Le Canada n'a pas 140 ans, mais 400 ans

Tribune libre - 2007


Alexandre Shields écrit dans Le Devoir de la fin de semaine (30 juin - 1
juillet): «Le Canada a 140 ans cette année». Comment Le Devoir peut-il
publier une telle aberration?
Le Canada n'a pas été fondé en 1867, il l'a
été en 1608. Marcel Trudel, qui n'est pas un nationaliste pur et dur, qui
n'est pas un indépendantiste, qui est un de nos grands historiens, écrit:
«Au point de départ de l'histoire continue du Canada, nous trouvons
Champlain; il est volontairement et par principe à l'origine de cette
histoire et c'est en ce sens que Champlalin peut revendiquer le titre de
fondateur du Canada» (Marcel Trudel, Champlain, Coll. Classiques canadiens,
Fides, 1956,p.13).
Faire commencer le Canada avec la Confédération, en
1867, c'est une manière de nier le Québec, le Canada français. C'est une
manipulation grossière de l'histoire. Le Canada existait en 1760 puisqu'il
a été conquis cette année-là. Il existait au temps de Talon et de
Frontenac. On l'appelait tantôt la Nouvelle-France, tantôt le Canada. Lisez
les textes de l'époque, et vous verrez... Les Premières Nations étaient ici
avant les Français.elles étaient réparties dans différentes régions de ce
que nous appelons l'Amérique. Mais celui qui le premier a eu l'idée d'un
pays, d'une région administrative regroupée sur le Saint-Laurent et les
Grands Lacs, c'est Champlain. C'est lui qui a fondé le Canada. Il n'y a pas
deux peuples fondateurs du Canada, il y en a un, et c'est la France.
Le
Canada n'a pas 140 ans, mais 400 ans... En 2008, ce n'est donc pas seulement
la fondation de Québec que nous devons célébrer, mais la fondation du
Canada. Malheureusement , les Québécois n'ont aucune fierté, aucun souci de
l'histoire, aucun respect d'eux-mêmes. On peut leur passer tous les sapins,
et ils applaudissent.
Paul-Émile Roy

Lorraine, Québec

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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    6 novembre 2014

    comment être historien sans être indépendantiste ?

  • Archives de Vigile Répondre

    13 février 2008

    Bonsoir M. Paul-Émile Roy,
    Je viens de lire votre lettre au Devoir, 13 février 2008, dans laquelle vous faites allusion à la Grande Noirceur supposée du Québec... Et ça m'a fait tellement plaisir de lire ces quelques mots, que je vous ai recherché sur le web pour vous retrouver ici, dans Vigile, avec un propos tout aussi stimulant par son acuité et sa vérité, et portant cette fois sur la fondation du Canada par Champlain. Merci! Ça fait du bien de vous lire!
    Ce qui m'a incitée à vous chercher et à vous écrire, c'est cette fatigue que je ressens de voir qu'on présente si souvent les années soixante comme la fin de la prétendue noirceur, alors qu'à mon avis ces années constituent le début de notre barbarisme québécois. J'ai 54 ans, j'ai donc vécu cette période durant mon adolescence. J'ai connu le tourbillon, pressenti l'espoir que tout cela représentait, connu aussi le désenchantement et la tristesse d'assister à la fin de la poésie.
    Plus je vieillis, plus je vois cette époque comme une période où l'on a détruit, beaucoup détruit, et souvent ce qu'il y avait de mieux! Par exemple, les quartiers ouvriers de Québec, de Montréal, de Hull, de Trois-Rivières, de Rimouski... Et aussi de belles constructions bourgeoises de la Grande-Allée à Québec ou de Notre-Dame-de-Grâce à Montréal... Sans compter le regard méprisant que l'on a jeté sur toute l'aventure religieuse, entre autres avec ses communautés d'enseignantes ou d'hospitalières ou de contemplatives, ces femmes qui ont tant donné, et qui m'inspirent un sentiment de courage et de noblesse, celle du peuple canadien-français...
    Il m'arrive de penser que le refus global n'a pas été une libération, mais plutôt l'occasion de jeter le bébé avec l'eau du bain !
    Merci de votre attention.
    Monique Désy Proulx

  • Lionel Lemay Répondre

    23 juillet 2007

    La seule partie du Canada actuel qui date de plus de 400 ans est le Canada français (Québec) découvert par Jacques Cartier qui en prit possession au nom du Roi de France en 1534. (433 ans)
    Champlain a pris possession de Terre-Neuve et de l'Acadie en 1603 (404 ans) mais ce territoire tomba aux mains des Anglais entre 1710 et 1745. La Nouvelle-Écosse et le Nouveau- Brunswick ne font partie du Canada que depuis 1867.(140 ans) Terre-Neuve n'en fait partie que depuis 1949. (56 ans)
    C'est la Ville de Québec, première ville du Canada français, fondée par Champlain en 1608, qui fêtera ses 400 ans en 2008.
    Le Canada français fut conquis par les Anglais en 1759 et abandonné par les Français en 1763 (244 ans).
    L'Ontario n'existe que depuis 1791, (216 ans) lorsque la Province of Québec fut agrandie et divisée en deux parties, le Haut-Canada (Ontario) et le Bas-Canada (Québec).
    L'expansion du Canada par les provinces de l'ouest et les Territoires du Nord-Ouest se fit entre 1870 et 1905. Sans l'annexion de Terre-Neuve en 1949, le Canada anglais d'aujourd'hui n'existe que depuis 102 ans.
    Le Québec, l'Acadie et Terre-Neuve sont les seules provinces canadiennes qui peuvent célébrer plus de 400 ans d'existence en toute légitimité.

  • Robert Bertrand Répondre

    20 juillet 2007

    Tous les historiens ne voient pas les choses de la même manière.
    Monsieur Henri Laberge, historien, a présenté une intervention lors de la commémoration de la "Bataille de Sainte-Foy" le 29 avril dernier.
    J'extraie quelques passages :
    Sur Jacques Cartier :
    ... le découvreur du Québec au même titre que Christophe Colomb a découvert l'Amérique.
    Jacques Cartier nous appartient, il est le découvreur du Québec et nous devons en être fiers.

    Sur Samuel de Champlain :
    ...il est l’ancêtre civique de tous ceux et celles qui ont choisi d’habiter ce pays québécois dont il est le Père fondateur.
    Il est venu fonder un pays français dont les Québécoises et Québécois de toutes origines sont les héritiers de plein droit, quel que soit l’arbre généalogique auquel ils appartiennent.


    Sur la Victoire de la Bataille de Sainte-Foy :
    ... c’est le peuple québécois lui-même. Il avait, lui, à défendre l’héritage d’un siècle et demi de travail acharné, de courage et d’avoir investi dans la construction de ce pays français qui est encore le nôtre.
    C’est l’intégrité de leur projet collectif que les Québécois de l’époque défendaient avec opiniâtreté beaucoup plus que le rattachement à l’empire français.
    Les Québécois, eux, défendaient leur territoire national, leur héritage juridique, linguistique et culturel. Ce sont eux et eux seuls qui auraient à subir, avec l’humiliation de la défaite, la déstructuration juridique, politique et linguistique de leur pays.


    Sur le traité de Versailles :
    La Proclamation royale de 1763 faisait bel et bien de la «Province of Quebec» une colonie britannique fonctionnant en anglais, avec des institutions juridiques anglaises et avec l’anglicanisme comme religion officielle.
    De par la seule volonté du Roi, la Coutume de Paris qui avait été la loi fondamentale en matière de droit civil était remplacée illico par la loi d’Angleterre. Toute personne qui acceptait d’occuper quelque fonction officielle devait prêter le Serment du Test. Ce qui interdisait l’accès à ces fonctions aux sujets catholiques.


    Sur la Nouvelle-France et tout son héritage étaient abolis.
    Les habitants du pays conquis devenaient les nouveaux sujets de Sa Majesté britannique et ils auraient un statut d’infériorité par rapport aux anciens sujets débarqués dans les fourgons de l’armée conquérante.

    Sur la Loi sur le Québec : (la Quebec Act de 1774)
    (...) première victoire politique après la conquête britannique = la première reconnaissance par les autorités de l’empire britannique de ce que le Québec constitue une société vraiment distincte des autres colonies britannique.
    La Quebec Act de 1774 ce n’est pas un acte juridique quelconque, c’est bel et bien une loi du Parlement britannique au même titre que le Canada Act de 1982 que l’on traduit fort bien par Loi sur le Canada. Ayons l’audace d’appeler les choses par leur nom et traduisons «Quebec Act» par «Loi sur le Québec».
    La Coutume de Paris, qui sera à l’origine de notre Code civil québécois, n’est pas rétablie uniquement pour les francophones ou pour les anciens habitants de la Nouvelle-France ; elle est rétablie comme loi fondamentale du pays québécois, donc pour tous les habitants du Québec, quelle que soit leur origine. En ce sens la Loi sur le Québec reconnaît effectivement le Québec tout entier, avec toute sa population, comme une société distincte.

    =====
    Il nous reste à la diffuser sur l'ensemble de notre territoire.
    Nous avons publié son intervention intégrale à la page mentionnée.
    Le texte original (corrigé et revisé) de Monsieur Henri Laberge, historien, peut vous être transmis. Il nous fera plaisir de vous le transmettre.
    Robert Bertrand