En attendant que l'argent et le pouvoir changent de mains

Gilles Duceppe voit le vent changer. Espérons que les rapports de force vont continuer de se déplacer de manière à obliger beaucoup de monde à mettre l'argent à sa place.

Tribune libre 2008

Ne raisonnez pas trop sur les discours de Gilles Duceppe ni sur ceux de Stephen Harper et les autres. Seul le discours de Gilles Duceppe est en rapport avec la situation actuelle au Québec et au Canada. Autrement, il n'aurait pas parlé de souveraineté à l'Economic Club de Toronto.

Si vous parlez de langage cryptique, celui que tenait Machiavel pour éviter le bûcher comme Savonarole, vous devez comparer la situation il y a vingt cinq ou trente ans à la situation actuelle.

Je me rappelle Jacques Parizeau s'adressant à l'Economic Club de Toronto il y a plus de 25 ans si ma mémoire est bonne. Son discours était plus réservé que celui de Gilles Duceppe aujourd'hui. Le Parti Québécois était au pouvoir mais la population de lui accordait pas suffisamment d'appui pour le placer en position de force comme vous dites.

Aujourd'hui, Jean Charest est en position de force parce qu'il travaille pour l'argent et seulement pour l'argent de Bay Street et l'argent de Bay Street est encore puissant parce que les banques canadiennes n'ont pas fait faillite comme les banques américaines, anglaises, écossaises et européennes.

Quant à l'argent de Paul Desmarais, Henri Paul Rousseau est venu rapidement à sa rescousse avant qu'il ne se produise quelque chose. Et je blâme le peuple québécois de l'approuver, car les Québécois aiment l'argent pour l'argent, malheureusement.

Ils s'inclinent devant les riches avec fatalisme, comme si le fait d'adorer l'argent était une garantie de bonheur. Une proportion élevée de Québécois est solidaire des Oligarques qui tiennent le Québec et le Canada sous leur contrôle. Rien de surprenant puisque les adorateurs de l'argent n'ont jamais manqué au cours de l'histoire du monde.

En Gaule romaine, les Francs qui ont pris le pouvoir étaient aux débuts de connivence avec Rome et l'Empire romain. Dans l'Europe occupée et dominée par les Nazis, le nombre de collaborateurs était effarant. Lorsque les Nazis ont perdu la guerre, il fallait voir le nombre de résistants augmenter d'une manière exponentielle. La nature humaine fuit les risques et se range du côté des gagnants. Comme toujours, les pauvres dépourvus de défense se retrouvent les mains vides.

Certes, on peut observer un certain éveil au Québec et au Canada anglais. Cet éveil est lié au niveau d'instruction plus élevé des classes moyennes et aux communications par Internet. Les révolutions sont toujours le fait des classes moyennes instruites, responsables et capables de sacrifices jusqu'à la dernière limite. Les autres suivent comme des moutons. Je l'ai appris par expérience.

Le contexte et les situations qui se présentent ne sont plus ce qu'ils étaient ìl y a dix, vingt ou trente ans. Voyez les crises économiques graves qui se déroulent en Amérique du Nord, en Europe et ailleurs dans le monde. Elles résultent du capitalisme sauvage et du libéralisme à outrance, la mentalité du pouvoir pour le pouvoir et pour l'argent.

Dans cette conjecture, Gilles Duceppe peut s'exprimer d'une manière plus articulée que jadis Jacques Parizeau devant l'Economic Club de Toronto, qui n'a plus rien à dire en attendant que l'argent et le pouvoir changent de mains.

La question demeure toujours la même : Est-ce que Québécois et Ontariens auront le courage et la détermination de prendre le pouvoir pour l'intérêt général, sans crainte de représailles?

La Saskatchewan et le Yukon s'imposent. Pourquoi pas les autres?

Je me demande ce que feront Terre Neuve et la Nouvelle Écosse?

Quant à l'Alberta et la Colombie Britannique, ils appartiennent déjà à l'Argent, comme le Québec libéral est déjà promis à Gazprom avec son projet de port méthanier à Lévis.

Pourquoi est-ce que Gazprom, le géant russe, n'est pas allé à Portland, ou Bangor Maine pour son projet? C'est en face de l'océan et la navigation est praticable l'année longue. De plus,le territoire appalachien et montagneux du Maine offre des garanties de protection naturelle que ne peut offrir le Saint Laurent, dont l'écologie est plus vulnérable.

Gilles Duceppe voit le vent changer. Espérons que les rapports de force vont continuer de se déplacer de manière à obliger beaucoup de monde à mettre l'argent à sa place.

JRMS

Featured 751d93ca198caacf4590a022022f5bc8

René Marcel Sauvé217 articles

  • 249 336

J. René Marcel Sauvé, géographe spécialisé en géopolitique et en polémologie, a fait ses études de base à l’institut de géographie de l’Université de Montréal. En même temps, il entreprit dans l’armée canadienne une carrière de 28 ans qui le conduisit en Europe, en Afrique occidentale et au Moyen-Orient. Poursuivant études et carrière, il s’inscrivit au département d’histoire de l’Université de Londres et fit des études au Collège Métropolitain de Saint-Albans. Il fréquenta aussi l’Université de Vienne et le Geschwitzer Scholl Institut Für Politische Wissenschaft à Munich. Il est l'auteur de [{Géopolitique et avenir du Québec et Québec, carrefour des empires}->http://www.quebeclibre.net/spip.php?article248].





Laissez un commentaire



4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    8 octobre 2008

    Monsieur Sauvé, j,ai lu avec intérêt votre livre ¨La géopolitique et l'avenir...¨Je m'apprête à lire le carrefour des empires. J,aimerais connaître votre impression personnelle sur l'article que je vous ai envoyé et qui ne parait pas , Est-elle trop optimiste pour les sommes que nous récupérerions d'Ottawa avec toute notre fiscalité en devenant indépendant? Une réponse personnelle ferait plaisir.

  • Archives de Vigile Répondre

    5 octobre 2008


    Cet article dans le Toronto Star est peut-être l'étincelle qui va provoquer un incendie, monsieur Pomerleau. Dans les conditions actuelles, celles qui fait l'objet de nos discussions depuis quelque temps, nous avons de bonnes raisons d'espérer.
    Le torchon brûle depuis longtemps entre Ottawa et les provinces les plus aptes à devenir des États avec la majuscule.
    J'ai pu observer le phénomène pendant le temps passé en Alberta et en Saskatchewsan avec l'armée et finalement pendant les années d'enseignement à Toronto, où le gros méchant "séparatisse du Québec" a été bien accueilli par des gens qui avaient acquis de la maturité et attendaient de ma part en enseignement plus poussé en géopolitique que je n'aurais jamais pu dispenser dans une institution québécoise, piégée dans une idéologie ou une autre.
    Ces fortes tendances vers les statuts d'États ne sont pas du
    "séparatisme" pour le Canada anglais, qui se rappelle l'histoire des Westminster Revised Statutes de 1931, adoptés par le Parlement Britannique pour favoriser le centralime unitaire d'Ottawa et l'Oligarchie de Bay Street à Toronto­.
    J'étais prof à Toronto lorsque le Canada Act de 1982 a été signé par la reine d'Angleterre et PE Trudeau, l'homme de Bay Street et personne d'autre. La réaction du Canada anglais était froide et je n'ai vu aucun enthousiasme débordant nulle part en Ontario.
    En Angleterre et aux États Unis, ce passage naturel de pouvoirs de fait (de facto), qui appelle des reconnaissances de droit (de jure) et d'inévitables transferts de pouvoirs et de compétences, s'appelle "devolution" ou "statehood" selon le cas.
    Ce n'est qu'au Québec "fédéraliste" qu'on parle de "séparatisme". Plutôt que composer avec les contextes et les situations qui se présentent, ce qui est très exigeant évidemment, on recule commodément vers l'idéologie simpliste et arbitraire.
    Ceci témoigne d'une volonté arrêtée de tenir les Québécois en état d'inféodation et de soumission servile, par le moyen d'une dégradation vers l'âge mental de cinq ans, entretenue par les média et beaucoup de maisons d'enseignment.
    On peut le vérifier chaque jour par les articles d'André Pratte et d'Alain Dubuc dans la Presse.
    Quant aux maisons d'enseignement, y compris plusieurs facultés universitaires, n'osez pas parler de géopolitique et de stratégie d'État: vous serez accusé de répandre le "déterminisme".
    Il est évident maintenant que, pour accéder au statut d'État reconnu et réaliser son indépendance, le Québec doit réduire à zéro ou presque les pouvoirs de l'État post-impérial, unitaire et arbitraire d'Ottawa, brandon politique de Bay Street.
    Pour y arriver, le Québec doit convaincre les autres provinces d'en faire autant, par intérêt et par souci de se placer dans un rappport de forces plus flexible dans un monde de plus en plus complexe.
    En adoptant la méthode géopolitique, qui n'a rien d'un déterminisme, nous sommes sur la bonne voie. Ce ne sera pas une révolution mais la venue au monde de nouveaux États sur cette terre. Nous sommes loin d'être les premiers.
    JRMS

  • Archives de Vigile Répondre

    5 octobre 2008

    Bloc Ontario !
    Dans un éditorial (Toronto Star) un observateur soulève la question: Qui dans les partis politiques fédéraux défendra les intérêts de L'Ontario. Il souligne ironiquement que lors du débat des chefs (en anglais), seul M Duceppe a parlé des intérêts de l'Ontario (industrie manufacturière). Alors que Dion avait une chance incroyable de marteler qu'il allait produire un plan pour sortir l'Ontario, Ontario, Ontario, de la crise, pas une fois il n'a prononcé le nom de cette province ou ce joue sa vie politique.
    Il faut lire cet édito pour comprendre que l'Ontario se réveil tranquillement de ses illusions à l'effet qu'un grand parti politique fédéral saura défendre ses intérêts. Alors que ce commentateur est « anti-séparatiste », il reconnaît cependant que le Bloc est un levier efficace pour la défense des intérêts du Québec. Sous entendu, le Québec défend d’abord ses intérêts en priorité.
    À quand un Bloc Ontario.
    M Duceppe a une longue expertise de la nuisance que représente l'État arbitraire (Ottawa) pour le Québec. Il pourra être un catalyseur de stratégie pour les provinces (états naturels) qui veulent s’inspirées du Québec pour défendre en priorité leurs intérêts face au pouvoir central. Des provinces qui deviendront des états. Déjà 2 d’entre elle ont atteint ce statut : Le Québec (1962) et Terre Neuve (2007), avec le même slogan : « Maître chez nous » !
    Cet édito indique que certains surmontent maintenant le tabou de trouver des qualités à un "séparatiste" et commence à voir l'enseignement stratégique qu'il peuvent tirer d'un Gilles Duceppe au top de sa game.:
    http://www.thestar.com/FederalElection/article/511688
    JCPomerleau

  • Archives de Vigile Répondre

    4 octobre 2008

    La fin du Canada de Trudeau
    M Duceppe est au dessus de sa game. Il a compris qu'il faut créer des fissures dans le mur du ROC. Et pour se faire il présente aux Ontariens l'image d'un pays divisé en deux par deux types d'économie (énergie à l'ouest; et bas manufacturière à l'est: Ontario et Québec). Il s'agit de créer des fissures dans le mur du ROC en opposant l'est contre l'ouest, dont les intérêts les intérëts divergent iront grandissant. (Politique:Intérêts, rapport de forces, effectivité(M Sauvé))
    Jusqu'à maintenant la volonté d'affranchissement du Québec nous plaçait dans un rapport de force avec Ottawa et toutes les autres provinces UNIS. Ce rapport de force ne nous était pas favorable, d'ou l'hésitation du peuple. La création de fissures dans le mur du ROC est donc une étape fondamentale dans notre stratégie visnat la désannection. M Duceppe est venu réveiller l'Ontario à ses propres intérêts (proche du Québec) et ainsi accentuer l'écart avec l'ouest. La game sera définitivement gagné quand l'Ontario passera du statut de province au statut d'état qui défend ses intérêts en priorité, ce qui veut dire une reprise en mains de ses potentialités fiscales pour rétablie le déficit fiscal évalué à 11,8 milliards (étude T D)
    Cette élection marque la fin du Canada centralisateur de Trudeau. La réforme de la Constitution de 1982 que cela entraîne sera difficilement praticable à cause de la formule d'amendement. Ce qui rendra difficile une "reconfédération". C'est là qu'il sera intéressant de voire la réaction de Terre Neuve.
    Terre Neuve a les conditions géopolitiques pour prendre une décision de faire l"indépendance unilatéralement. Ce qui risque d'arriver, car le PM Danny Willams a admis qu'il aurait voté pour l'indépendance en 1949 (ce n'est pas anodin). Il a le tempérament pour agir. Il risque d’être un catalyseur dans la dynamique qui se mettra en place. M Willaim a peut être la clé pour débarrer la cage à castor canadienne qui permettra au Québec d'en sortir sans grand effort.
    Encore faut il que le Québec se prépare. Et pour ne pas que cette indépendance se fasse au profit de l'ordre marchand, il nous faudra reprendre en main notre État qui est présentement entre les mains de la classe affairiste !
    (http://www.vigile.net/Paul-Desmarais-prend-le-controle)
    Il nous faut maintenant préparer la fin du Canada de Trudeau !
    JCPomerleau
    .