Le plus grand premier ministre du Québec
8 novembre 2021
Le trésorier de Duplessis, M. Gérald Martineau, s’est levé à l’Assemblée législative sur un point d’ordre, pour défendre son honneur attaqué par la commission Salvas.
Le Presse a publié le débat qui confirme ce que nous affirmons dans ce texte sur Duplessis : le patronage était présent dans tous les partis. À cette différence pour son parti eu égard les Canadiens français que M. Martineau souligne : « Nous avons favorisé les nôtres. »
(Dans les extraits suivants du reportage, les caractères gras ou italiques sont de nous.)
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La Presse, 25 mai 1961
« M. Martineau expose sa conception du patronage »
https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/2756465
QUÉBEC (par V.P.) — Le conseiller législatif Gérald Martineau, que des témoins devant la commission Salvas ont relié au système des « commissions » versées par les fournisseurs du gouvernement à des amis de l’Union nationale, a présenté sa défense, hier après-midi, au Conseil législatif.
Sa défense s’est résumée à la défense du patronage. C’est une tradition, non seulement au Québec, mais au Canada, a-t-il dit, une tradition qui a toujours existé et qui existe encore. Quant à lui, il a vu à ce que ce patronage serve les intérêts des gens de chez nous, des Canadiens français.
[…]
[Échanges :]
M. Martineau : Je me lève sur une question de privilège par suite d’une preuve de ouï-dire présentée hier devant la commission Salvas. En aucune circonstance même pas avec M. Dupuis, je n’ai fixé de prix pour la vente de produits au service des achats.
On est entré sur le terrain de la caisse électorale et du patronage. Le patronage n’a pas été inventé par l’Union nationale et il continue d’exister. Il existe encore sous le gouvernement actuel…
[…]
M. Martineau : J’ai eu la délicatesse avant la séance d’aller dire aux leaders de la gauche et de la droite que je soulèverais cette question de privilège. Je poursuis en disant que le patronage existe encore sous le gouvernement actuel et même qu’il a existé sous d’autres gouvernements, comme sous le gouvernement de M. St-Laurent dans le cabinet duquel le premier ministre actuel du Québec a siégé.
M. Marier : Je répète mon point d’ordre, le conseiller doit demeurer dans les bornes de la question soulevée et non pas entrer dans une discussion sur le patronage.
M. Asselin : Le conseiller doit donner des explications parce qu’on a tenté d’établir que des actes de patronage avaient existé. Il faut tenir compte de la tradition. Si on juge ces actes sous cet angle, ils n’ont plus la même couleur. Il emploie donc un moyen raisonnable de se défendre car l’enquête n’est pas loyale étant limitée à une période de cinq ans. Sinon…
M. Brais : […] On veut jeter du discrédit sur le nom de M. St-Laurent, on veut le salir devant l’opinion publique.
M. Martineau : Je n’ai pas sali le nom de M. St-Laurent. Je demande que le conseiller retire ses paroles.
M. Brais : J’en ai assez des gens qui jettent de la boue. Que le conseiller ait le courage d’aller devant la commission Salvas et de dire que les témoignages d’un ou de plusieurs témoins ne sont pas vrais. Il peut même aller devant l’opinion publique. La discussion n’a plus sa raison d’être.
M. Renaud : Rien ne nous dit que le conseiller n’ira pas devant la commission Salvas. Mais pourrait-on dire qu’il pourra se défendre adéquatement alors qu’il devra rester dans la période de temps sur laquelle enquête la commission ? Il a droit de défendre son honneur.
[...]
M. Martineau : Nous avons eu du patronage sous l’Union nationale. Nous l’admettons. Mais avec cette différence que nous avons aidé des libéraux notoires.
M. Martineau produit une lettre adressée à M. Duplessis le 27 juillet 1959.
M. Marier : De quelle façon une lettre adressée à M. Duplessis ou une lettre adressée à des électeurs peuvent-elles prouver catégoriquement que les accusations portées devant la commission Salvas sont fausses ?
M. Martineau : Je veux prouver qu’il y avait patronage. Je l’ai dit au début de mes remarques. Je sais que vous n’aimez pas ça.
[...]
M. Martineau : Par cette lettre, je veux prouver qu’un juge libéral a écrit à M. Duplessis pour lui rendre un témoignage d’amitié. Sans ton intervention à Ottawa, disait-il à M. Duplessis, je n’aurais pas pu obtenir ce que j’ai eu. Jamais ma famille et moi ne pourrons te rendre suffisamment hommage et te remercier pour tes bienfaits.
Je veux prouver que le patronage, ça existait avant 1944 sauf qu’avant cette période les contrats allaient en dehors de la province. M. Duplessis m’a demandé que les contrats soient accordés dans le Québec, que des quotations [cotations] soient demandées à plusieurs compagnies et que les achats soient bien faits. Nous avons favorisé les nôtres.
Avant 1944, dans le domaine des assurances, tout était accordé à des compagnies d’assurance étrangères. J’ai été pour quelque chose dans le changement qui s’est produit. Les centaines de courtiers québécois ont été encouragés et les commissions qui leur étaient payées étaient inscrites sur les formules T-R qui leur étaient envoyées.
[…]
M. Martineau : […] Le patronage existait également avant 1944. La Canada Paint avait plusieurs agents au gouvernement, dont le beau-frère de M. Larue, chef de cabinet du premier ministre. Il y a cette différence que, sous cet ancien régime, on exigeait de l’argent des entrepreneurs.
J’ai ici pour 55 000 $ de chèques endossés et payés à un frère d’un ministre maintenant décédé. J’ai également un affidavit du président de la compagnie de construction assermenté devant Me Laurent Lesage, un notaire cousin du premier ministre, je crois, qui prouve la vérité au sujet de ces 55 000 $. Mais je n’ai pas voulu dévoiler les noms de ces gens. J’ai gardé ces preuves pendant seize ans et cinq campagnes électorales. Je crois qu’il y avait des raisons humanitaires de ne pas révéler ces choses.
[...]
M. Martineau : [...] Les fonds électoraux existent encore mais ils se collectent différemment. On est maintenant obligé de souscrire si on veut conserver des contrats. Pourtant, soutirer de l’argent, c’est punissable par le code pénal. Je ne crois pas que le procureur général n’ait porté des accusations contre qui que ce soit.
Les faits que j’ai relatés aujourd’hui sont exacts et basés sur des informations véridiques. S’il y a une parcelle de fausseté dans ce que j’ai dit, je m’engage sur mon honneur à résigner.
M. Martineau a souligné cette déclaration à trois reprises.
J’avais cru pouvoir omettre ces preuves qui peuvent affecter des familles du Québec mais, devant la campagne de salissage entreprise contre moi, il me faut répondre.
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