.
Je vais quand même, moi aussi, m'adonner à un petit jeu: avançons comme
contre-hypothèse que le Parti Indépendantiste prendrait le pouvoir avec
moins de 50% + 1 des voix, mais avec une majorité des sièges. Qu'est-ce
qui empêcherait certains députés de d'autres formations telles que l'ADQ le
PQ ou Qs - ceux-ci issus de comtés majoritairement souverainistes - de se
joindre au Parti Indépendantiste pour la proclamation d'indépendance et la
rédaction subséquente d'une constitution?
D'autre part, je vous inviterais à regarder ce qui se passe actuellement
au Kosovo pour vous faire comprendre qu'il y a différents moyens pour un
peuple de se regrouper politiquement en vue d'acquérir son indépendance.
Une petite note en passant: en 1995, le oui l'a remporté à 60% chez les
canadiens d'origine et on a perdu le référendum par la tricherie et les
menaces de l'adversaire qui pouvait tabler sur l'entière collaboration de
certaines communautés culturelles.
Face à cette réalité post-référendaire de 1995 dont le PQ semble incapable
de se dépêtrer, notre stratégie de mobilisation consiste à mettre entre les
mains des québécoises et des québécois un levier décisif pour l'avènement
de l'indépendance de notre patrie.
Sur ce, vive le Québec libre!
Daniel Sénéchal

Montréal
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