Redresser l'État du Québec

Le courage ne suffit pas, il faut aussi de la force

Seul un État du Québec fort peut espérer renverser la vapeur et remporter cette longue bataille vers la souveraineté.

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Au delà de notre prospérité, c'est notre survie qui est en jeu

Par la publication de ce texte, j’en profite pour remercier notre ami Richard Le Hir pour ses nombreuses années de loyaux et immenses services à l’administration de Vigile.


Richard représente pour plusieurs la rigueur, la culture et une plume « mordante » d’une grande efficacité. Ayant un instinct bien aiguisé, il a la capacité de voir quelques coups en avance ce que de nombreuses personnes ne voient que quelques années plus tard.


Richard n'a jamais eu peur de jouer durement et de payer le prix pour ce qui lui tient à coeur. Il est un homme qui garde toujours la tête haute. Il s'assume et cela est une chose admirable. Je ne peux que m'incliner de respect face à cette attitude trop rare de nos jours. Il s'assume et garde la tête haute exactement comme nous devrions nous comporter comme nation française en Amérique.


Au-delà des rôles et des fonctions que Richard assurait au quotidien de Vigile.Québec, il est avant tout un être de qualité et un ami que nous, administrateurs du conseil d'administration, continuerons à cotoyer dans nos loisirs et dans notre combat pour l'indépendance du Québec.


Richard, bon succès avec LaNation.Québec !


...


Notre histoire française en Amérique en est une exceptionnelle. Elle démontre un trait caractéristique de notre société : nous sommes un peuple courageux. Il y a nombre des nôtres qui incarnent ce courage. Commençons par les fondateurs : Champlain, Bourgeois et Mance. Il y a les résistants : Du Calvet, Des Ormeaux et Riel. Il y a nos aventuriers : La Vérendrye, D’Iberville et Fortin-Tremblay. Nos républicains : Papineau, Chénier et De Lorimier. Nos conservateurs : Laflèche, Labelle et Groulx. Il y a nos grandes gueules : Chartrand et Falardeau. Nos guerriers : Major, Richard et St-Pierre. Il y a nos grands démocrates et diplomates : Gérin-Lajoie, Lévesque et Duceppe. Il y a aussi nos grands politiciens : Duplessis et Johnson.


Quoique fort différent de ceux de nos pionniers, ce courage est toujours parmi nous les Québécois. Celui que j’estime le plus est le courage démontré par les militants politiques qui défendent les intérêts de notre Amérique française.


Presque tous au coeur du mouvement souverainiste, ces militants politiques ─ ce présent texte s’adresse à eux ─ ont le courage de prendre parole et agir à tous les jours pour les meilleurs intérêts du Québec. Mais, à la différence de leurs prédécesseurs, je pense à Groulx, Duplessis ou Falardeau, nos meneurs du mouvement souverainiste ont-ils le courage de nommer le réel, de parler vrai ? Ont-ils le courage de dire que les indépendantistes s’enfoncent dans l’insignifiance avec ce fantasme d’un référendum gagnant qui creuse la tombe de notre nation ? Ont-ils le courage de dire que la nation française en Amérique se meurt et de faire ce qu’il se doit pour lui assurer son avenir ?



La fausse route des 50 dernières années


Ne manquant pas de courage à dire ce qu’il pense, notre ami Richard Le Hir affirmait récemment dans l’article Indépendance: Cinquante ans de perdus ! qu’« On fait fausse route depuis cinquante ans. » Le Hir a raison, depuis 50 ans le mouvement souverainiste n’a pas fait les choses de la bonne façon.


Depuis la mort du projet Égalité ou indépendance de Daniel Johnson en 1968, le mouvement souverainiste s’est développé essentiellement autour du Parti Québécois. Suite à la perte du pouvoir en 2003 et difficilement en mesure de le reprendre par la suite, le mouvement souverainiste sombre profondément dans la narration de nos adversaires ainsi que la vision du multiculturalisme canadien.


Le récit collectif est au coeur de la vie politique. Il y a d’ailleurs une règle fondamentale en politique qui affirme qu’il ne faut pas être dans la narration de l’autre. Quand un mouvement politique n’est qu’en réaction à la représentation de la réalité de l’adversaire, c’est qu’il est incapable d’imposer sa propre représentation de la réalité.


Le mouvement souverainiste actuel est tout simplement devenu un acteur secondaire dans l’arène politique tout autant canadienne que québécoise.


N’en déplaise à bien des souverainistes qui se dévouent corps et âme depuis le tournant des années 70, je les invite à replonger à l’époque de l’Union nationale pour qu’ils réalisent à quel point Maurice Duplessis et Daniel Johnson menaient le jeu contre Ottawa, qu’ils étaient en mesure d’imposer leur doctrine politique, leur actions, leur langage et leur agenda.


Depuis ce temps, malgré quelques périodes frénétiques de la part du Parti Québécois de René Lévesque et de Jacques Parizeau, pourtant de bons hommes d’État, il faut admettre que ce sont les fédéralistes qui mènent la danse.


Certains diront qu’ils nous piétinent avec plaisir.



Avoir le courage d’admettre qu’il s’est effondré


Soyons honnête. Le mouvement souverainiste s’est effondré. Évidemment il résiste tant bien que mal car le courage ne manque pas. Il y a de l’espoir car il y a encore de belles forces vives, des jeunes aussi. Ayons néanmoins le courage d’admettre que le mouvement souverainiste s’est effondré parce qu’il a construit sa stratégie sur le fantasme d’un référendum gagnant.


Ayons aussi le courage d’admettre que le mouvement souverainiste sombre dans une idéalisation de la politique qui lui empêche de voir le réel. Combien de fois avons-nous entendu des politiciens appeler les militants souverainistes à la pédagogie et à redoubler d’efforts afin d’initier la mise en route d’un mouvement de masse réclamant la souveraineté du Québec, alors que cette route n’est mise en oeuvre concrètement qu’à partir des outils de l’État ?


Pour soulever une grande masse, ne faut-il pas des leviers ?


Il n’y a que l’État qui les possède.


C’est aux meneurs souverainistes à l’Assemblée nationale ─ et ceux à la Chambre des Communes ─ de prendre en charge la construction de cette route. Un peuple dans la rue avec des politiciens sans levier de l’État, sans rapport de force réel ou suffisant, sans effectivité, c’est à quoi ressemblait le scénario catalan.


Voulons-nous vraiment vivre ça ?


Après plus de quatre siècles de survie et de résistance, la nation française en Amérique a une expérience certaine qui va lui permettre, je crois bien, d’instinct, de s’orienter vers une autre voie menant à la souveraineté, plus réaliste, que celle proposée par un référendum.


Pour à la fois survivre et s’orienter vers une autre voie menant à la souveraineté, il faut prendre du recul pour réfléchir à une refondation du mouvement souverainiste. Comme le disait PKP en 2016, « l’État est la voie royale » pour mener à notre indépendance. C’est pourquoi les souverainistes auraient tout intérêt à rebâtir le mouvement sur les assises de l’État du Québec.


La souveraineté n’est-elle pas une affaire d’État avant toute chose ? Le Québec est un État fédéré qui doit se sortir de sa condition de soumission à l'État fédéral canadien. Il parviendra à en sortir lorsqu’il luttera de la bonne façon.


Alors que l’Union nationale de Duplessis luttait « corps-à-corps » pour l’autonomie du Québec en arrachant un à un les pouvoirs à Ottawa, le mouvement souverainiste s’engouffre depuis dans une idéalisation de la politique sous le visage souriant de grands souhaits et de grandes valeurs démocratiques qui n’a offert que des résultats désastreux jusqu’à maintenant.


Tout récemment, cette idéalisation de la politique a pris une nouvelle forme autre que le référendum : la constituante. Un désir d’une grande envergure ─ un rêve ─ qui risque de se terminer dans une discorde ─ un cauchemar ─ des plus totales.


Avons-nous pris conscience que le Canada affaiblit le Québec de jour en jour avec le multiculturalisme canadien, soutenu par une justice partiale et complice, une corruption systémique du Régime libéral et des médias fédéralistes qui nous culpabilisent aux moindres soubresauts de conscience nationale que nous démontrons ?


Le portrait est désastreux depuis longtemps. Le fait que de nombreuses nations aient disparu au cours de l’histoire me fait craindre le pire.



Comment se relever ?


En politique, il faut savoir rebondir. Elle exige de bâtir un rapport de force, sans quoi le Québec sombrera dans l'insignifiance.


Depuis sa fondation à l’époque de la Nouvelle-France, le Québec résiste malgré les changements politiques, les échecs, les négociations et les accords. Il a su rebondir à la suite de la Conquête (1759-1760), de l’Acte d’Union (1840), des Actes de l’Amérique du Nord Britannique (1867) et du rapatriement de la Constitution du Canada (1982).


Tous des changements de statuts qui visent l’assimilation de la nation française d’Amérique.


Qu’en est-il de la capacité du mouvement souverainiste à se relever ? Divisé, il se cherche, il est dans une impasse. C’est que le courage ne suffit pas, il faut de la force. Le mouvement souverainiste ne pourra se relever que s’il se recadre sur les mêmes fondements qui ont produit cette magistrale poussée des années Duplessis, Lesage et Johnson : une posture politique basée sur la nation française d’Amérique et l’Etat du Québec.



Trois concepts clés : alliances, nation et État


Alliances


L’État du Québec s’édifiera par ses meilleures capacités lorsque le mouvement souverainiste développera des alliances avec le plus grands nombres de composantes de la société.


Si les souverainistes sont malheureusement dans l’impossibilité aujourd’hui de développer de solides alliances avec les Premières nations, de même qu’avec la fonction publique, les regroupements civils et les entrepreneurs, c’est qu’il a évacué le caractère relationnel de la politique. C’est que d’une manière ou d’une autre, le mouvement souverainiste a délaissé les exigences de ce monde de forces et de relations qu’est la réalité pour se satisfaire du confort et de la stabilité des illusions. D’une façon surprenante, il cherche encore à comprendre pourquoi il s'entredéchire, qu’il peine à se regrouper en force et qu’il est dans une position de faiblesse chronique.


Le mouvement souverainiste demeure captif d'une mentalité de colonisé où la dépendance, l'approbation des autres et la peur de s’assumer font lois. Ces craintes rongent peu à peu l’autonomie proposée par les visions politiques de Groulx, Duplessis et Johnson. C'est cette volonté de puissance qu'il faut retrouver. Celle qui a façonné plusieurs générations passées qui savaient qu'elles n'avaient pas à demander la permission d’Ottawa pour construire le Québec moderne.


Au lieu d’affronter le réel, les souverainistes s’échappent dans le fantasme. C’est que le déni, la peur, le manque de confiance en soi, le désir de conformité et de consensualité caractérisent le mouvement souverainiste actuel, le rendant alors incapable de se percevoir autrement que par les yeux et les dires de ses adversaires.


En politique, certes les idées ont une importance, elles font le débat. Néanmoins, la politique est avant tout relationnelle. Un mouvement souverainiste ne bâtit pas son rapport de force avec des idées mais en additionnant les alliances qui se forment, en appréciant d’une façon juste sa relation avec ses propres troupes, avec ses adversaires, en évaluant ses capacités et ses moyens politiques, financiers, humains pour y parvenir.


Nation


La nation française en Amérique existe depuis plus de quatre siècles sur le territoire du Québec et bien au-delà ; elle est une des nations fondatrices de l’Amérique moderne, unique fondatrice de la Nouvelle-France devenue le Canada et ensuite Québec, de l’Acadie et de la Louisiane.


Tout cela est nié dans la présente constitution canadienne.


Afin de contrer cette négation de ce que nous sommes par le Régime canadien, il faut faire reconnaître notre nation tout autant que notre État. C’est indissociable. Pour y parvenir, il faut d’emblée rejeter le multiculturalisme canadien et cette tendance perverse à réécrire notre histoire nationale par les fantasmagories des mondialistes déracinés.


Lorsque le mouvement souverainiste aura montré ses dents, celles d’un réel rapport de force, il faudra davantage qu’une déclaration du bout des lèvres ou dans une motion bidon présentée par le Premier ministre du Canada Stephen Harper (Novembre 2006) à la Chambre des Communes, qui reconnaît que « les Québécois forment une nation au sein d'un Canada uni ».


En droit international, la reconnaissance se résume à une acceptation d’un ou plusieurs États d’un fait par une déclaration officielle. C’est pourquoi il faut mener à toute force le Canada à reconnaître par écrit la Loi 99 : Loi sur l’exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l’État du Québec.


Depuis l’infâme Pierre E. Trudeau, la nation française en Amérique n’est plus dans le langage politique canadien qu’une communauté ethnique avec un lourd passif d’envahisseur. Il faut démasquer cette imposture avec force d’abord en réhabilitant la grandeur de la valeur morale de nos relations avec les autres nations en Amérique, particulièrement en redonnant un sens véritable et noble à notre rapport historique et fraternel avec nos compagnons des Premières nations. Il faut retrouver la vitalité et la fierté que nous avons jadis démontré en racontant et en honorant les exploits que nos anciens ont accompli en ces terres hostiles du nord, tout en dénonçant les crimes que le Régime canadien a machiné contre la nation française en Amérique et les Premières nations.


Bref, cela n’adviendra que lorsque nous valoriserons qui nous étions et sommes : une nation de racines françaises, latines et catholiques.


État


L’État du Québec actuel est la somme de plus de 400 ans d’efforts et de sacrifices qui fait de lui une des structures organisationnelles les plus modernes au monde.


Au Québec, notre grand penseur des principes de l’État est Gérard Bergeron. Je vous recommande d’ailleurs de lire ces ouvrages. Éminent politologue québécois, il disait que l’État est « le plus gigantesque instrument du contrôle social qui ait jamais existé. » Il disait aussi qu’il [État] forme aussi la grande unité totalisante de tout le politique. »


Dites-moi pourquoi le mouvement souverainiste actuel n’a-t-il pas l’État du Québec au coeur de sa doctrine politique alors qu’il devrait être le tableau de bord et les commandes du véhicule souverainiste ?


On abandonne pas un État comme l’a fait le mouvement souverainiste depuis trop longtemps sans en subir de lourdes conséquences. Abandonner l’État pour s’affoler à élaborer une stratégie irréaliste, à convaincre et discourir, constitue une grave erreur. Une erreur presque fatale lorsque nous constatons l’état actuel de nos troupes. Malgré le caractère essentiel que constitue l’indépendance du Québec, il n’en reste pas moins que le véritable enjeu de la politique est le contrôle de l’État.


Prendre le contrôle de l’État est nécessaire à la suite des choses.


Un État a quatre fonctions fondamentales à sa charge. Il doit gouverner, administrer, légiférer et appliquer les lois. Si nos meneurs souverainistes alors au pouvoir ne prennent pas en charge vigoureusement ses quatre fonctions à l’intérieur de l’État du Québec, je ne vois pas comment nous parviendront à se bâtir un rapport de force suffisant pour vaincre Ottawa.


Prendre en charge vigoureusement l’État du Québec suppose que le mouvement souverainiste doit accéder au pouvoir le plus tôt possible et le garder le plus longtemps possible afin de placer un maximum de ses « militants » dans tous les secteurs de l’État ─ gouverne, administration et justice ─ jusqu’à chasser les corrompus, les mettre à la retraite, voire les traduire en justice.


De plus, en collaboration avec nos alliés, le mouvement devra recouvrir l’ensemble de l’État du Québec afin de rendre effective la doctrine souverainiste ─ et en multiplier la force ─ à la grandeur du territoire.


Si les meneurs souverainistes n’ont pas le courage de prendre le contrôle de l’État pour en faire une forteresse de combat pour non seulement la souveraineté du Québec, mais aussi pour protéger la culture et l’identité de la nation française d'Amérique, je ne vois pas comment ils peuvent prétendre avoir le courage de faire l’indépendance du Québec.


À vrai dire, c’est que nos meneurs n'auront tout simplement pas « le coffre pour le job.» [1]


À perdre notre souveraineté, à affaiblir notre démocratie, nos adversaires fédéralistes s’appliquent à nuire à nos capacités démocratiques en pillant les fonds publics pour les amis du Régime, à briser le « vivre ensemble » par le multiculturalisme favorisant le communautarisme au détriment de la nation française en Amérique.


Quand le « vivre ensemble » s’effrite, il devient alors difficile de « vendre » aux Québécois un projet indépendantiste.


Sans une doctrine d’État au sein du mouvement souverainiste, comment pourrons-nous survivre au multiculturalisme canadien ? Comment pourrons-nous avoir la force, la capacité et les habiletés à conserver le pouvoir assez longtemps pour orchestrer la souveraineté du Québec ? À vrai dire, la nation française en Amérique ne peut rien sans un État du Québec fort.


Ayons alors le courage de redresser notre État pour à nouveau le dresser avec force contre le Régime canadien.


Ayons aussi le courage de renforcer notre Charte de langue française jusqu’en faire une véritable langue d’État.


Ayons aussi le courage de baisser d’une façon significative le seuil d’immigration et d’exiger la francisation intégrale de celle-ci.


Ayons aussi le courage de renforcer notre démocratie en combattant la corruption du Régime libéral. Car, comme il n'y a pas de souveraineté sans démocratie, un Québec fort d’une démocratie en pleine santé est avant tout un moteur propulsant vers la souveraineté.


Plusieurs réclament du Canada notre droit à l’autodétermination, ce cher principe ─ pour ne pas dire ce cher mantra ─ porteur d’espoir dans le coeur des rêveurs. Soyons réaliste, une marche vers une accession à l’indépendance sans rapport de force ni effectivité, c’est un peu cela que nos meneurs souverainistes nous ont proposé depuis près 50 ans. Ils n’ont pas compris qu’en géopolitique les faits ont le dessus sur les lois, que la force du mouvement souverainiste doit essentiellement se concrétiser en nombreux gains pour l’État du Québec, à savoir une augmentation ─ en nombre et en qualité ─ de notre habilité à agir en acte avec des moyens coercitifs sur notre territoire.


Bref, il faut accroître notre souveraineté.


Seul un État du Québec fort peut espérer renverser la vapeur et remporter cette longue bataille vers la souveraineté.


Certains disent encore : « On s’est fait voler le référendum de 1995. » Quoique la grande majorité des souverainistes a été illusionnée par une accession à la souveraineté par la voie référendaire, personne n’ose dire aujourd’hui que les référendums de 1980 et 1995, même gagnants, n’auraient toutefois pas mené à l’indépendance du Québec.


Des déclarations de Jean Chrétien confirment qu’en aucun temps Ottawa aurait reconnu la souveraineté du Québec. [2] [3]


De toute évidence, la quémande ne fonctionne pas. Elle a eu par surcroît des répercussions majeures sur la souveraineté ─ encore partielle ─ de notre État et sur notre nation française en Amérique.


Car, au delà de notre droit à l’autodétermination, tout dépendait de notre rapport de force et de notre effectivité, c’est-à-dire de notre force et de nos faits.


À voir où nous en sommes en 2018, affaiblis comme jamais, il faut croire que nous devons refaire nos devoir et surtout revoir notre doctrine politique.


Au plus sacrant ! Car la réalité est que la nation française en Amérique que nous sommes se meurt.


Comme le disait Lionel Groulx dans son ouvrage Directives (1937) :


« Nous appartenons à ce petit groupe de peuples sur la terre - Combien sont-ils ? Quatre ou cinq ? - au destin d'une espèce particulière : l'espèce tragique. Pour eux, l'anxiété n'est pas de savoir si demain ils seront prospères ou malheureux, grands ou petits; mais s'ils seront ou ne seront pas ; s'ils se lèveront pour saluer le jour ou rentrer dans le néant. »


Vigile vous propose de refuser la tentation du néant.


En tant qu'héritiers de cette formidable aventure qu'est celle de l'Amérique française, il est de notre devoir de tout faire en oeuvre pour que nous puissions saluer le jour pendant encore une génération !


Une tâche immense nous attend.



Christian B. Rivard








Références




  1. ^ Antonio Flamand, https://vigile.quebec/articles/hommage-a-daniel-johnson

  2. ^ The Shawinigan Fox: How Jean Chrétien Defied the Elites and Reshaped, Plamondon, Bob, Great River, 2017

  3. ^ Iron Man: The Defiant Reign of Jean Chrétien, Martin, Lawrence, Viking Canada, 2003




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14 commentaires

  • Éric F. Bouchard Répondre

    17 février 2018

    Il faut, je crois, arrêter les frais. J’ai suffisamment exprimé mon point. À vous qui déplorez le déclin du mouvement souverainiste dans un Québec toujours plus dénationalisé, j’ai tenté de faire comprendre que c’était là un résultat direct de la québécitude.


    Pour les Canadiens-Français, la québécitude n’est pas un aboutissement heureux de leur lutte séculaire pour l’émancipation, c’est un reniement identitaire, un recul inégalé, une défaite vraisemblablement définitive.


    Car la québécitude est bel et bien un aboutissement, celui du processus d’aliénation coloniale mis en place à partir de 1763 par les conquérants. L’aliénation coloniale n’a toujours qu’un seul but : assurer la mainmise du colonisateur (et de ses descendants) par l’infériorisation du colonisé, notamment en s’attaquant à son sentiment national. Dans le cas du Canada français, comme les Britanniques furent inférieurs en nombre jusqu’au milieu du 19e siècle, l’aliénation a évolué selon une gradation bien particulière.


    Tout d’abord, on nous fit croire (à nous les Canadiens-Français) que nous avions besoin des Britanniques (contre les Américains notamment); ensuite, qu’il nous fallait nécessairement collaborer avec des Canadiens-Anglais devenus majoritaires; et pour finir, au 20e siècle; les plus aliénés d’entre nous (ou les plus ambitieux : appliquez La petite loterie de Stéphane Kelly aux années 1960) finirent par se convaincre que pour exister politiquement, il nous fallait former une seule et même nation avec eux. Certains, comme Pierre-Eliott Trudeau optèrent ainsi pour la nation canadienne unique, d’autres, comme René Levesque, préconisèrent l’invention du peuple québécois qui nous unissait aux Anglo-Québécois.


    En effet, le peuple québécois, tel que défini par la Loi 99, «possède des caractéristiques propres et témoigne d’une continuité historique enracinée dans son territoire», il est «majoritairement de langue française» mais comprend «une communauté québécoise d’expression anglaise jouissant de droits consacrés» et on y «reconnaît l’apport des Québécoises et des Québécois de toute origine à son développement» tout comme on y reconnaît «l’existence au sein du Québec des nations abénaquise, algonquine, attikamek, crie, huronne, innue, malécite, micmaque, mohawk, naskapi et inuit».


    Rien dans cette loi, aucune référence à la Nouvelle-France ou à la nation canadienne-française et à ses droits. Seuls les droits historiques du peuple québécois sont évoqués sans qu’on sache à quoi on fait alors référence.


    Si vous ne saisissez pas que renforcer l’État qui représente un tel peuple (encore pour un temps majoritairement francophone), c’est renforcer un État de jure et de facto bilingue et pluraliste, je n’y peux rien. Et si cela vous satisfait, c’est que je me suis trompé.


  • Éric F. Bouchard Répondre

    12 février 2018

    Merci pour cet échange enrichissant.


    Nous sommes d’accord, en 1960, les Canadiens-Français forment une nation d’essence culturelle ou civilisationnelle : ils partagent une langue, des institutions, une mémoire et une volonté forte de se projeter dans l’avenir. Et au fil des siècles des milliers d’étrangers s’y sont assimilés.


    Leur patrie, et bien qu’ayant essaimé à travers tout le continent, correspondait en gros à la Province de Québec. Daniel Johnson entendait ainsi faire de cette dernière leur État national afin que la nation canadienne-française puisse jouir d’une incarnation politique pleine et entière, à l’égal des Canadians. Les États généraux du Canada français appuyèrent avec force cette visée.


    Malheureusement, les fédéralistes et les néo-nationalistes jugeant de même la nationalité canadienne-française inapte au progrès (trop conservatrice et trop homogène), s’opposaient à cette visée. Les premiers voudront renforcer le régime fédéral, et les néo-nationalistes faire naître une identité territoriale, une citoyenneté inclusive et progressiste : la québécitude.


    C’est là qu’intervient Léonce Naud et sa réduction territoriale de la nation. On se devait de déprécier (il ne fut pas le seul) la nationalité canadienne-française pour imposer dans l’esprit de tous la nécessité de la québécitude. Pourtant l’argumentaire de Naud est faible : est-ce que l’absence d’un État basque ou d’un État kurde, entraîne la non existence de territoires basques ou kurdes, la déconsidération des Basques ou des Kurdes? Bien non. L’État national est une structure politique découlant d’une occupation réelle et d’un contrôle effectif d’un territoire par une nation donnée. Les Kurdes, le plus courageusement du monde, le prouvent chaque jour. Et les Canadiens-Français comprenaient très bien le principe eux qui rêvèrent un temps d'une revanche des berceaux.


    Les néo-nationalistes des années 1960 (et le PLQ et le PQ qui ont pris leur suite) ont néanmoins si bien œuvré que les Canadiens-Français ont fini par intérioriser cette fausseté qui voulait que leur nation historique ne méritait pas d’État, qu’elle n’avait droit à l’existence politique qu’en devenant québécoise, qu’en se «provincialisant» avec tous les autres habitants du Québec quelle que soit leur culture ou leur nationalité. On laissait ainsi échapper une occasion unique (De Gaulle venait de nous appuyer : «Vive le Québec libre! Vive le Canada français!») d’avoir un État qui serve exclusivement nos intérêts nationaux, au profit d’un Québec qui nous serait profitable simplement parce que nous y étions alors largement majoritaires. C’est cette conviction malheureuse que vous partagez toujours je crois et que vous tentez de me faire saisir.


    C’est précisément là le cœur de mon propos. Tant qu’on ne remettra pas en cause cette conviction fausse selon laquelle le Québec est d’emblée favorable à nos intérêts nationaux, on ne sera pas en mesure de comprendre les causes profondes du déclin politique du mouvement souverainiste, pas plus que d’y remédier.


    Le Québec ne nous est pas favorable en soit. C’est une entité coloniale née de la Conquête et formatée pour nous circonscrire de manière à ce que le conquérant puisse y vivre avec le moins d’inconvénient possible. Nous le partageons avec l’Autre, de la même manière que nous partagions l’ensemble du Canada avec l’Autre. À notre minorisation au Canada, succède notre minorisation rapide au Québec, cette dernière orchestrée par l’État québécois au nom d’une plus grande prospérité du peuple québécois.


    En cinquante ans de québécitude, les Canadiens-Français du Québec sont ainsi passé du statut de nation en passe d’accéder à une pleine reconnaissance politique, à celui d’une majorité déclinante négligée par tous les partis et par tous les médias, une majorité désormais incapable même de se nommer sans équivoque : le comble de l’inexistence politique.


    Par quel moyen dites-moi pourrions-nous exister puis combattre à nouveau sans en appeler à une renaissance du nationalisme canadien-français?


    Éric Bouchard


  • Gilles Verrier Répondre

    11 février 2018

    Avec Léonce Naud, Christian Rivard oppose territorialité et continentalité. Or il n'y a pas d'opposotion entre les deux car l'une et l'autre nous appartiennent et font partie de notre singularité des Français d'Amérique; les deux mamelles d'une identité enracinée depuis les premiers jours de la Nouvelle-France. Plusieurs - une nouveauté ! - commencent à se réclamer de Lionel Groulx comme du penseur de la « doctrine de l'État québécois ». Voudraient-ils que l'on oublie - et occulte - que Groulx n'a jamais voulu choisir entre la territorialité et la continentalité ? Fin connaisseur de notre histoire, Groulx en était une sorte d'incarnation. Pour lui, depuis toujours, nous étions à la fois les produits de la territorialité et de la continentalité. Et c'est quand nous saurons être inclusifs envers nous-mêmes, quand nous rechercherons la cohésion d'une nation spirituelle entre les laboureurs des rives du Saint-Laurent ( territorialité ) et les découvreurs qui s'établirent aus confins du continent  ( continentalité ) - grâce à des liens vitaux tissés avec les Premières nations - une singularité sans équivalent - que nous serons vraiment rayonnants et pourrons poser notre pierre, raconter à notre mesure de démesure notre histoire au monde. 


  • Éric F. Bouchard Répondre

    10 février 2018

    Aucune autre réponse? Il me semblait pourtant que mon propos vous donnait l’occasion d’étoffer et de préciser le vôtre. On ne peut simplement en appeler à un Québec fort alors que nous sommes dans l’impossibilité d’en influer la politique, alors que tout observateur est à même de constater que cet État sert un pluralisme qui s'étend sans cesse.


    C’est d’ailleurs dans cette optique qu’on devrait traiter du référendum. Je suis d’accord avec vous, c’est là un agent fondamental de l’atomisation du mouvement souverainiste. Mais ce recours au référendum n’était pas  une erreur, c’était, pour les tenants du Québec pluraliste, une condition sine qua none à l’avènement de la québécitude.


    Reportons-nous aux années 1960 alors que tout le monde reconnaissait dans le mouvement souverainiste une volonté d’émancipation des Canadiens-Français. Les nationalistes, Daniel Johnson en tête, cherchaient à faire du Québec l’État national des Canadien-Français. Or, cela déplaît aux néo-nationalistes qui veulent transcender notre nationalité séculaire en citoyenneté québécoise qui inclurait les Néo-Québécois (non intégrés à la majorité canadienne-française) et les Canadiens anglais du Québec, et ce, avec leurs spécificités culturelles. C’est ainsi qu’on saborda les États généraux du Canada français qui réclamaient un État national pour fonder le Parti Québécois au nom d’une québécitude plus ouverte.


    Mais cela ne suffisait pas, car même si on imposa alors les expressions «nation» ou «peuple québécois» en lieu et place de la nation canadienne-française, il fallait encore donner une existence réel, une légitimité politique, au Québec pluraliste. Le danger était trop grand que le «Québécois» nouveau équivaille tout naturellement au «Canadien-Français» d’hier. Il fallut pour cela user du référendum.


    Tant qu’on cherchait à faire naître un État national, seuls les Canadiens-Français étaient concernés. Mais du moment qu’on chercha l’avènement d’un Québec souverain, tous les Québécois se devaient alors d'être consultés. Le référendum devenait ainsi l’outil le plus efficace pour imprégner dans l’esprit de tous une citoyenneté québécoise en lieu et place du sentiment national canadien-français. Et de fait, la pertinence ou les modalités des référendums ne cessèrent d’obséder les souverainistes depuis 1973 sans que personne ne remette en cause la légitimité du peuple québécois et le détournement identitaire (et politique aussi) qu’il représente. En effet, toute la charge subversive de la non reconnaissance nationale du Canada français par le Canada anglais disparaissait ainsi au profit de la promotion d’une simple appartenance administrative existante, en aucun cas menaçante pour les fédéralistes, puisqu’issue du cadre colonial canadien lui-même.


    Ce détournement identitaire et politique est pour moi la cause première de l’effacement du mouvement souverainiste. Nous nous sommes coupés du sentiment national qui commandait notre vouloir-vivre tout en torpillant l'argumentaire à la base de nos luttes politiques depuis 1763. Notre volonté d'émancipation n’a donc plus de sens aujourd'hui. Le conquis, le dominé, le minorisé, celui qui devait se libérer pour assurer l'avenir de sa nation, celui dont les droits avaient été tant de fois bafoués, celui qui résistait et qui réclamait justice, c’était le Canadien-Français. Ce n’était pas le Québécois né de la Conquête ou de la Confédération, pas ce Québécois satisfait de lui-même qui est la norme aujourd'hui.


    Certains ont-ils déjà réfléchi en ce sens?


    Éric Bouchard


    • Christian Rivard Répondre

      10 février 2018

      Vous dites : « On ne peut simplement en appeler à un Québec fort alors que nous sommes dans l’impossibilité d’en influer la politique, alors que tout observateur est à même de constater que cet État sert un pluralisme qui s'étend sans cesse.»


      Réduire le pluralisme serait déjà un acte d'un État du Québec fort.


      Vous dites :  « Les nationalistes, Daniel Johnson en tête, cherchaient à faire du Québec l’État national des Canadien-Français. Or, cela déplaît aux néo-nationalistes qui veulent transcender notre nationalité séculaire en citoyenneté québécoise qui inclurait les Néo-Québécois (non intégrés à la majorité canadienne-française) et les Canadiens anglais du Québec, et ce, avec leurs spécificités culturelles. »


      Johnson disait dans Égalité et indépendance et je suis d'accord avec lui : 



      « Il est à noter que l’élément fondamental de la nation n’est pas la race, mais bien la culture. Peu importe son nom, son origine ethnique, on est de l’une ou l’autre nation suivant que par son enracinement, sa formation, son choix, son style de vie, son mode de pensée et d’expression, on appartient, on s’identifie à l’une ou l’autre communauté culturelle. Je pense entre autres à tous les Néo-Canadiens qui ont joint, volontairement, par goût, par choix la culture canadienne-française et qui participent à son épanouissement et à son enrichissement. »  [p.22 et 23]



      À mon avis, le nationalisme québécois depuis longtemps est avant tout fondé sur la culture et non pas sur la nation civique comme bien des gens le croient. Aujourd'hui, est-ce que le Canadien-français hors du Québec possède encore en lui cette culture canadienne française ? J'estime que nous aurons réponse à cette réponse que lorsque le Québec deviendra indépendant. Celui qui qui quittera le Canada anglais pour venir vivre au Québec sera une part de cette réponse.  


      Vous dites : « Mais cela ne suffisait pas, car même si on imposa alors les expressions «nation» ou «peuple québécois» en lieu et place de la nation canadienne-française, il fallait encore donner une existence réel, une légitimité politique, au Québec pluraliste. Le danger était trop grand que le «Québécois» nouveau équivaille tout naturellement au «Canadien-Français» d’hier. Il fallut pour cela user du référendum. »


      Je suis plutôt de l'école de Léonce Naud qui stipule qu'il n'existe pas de territoire Canadien-français mais il existe un territoire Québécois : 



      La différence identitaire fondamentale entre le Canadien-français et le Québécois, c'est la référence mentale à un territoire bien défini dans l’Est de l’Amérique : il n’existe pas de territoire Canadien-français mais il existe un territoire Québécois. 



      Aussi longtemps qu'elle demeure canadienne-française, l'identité n'a pas de conscience territoriale : le Canadien-français ne se conçoit pas comme propriétaire d’un territoire délimité en Amérique. Il est censé se trouver chez lui partout et ne l'est finalement nulle part. Le Québécois affirme au contraire : cet espace en Amérique est ma terre et je suis ici chez moi. Personne n’utilise l’expression «territoire canadien-français», car une telle chose n’existe pas. Cependant, tout le monde est d’accord qu'il existe bel et bien un territoire québécois. 



      Or, la pérennité d'un État passe obligatoirement par la délimitation de son territoire, c'est-à-dire par la fixation et le respect de frontières qui témoignent de l'appropriation et de la maîtrise paisible d'un espace donné. 



      C'est l'emergence de l'État du Québec suite à 400 ans de sacrifices qui fait de nous des Québécois avant d'être un Canadien-français. Il n'en reste pas moins que la nation française en Amérique existe et son véritable État qui va lui permettre de survivre n'est que l'État du Québec.


      Vous dites : « En effet, toute la charge subversive de la non reconnaissance nationale du Canada français par le Canada anglais disparaissait ainsi au profit de la promotion d’une simple appartenance administrative existante, en aucun cas menaçante pour les fédéralistes, puisqu’issue du cadre colonial canadien lui-même. » 


      Je suis plus ou moins d'accord avec vos propos. J'estime plutôt que, encore une fois, l'emergence de l'État du Québec n'est que la somme de sacrifice mais aussi d'une prise de conscience que seule un État du Québec administré que par des Canadiens français assurerait l'avenir de la nation. 


      Vous dites : « Le conquis, le dominé, le minorisé, celui qui devait se libérer pour assurer l'avenir de sa nation, celui dont les droits avaient été tant de fois bafoués, celui qui résistait et qui réclamait justice, c’était le Canadien-Français. Ce n’était pas le Québécois né de la Conquête ou de la Confédération, pas ce Québécois satisfait de lui-même qui est la norme aujourd'hui. »


      Encore là, je suis plus ou moins d'accord. J'estime que le génocide culturel des francophones au Canada est au coeur même du sentiment identaire québécois car les Québécois ont réalisé que les Canadiens français hors Canada, suite au règlement 17 et autres « saloperies » du Canada anglais, n'étaient plus qu'une fin tragique. Au début des années 70, les Québécois ont eu la capacité de voir cette réalité : il était trop tard pour faire le ÉGALITÉ de Égalité et indépendance de Daniel Johnson. Ils ont donc choisi le chemin de l'indépenance. Sauf que le référendum n'était vraiment pas la bonne façon de le faire. Ils ont sombré dans le rêve (le moment magique et instantané) alors que les Québécois n'avaient qu'à continuer d'édifier leur État du Québec pendant 10, 20 ou 30 ans jusqu'à l'inévitable rupture avec le cadre constitutionnel canadien. 


      Quand j'appelle à la nation française en Amérique, je leur dis simplement : il y aura toujours une place pour vous si vous revenez au sein de notre foyer. 


      D'ici là, d'ici un État du Québec fort, d'ici l'indépendance, la francophonie en Amérique ne dépend que de la capacité des Québécois à survivre dans cette Amérique anglaise.  


  • Catherine Doucet Répondre

    6 février 2018

    Dieu sait que la tentation du néant est forte!


    Je vous dirais M. Rivard, que cette tâche immense qui nous attend, on ne peut l’entreprendre qu’en partant de là où nous sommes. Avant d’accéder à une existence politique et de parler d’alliances et de relations avec nos troupes, il va falloir que nous entrions en relation les uns avec les autres en tant qu’individus. Il va falloir que nous apprenions à nous reconnaître les uns les autres, et à dialoguer les uns avec les autres. Dialoguer, ça ne veut pas dire communiquer part textes interposés, par monologues superposés. La problématique identitaire est beaucoup trop complexe pour que nous la résolvions en restant tout seul chacun de son côté. Il va falloir que nous aimions assez notre pays pour nous astreindre à y réfléchir ensemble. Réussir à accomplir ce simple exercice serait déjà ce que les anglais appellent un statement!


    Tant que nous ne comprendrons pas cela nous serons prisonniers du fantasme, de cet amour du colonisé pour l’échec dont parle si bien M. Verrier.


    • Christian Rivard Répondre

      6 février 2018

      Je suis tout à fait d'accord avec vous car j'estime que la politique est avant tout relationnel.



      • Relationnel : Savoir-être ; partager des valeurs ; mettre en valeur nos qualités.

      • Rationnel : Savoir ; idées ; arguments ; opinions.


      Pour faire corps à nouveau, se regrouper, le mouvement souverainiste doit mettre en arrière plan au plus vite le visage rationnel de la politique puisque les idées divisent bien avant de rassembler. Mettre en arrière plan ne veut pas nécessairement dire que le visage rationnel n'a pas son importance. Par contre, notre vision personnelle des choses n'est seulement une perception de ce que nous connaissons de la réalité.


      Lorsque le visage relationnelle est mis en avant plan, c'est essentiellement un acte qui prend sa force dans la réalité. C'est militer avec le coeur, avec le savoir-être. L'implication politique est alors un don de soi, le don de ses talents, de son temps, de ses biens et de son argent au Québec. J'estime que la qualité première est l'humilité. Il faut aimer apprendre des autres et ne pas agir en dictateur, en détenteur de la vérité. L'important est de se rassembler, porter le projet souverainiste.


      Si la structure ─ humaine ─ est grande, large et bien organisée, elle aide à faire rayonner les idées, les valeurs des nationalistes, le projet d’indépendance du Québec sur le territoire. Nous sommes tous un canal de communication qui sert à répandre sur le territoire les idées, les valeurs du projet d’indépendance du Québec qui nous ont été transmis par nos prédécesseurs.


      C'est le relationnel qui porte le rationnel. Une valeur n'existe que lorsque nous la mettons en pratique. Le message est rien sans le messager.


      Christian B. Rivard


      • Éric F. Bouchard Répondre

        9 février 2018

        Puisque nous nous comprenons si bien, M. Rivard, puis-je vous demander si Vigile a l'intention d'organiser des groupes de discussions?
        Catherine Doucet
        (qui n'arrive pas à se connecter sous son propre compte)

  • Éric F. Bouchard Répondre

    6 février 2018

    Très bon texte Monsieur Rivard. Vous en appelez à une plus grande lucidité politique qui nous libérerait de la narration de l’autre. On ne peut qu’applaudir. Malheureusement, vous y replongez aussitôt en vous référant au peuple et à l’État québécois. Le peuple québécois est un concept territorial (ou citoyen) qui a été promu par les progressistes des années 1960 (souverainistes ou fédéralistes) contre la nation canadienne-française, jugée par eux indigne d’existence. Ils le firent tant et si bien qu’il n’y eût plus, après la mort de Daniel Johnson père, de défenseur de la nation canadienne-française et d’un État national canadien-français. Depuis, il n’y en a que pour le Québec et pour la québécitude. Il est certain qu’on a voulu alors faire croire que cela revenait au même et que cette nouvelle appellation favoriserait notre émancipation. Tous s’y sont laissés prendre semble-t-il. Pourtant, le Québec, the Province of Quebec, n’est que la réduction coloniale du Canada français, de sorte que s’y référer nous condamnait de fait à nous emprisonner dans une aliénante narration de nos conquérants. C’est de cela je crois que les nationalistes devraient se rendre compte avant toute chose. Qu’en dites-vous?


    Éric Bouchard


    • Christian Rivard Répondre

      6 février 2018

      Merci pour le commentaire pertinent.
      Je parle pourtant de la nation français en Amérique. Par cette dénomination, je parle évidemment de l'ensemble des francophones d'Amérique. Cependant, les ponts sont si minces entre les Canadiens-français à la grandeur du Canada. Ayant déjà travaillé en Acadie (Nouvelle-Écosse), ayant du côté de ma mère des racines franco-ontariennes, ayant aussi une soeur et des neveux canadiens de langue française (ayant résidé au Manitoba, Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse, Ontario et Colombie-Britannique), j'ai réalisé avec le temps qu'il y a une fracture psychologique et identitaire entre les Québécois et les canadiens de langue française. C'est triste mais réaliste. Je vois cela comme étant nécessairement les effets d'un génocide culturel. Nous sommes une nation ; ils ne sont que des communautés, à l'exception des Acadiens de la péninsule acadienne qui détiennent un certains poids dans le fonctionnement de l'État du Nouveau-Brunswick.
      J'oserais dire par contre que ce n'est que par un État du Québec fort avec une politique de dénonciation forte à propos du génocide culturel des canadiens français que le reste de la francophonie au Canada pourra prendre du coffre et améliorer leur sort.
      C'est un peu beaucoup le travail du Bloc Québécois pour l'instant. Est-ce qu'il le font ?
      Christian B. Rivard

      • Éric F. Bouchard Répondre

        6 février 2018

        Mon questionnement ne concerne pas directement notre diaspora à travers le Canada ou l’Amérique, il traite du destin incertain de ma nation, les Canadiens-Français. Il traite de la nécessité de retrouver notre appellation nationale pour nous replacer dans un récit qui nous soit propre, une identité clairement reconnaissable par l’Autre (et aussi bien sûr par notre diaspora). Car en se disant Québécois (l’appellation administrative réservée pour nous par le conquérant), nous nous sommes placés irrémédiablement dans le récit de l’Autre, dans la position d’infériorité souhaitée par le conquérant. La raison première pour laquelle nous sommes devenus de parfaits colonisés, incapables d’agir avec force.
        Un État québécois fort n’y changerait rien puisqu’il est le rouage fondamental du processus d’aliénation depuis près de cinquante ans, notamment en référant exclusivement à un peuple québécois aux identités plurielles, au mieux déclaré majoritairement francophone. Ce Québec-là, c’est celui qui se construit par les partis politiques, les médias, et les notables depuis tout ce temps. En conséquence, je ne pense qu’il soit possible de redéfinir la québécitude pour qu’elle s’approche de ce qu’elle pouvait signifier dans la tête des militants souverainistes des années 1960 ou 1970. C’est trop vague, trop flou, trop marqué d’une confusion dont nous avons toujours fait les frais. On ne peut baser une lutte politique sur une identité nationale équivoque. C’est de ce problème qu’il nous faudrait discuter. Voilà en gros ce que je voulais vous dire.

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    6 février 2018

    Géopolitique 101 – L’erreur historique du mouvement souverainiste du Québec


    http://nomos-tv.com/geopolitique-101-lerreur-historique-du-mouvement-souverainiste-du-quebec


    ...


    Dans un prochain vidéo : le père de la doctrine d'État du Québec


    Il ne peut y avoir de doctrine souverainiste sans doctrine d'État. Or, le mouvement souverainiste dans son ensemble l'a ignoré depuis les années soixante-dix. Moment où il a abandonné l'édification de notre État pour partir en quête d'un pays fantasmé ; d'où le cul de sac actuel avec pour conséquences le déclin politique du Québec.


    « Il n'y a pas de politique qui vaille en dehors de la réalité » (De Gaule)


    Dans ce constexte, il nous faut revenir à cette doctrine d'État apparue avec Lionel Groulx et portée par la suite par Duplessis (autonomie), Lesage (Maitre chez nous) et Johnson (père) (Égalité ou indépendance). C'est cette doctrine appliquée pour l'édification de notre État (qui porte la nation) qui a mené à la montée en puissance du Québec. Et au fait qu'il se soit dresser contre l'État canadien.


    Dans une prochaine vidéo nous allons revenir (Nomos-TV) sur le père de la doctrine d'État du Québec à partir du livre de Charles-Philippe Courtois : Lionel Groulx, le penseur le plus influent de notre histoire


    JCPomerleau



  • Gilles Verrier Répondre

    6 février 2018

    Il nous est facile d'admettre aujourd'hui que la stratégie référendaire n'était pas très avisée. Il faut retourner aux sources pour se rappeler que cette stratégie avait été promue par un homme dont l'intégrité s'est révélée plus que douteuse, compte tenu de ses relations clandestines avec des agents de haut niveau de la Gendarmerie royale du Canada qui se rapportaient aux hautes autorités fédérales. Si on peut penser que la premier référendum était sous influence fédérale, on comprend qu'ils avaient tout intérêt à réduire tout le combat national à la taille d'un seul événement. Mais pourquoi avoir tenu un référendum que tous savaient qu'il était perdu d'avance ? La réédition de la même tragédie quinze ans plus tard relève d'un incompréhensible délire suivi d'une incompréhensible reddition. On peut certes blâmer les deux aventures référendaires pour nos déboires, mais on aurait tort de s'arrêter là ! La tolérance pour l'infiltration policière et le refus de continuer le combat ne relève pas uniquement de la stratégie référendaire mais d'une doctrine sous-jacente dont on commence à mettre à jour les éléments. Mes dernières chroniques vont dans ce sens. Le travail de compréhension et d'analyse - à poursuivre - nous fera sortir de la stupeur paralysante.  


    On ne peut le nier. Depuis 1995, c'est la même doctrine qui est demeurée aux commandes du Parti québécois. Et elle a étendu son influence dans tous les secteurs de la société québécoise, s'efforçant de nous maintenir sur la défensive et dans une mauvaise conscience perpétuelle. C'est pourquoi l'idée même de confier notre avenir à ceux qui se revendiquent les fiers continuateurs de cinquante ans d'échecs aurait besoin d'être étoffée avant d'être prise pour argent comptant, à moins de vouloir poursuivre dans une forme d'aveuglement qui flirte avec le masochisme.


    La construction de l'État québécois, telle que pouvaient l'envisager Lionel Groulx, Daniel Johnson, Jean Lesage et plusieurs autres de la tradition québécoise, ne se pose plus dans les mêmes termes aujourd'hui. J'invoquerai deux raisons : les limites qu'impose le cadre mondialiste aux pouvoirs nationaux et la centralisation fédérale qui s'est beaucoup accrue, dans la proportion de nos reculs. Le Québec dispose aujourd'hui de moins de marge de manoeuvre qu'il en avait à l'époque de Lester B. Pearson, par exemple. Pour ces raisons, un sain réalisme nous fait douter de la parole de ceux qui n'ont cessé de donner des signes d'allégeance aux valeurs mondialistes et multiculturalistes, et ce sont eux qui dominent plus que jamais le Parti québécois - à l'instar des autres formations politiques d'ailleurs. Pourront-ils se mettre à bâtir un État québécois à notre image avec tous les handicaps historiques qu'ils traînent ? Leur absence navrant de toute réflexion critique et de compréhension des échecs échelonnés sur cinquante ans n'a rien pour rassurer. Le temps nous est compté, que nos meilleures forces se laissent détourner par des leurres pourrait s'avérer un très mauvais raccourci. Si une doctrine de remplacement existe, c'est elle qui doit se tailler une place dans l'arène politique. Faute de l'avoir, nous pourrions nous trouver dans une situation pire que tout ce que l'on peut imaginer, car cette doctrine de fidélité à nos ambitions nationales serait passée de minoritaire mais prometteuse dans les années 1960, à marginale aujourd'hui. Pour changer quelque chose, il faudra prendre la réalité telle quelle est, même si c'est dur à avaler. Les Québécois ont beaucoup rêvé, il leur faudrait passer à l'analyse du rapport des forces en présence avec une froideur qui ne leur est pas coutumière.     


  • Marc Labelle Répondre

    5 février 2018

    Le déploiement de la force alimente la puissance de l’État, c’est-à-dire sa capacité pérenne d’agir et de se transformer.  Or, le plus grand manquement du dernier demi-siècle fut la réaction passive du PQ à l’échec des référendums sur la souveraineté.  Il aurait fallu prévoir et mettre en œuvre des plans B, C, D, etc., pour aussitôt relancer la lutte.  L’attentisme « gréco-calendaire » d’un référendum verni et lisse portant exclusivement sur la souveraineté totale fut la plus grave erreur stratégique.  Il faut créer les conditions d’affranchissement en affrontant le gouvernement fédéral par le recours à de multiples et incessantes initiatives unilatérales.  Fondées sur ces trois piliers : la maîtrise de nos ressources, l’organisation des forces de la défense, les alliances avec les autres peuples.  Cela mènera à des conflits de légitimité — qu’il s’agira de faire trancher par l’appel au peuple.  C’est dans l’intensité de ce nouvel état d’esprit qu’une assemblée constituante s’avérera utile parce qu’elle mettra en relation et soudera les citoyens qui veulent en finir avec le régime actuel.