La question de la déclaration de revenus unique est à nouveau sortie de l’oubli récemment, alors que certains élus ont entrouvert une porte que d’autres leur ont aussitôt refermée sur les doigts… Pourtant, cette idée mérite que l’on s’y attarde sérieusement, car il s’agit d’une occasion d’améliorer l’efficacité de notre appareil gouvernemental.
Le dédoublement des déclarations de revenus coûte cher aux contribuables. Selon trois évaluations, par l’Agence du revenu du Canada (2009), par le Parti québécois (2010) et par la Commission de révision permanente des programmes (2015), ce dédoublement coûterait entre 400 et 500 millions par année. Il s’agit là d’une somme colossale qui serait sûrement mieux employée autrement.
L’économie budgétaire représente l’un des côtés de la médaille. De l’autre, celui des contribuables, il faut ajouter le coût en temps pour les particuliers et les sociétés : remplir deux déclarations, traiter avec deux agences de revenus en cas de question ou de vérification et plus encore. Selon Statistique Canada, les déclarations d’impôt fédéral et provincial sur les revenus des sociétés sont le facteur principal de coût de conformité à la réglementation.
Toutefois, en dépit du bien-fondé de l’idée de réunir les déclarations de revenus et les agences qui les administrent, nous sommes encore loin du but. L’histoire a démontré que ce dossier achoppe lorsqu’on l’envisage comme des vases communicants constitutionnels, où le gain de l’un est inévitablement la perte de l’autre. Pourtant, l’intégration fiscale permettrait aux deux gouvernements à la fois d’économiser des fonds publics ET de mieux servir les contribuables. Qui dit mieux ?
Tant l’Agence de revenu du Canada (ARC) que Revenu Québec vont certainement résister bec et ongles aux velléités des élus de les saborder au profit de l’autre. C’est donc sans surprise que la proposition de l’aile québécoise du Parti conservateur du Canada et la motion votée par l’Assemblée nationale pour une déclaration d’impôt unique administrée par Revenu Québec a été rejetée sans plus d’égard par le gouvernement fédéral.
Pour sortir de ce coûteux cul-de-sac, nous devons plutôt sortir des sentiers battus et explorer des solutions créatives. Pensons-y ! Revenu Québec et la section québécoise de l’ARC pourraient être réunis dans une agence en copropriété fédérale-provinciale ayant un conseil d’administration paritaire et une présidence tournante. Autrefois, par exemple, chaque ministère et organisme avait ses propres services d’informatique et d’approvisionnement, alors que de nos jours des centres de services partagés ont été créés. Pourquoi ne pas transposer ce concept aux agences de revenu dans une perspective de coopération fédérale-provinciale ?
La délégation réciproque représente une autre piste à explorer : Québec pourrait déléguer à l’ARC la charge de percevoir l’impôt sur le revenu des particuliers ; en échange Ottawa déléguerait à Revenu Québec la perception de l’impôt sur le revenu des sociétés, comme c’est le cas pour la TPS depuis 1991. Un arrangement en sens inverse (les particuliers au Québec, les sociétés et la TVQ à Ottawa) est tout aussi envisageable. D’autres idées pourraient aussi émerger.