Un dernier retour sur le débat des chefs. Un débat qui ne se produit pas dans l’abstrait mais avec des participants qui ont tous trois des objectifs stratégiques à remplir.
Mario Dumont était en montée jusqu’à ce débat, et son objectif était évident : au moins consolider ses appuis, si possible en gagner d’autres. Mais, essentiellement, il jouait pour ne pas perdre, pas nécessairement pour gagner.
Même si ses adversaires ont pu répéter leurs attaques — soit qu’il est un «one man show» sans équipe et que des pans entiers de son programme — comme l’abolition des commissions scolaires — causeront plus de problèmes qu’elles n’apporteront de solutions, toutes ces critiques avaient déjà été entendues et rejetées par ceux qui se préparent à voter ADQ.
Ces gens ne voient pas en Mario Dumont un premier ministre potentiel, comme il aurait voulu l’être en 2003, mais quelqu’un qui serait capable de porter leurs préoccupations à Québec. L’enjeu était donc différent pour lui et, oui, la barre était plus basse que pour les deux autres.
Mario Dumont est le seul chef de parti qui ne se bat pas pour prendre le pouvoir, mais pour forcer l’élection d’un gouvernement minoritaire. En ce sens, il a réussi à montrer à ceux qui se préparent à se servir de l’ADQ comme véhicule de protestation qu’ils avaient des raisons de l’appuyer.
En ce sens, et en ce sens seulement, il a gagné le débat d’hier parce qu’il a été le plus proche d’accomplir ses objectifs stratégiques.
André Boisclair avait d’autres objectifs. Lui qui n’a pas réussi à avoir un impact réel depuis le début de la campagne devait prouver qu’il est un joueur avec lequel les autres partis doivent composer.
Les attentes envers lui étaient nécessairement basses, la plupart des gens ayant cessé de l’écouter avant même que la campagne électorale de commence.
Hier, il avait l’attention de tous les électeurs, même ceux qui l’avaient déjà écarté comme choix potentiel. Il aura peut-être réussi à en récupérer quelques uns — surtout des anciens péquistes qui pourraient revenir à la maison — mais il aura surtout redonné confiance et une certaine fierté à ses militants.
Les péquistes n’ont pas eu à rougir de la performance de leur chef et ils pourront maintenant cesser de le considérer pour un handicap. Le chef n’est peut-être pas le meilleur argument de vente du PQ, mais il ne sera plus la principale raison pour laquelle on ne voterait pas pour le PQ.
En ce sens, lui aussi a rempli ses objectifs stratégiques à ce débat.
Jean Charest est le seul chef à ne pas avoir rempli ses objectifs. Il devait convaincre les électeurs d’oublier un bilan plutôt médiocre — et que les autres chefs allaient attaquer sans merci — et montrer qu’il mérite un nouveau mandat.
Pour lui, la barre était plus élevée que pour les deux autres puisqu’il a connu un début de campagne en dents de scie.
Mais il ne lui suffisait pas de «rester au dessus de la mêlée» et «d’avoir l’air d’un Premier ministre», il devait aussi convaincre. Non seulement il ne l’a pas fait, mais il n’a même pas essayé avant la toute fin du débat.
Le véritable ennemi de Jean Charest, hier, c’était la perspective d’un gouvernement minoritaire. Une réélection, mais sans éclat et sous surveillance. Le genre de faible note de passage que l’on donne à un élève que l’on aurait tout aussi bien faire échouer.
Les électeurs québécois voient le gouvernement minoritaire d’Ottawa et n’en sont pas insatisfaits. Ils n’ont rien vu, hier, pour les convaincre qu’ils devaient renouveler des pleins pouvoirs à Jean Charest.
Hier soir, Jean Charest n’a pas perdu son élection, mais il a peut-être perdu sa majorité.
Retour sur le débat des chefs
Hier soir, Jean Charest n’a pas perdu son élection, mais il a peut-être perdu sa majorité.
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