Plutôt mourir à petit feu - Un pacifisme qui tue

En refusant de se mêler aux manifestants en colère, politiciens et grands penseurs ont signifié au peuple qu’ils l’abandonnaient.

Visite royale - Charles - Novembre 2009

Depuis quelques années, il me semble que les forces vives du Québec
ont un peu perdu de leur flamme.

[Fernand Daoust->23390]
[->17332]Les Québécois ont décrié et manifesté contre l’invasion de soldats américains en Irak. Ils ont également tenu à faire savoir qu’ils s’opposaient à l’assaut israélien contre le Liban, celui à l’endroit des Palestiniens ne les a pas non plus laissés indifférents et l’américanisation de l’Afghanistan est loin de faire leur unanimité.
Plus que proclamer leur sainte horreur de la guerre, les Québécois ont développé la tendance à se dire pacifistes. C’est d’ailleurs un peu leur marque de commerce. Quand on aborde la question de la présence d’une armée québécoise dans un Québec indépendant, bien des gens tournent de l’œil car ils associent «armée» et «guerre». Pourtant, le Québec, s’il ne possède pas son armée, a des soldats.
La majorité des pays ont une armée, dont le Canada :
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(nom, prénom)
s’est enrôlé dans les Forces canadiennes
En vous engageant formellement à servir Sa Majesté la Reine Elizabeth Deux, Reine du Canada, ses héritiers et successeurs, comme membre des Forces canadiennes, vous avez juré de protéger le Canada, ainsi que ses intérêts et valeurs au pays et à l’étranger. De plus, vous promettez de démontrer des qualités d’intégrité, de loyauté, de courage, d’honnêteté, d’équité et de responsabilité, faisant passer le bien commun avant le bien personnel et personnifiant ainsi les attributs auxquels s’attendent les citoyens du Canada que vous représentez et qui vous font confiance.
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Cet engagement envers son pays n’a rien de déshonorant, bien au contraire. Dès lors, pourquoi le peuple québécois n’aspirerait-il pas lui aussi à être protégé par de loyaux et courageux soldats lui ayant prêté serment? De plus, ces individus, au sommet de leur forme, pourraient prêter main forte aux populations en détresse lesquelles, avec les changements climatiques, se feront de plus en plus nombreuses.
Ce pacifisme duquel se réclament les Québécois, s’étend également à la lutte pour l’indépendance qu’ils ne mènent pas, encouragés en cela par leurs élites politiques qui ont peur des «chicanes» et des «débordements». Le ton, les mots employés s’en trouvent affectés. On parle de «plan de match», de «pédagogie des cœurs», de «devoirs» à faire, des termes aussi inoffensifs les uns que les autres. On ne réclame plus rien, on n’exige plus rien, on demande, on se fait dire non, on s’en revient bredouilles, la queue entre les jambes en pensant que ces refus successifs et humiliants seront la preuve de la nécessité de sortir le Québec du Canada. Cette attitude de chiens battus tend à rendre inutile tout effort de lutte. Les gens ne manifestent plus dans la rue, ils ne votent plus, convaincus qu’ils sont que «ça ne donne rien».
***
En affirmant que la monarchie est «dépassée», pour se soustraire à la corvée d’aller manifester contre la venue du prince Charles, les chefs et députés contribuent à alimenter le cynisme de la population à leur égard et à décourager toute action politique.
Les fédéralistes usent du même stratagème pour nous faire lâcher prise. Ils estiment que tout ça, la question linguistique, la bataille des Plaines, la séparation du Québec d’avec le Canada, la présence du prince de Galles, c’est du passé. À ce compte, les pays libres ne devraient plus célébrer le jour de leur indépendance, les commémorations de l’armistice ne devraient plus avoir lieu, celles de l’Holocauste non plus.
Pour les Québécois, ces questions seront dépassées lorsque le Québec sera un pays; cependant elles feront toujours partie de leur histoire. En ce sens, les élites politiques et les intellectuels québécois ont failli à leur responsabilité le 10 novembre dernier. Ce n’est pas en vendant des livres et par des conférences sur les gangs de rue ou sur le Québec a-t-il un avenir dans le Canada que l’on fait un pays. En refusant de se mêler aux manifestants en colère, politiciens et grands penseurs ont signifié au peuple qu’ils l’abandonnaient.
Comme le faisait observer une jeune militante, les Québécois réunis devant la caserne du régiment The Black Watch, avec des cris pour seule arme, faisaient penser aux Canadiens-français se mesurant aux soldats britanniques engoncés dans leur costume d’apparat et armés jusqu’aux dents. La présence policière déployée renforçait ce sentiment. On dénombrait autant, sinon plus, de policiers que de manifestants. Si quelqu’un avait ordonné de faire feu, ils l’auraient fait. Notre argent sert aussi à ça.
Plus tôt dans la journée, John James Charest avait serré la pince du prince et lui avait remis un coffret de films dvd québécois qui contenait des classiques de notre cinéma dont, parions-le, «Tiens-toi bien après les oreilles à papa», «Roch et Belles Oreilles», «Le Survenant», «J’ai mon voyage», «Les Bons débarras», «Octobre» et «15 février 1839». Face au prince, Gérald Tremblay étalait lui aussi sa fierté de coq. On se demande comment aurait réagi Louise Harel à cette visite si elle avait été élue le 8 novembre…
Aux abords de la rue de Bleury, où se déroulait la manifestation, des gens attendaient l’autobus, se promenaient, mangeaient au restaurant, prenaient un verre. À l’exemple de Gilles Duceppe et Pauline Marois, ils avaient d’autres chats à fouetter que de se battre pour leur liberté. Ils n’étaient pas davantage au rendez-vous de la rue pour dénoncer le dernier jugement en date de la Cour suprême canadienne sur le français au Québec. Ils ne sont pas allés à la Caisse de dépôt. Les politiciens déteignent sur la population. Le gris est notre couleur nationale.
La liberté c’est du passé. En plus, c’est trop violent. Surtout pas de débordement. Plutôt mourir à petit feu. Ça paraît mieux.

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Caroline Moreno476 articles

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Château de banlieue

Mieux vaut en rire que d'en pleurer !


Chapitre 1
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Chapitre 3
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6 commentaires

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    13 novembre 2009

    Mme Moreno,
    Permettez, une brève réponse à Monsieur Lerouquin,
    Comme sympathisant (par les bottines et par les babines) du RRQ, je comprends votre sens de l’abandon de la part des Québécois. Vous soulignez leur manque d’amour pour le pays. Or, pour les Québécois d’expression française, le pays, c’est une abstraction. Nous vivons réellement dans une colonie britannique depuis 250 ans! Quand nous nous dressons pour revendiquer notre différence, nous ne sommes, aux yeux du pays qui nous délivre un passeport, que des RÉSISTANTS…
    Nous pouvons lire sur la presse britannique ce matin un reportage de notre « accueil » au Prince devant les Black Watch :
    Daily Express | UK News :: Protesters bring chaos to Charles and Camilla’s Canada tour
    On peut y lire les commentaires du public, tous méprisants. Se gaussent : « Ces gens parlent français dans un pays anglais, conquis sur les Plaines d’Abraham ; Make sure the brain in engaged before putting the mouth in fonction », éructent-ils.
    Si ça nous met en colère, ça doit aussi jeter de la lumière sur notre action. Le régime fait mine d’accepter dans ses parlements des représentants de cette minorité, mais elle exerce tous ses pouvoirs de bâillon, comme il le fit dès l’Union, dès notre ancêtre Papineau et ses 92 résolutions qui réclamaient représentation égale à la taxation. On sait comment on traita les Patriotes. La même menace plane toujours sur les élus de complaisance. À la longue, le peuple laborieux finit par en prendre son parti et se replie ou s’assimile.
    La tâche du RRQ est donc de rappeler à ceux qui ne veulent pas se coucher qu’il y a un autre moyen de s’exprimer. L’action massive. Le régime ne nous laissera rien d’autre que ce que nous prendrons par notre action populaire. Si nous avons compris que le vote est inutile, nous devons comprendre que la désobéissance aux ordres est à notre portée. Devant les Black Watch, nous avons fait la preuve que la résistance pacifique de 300 Québécois insoumis peut enrayer l’engrenage de la Couronne britannique. Imaginez que le peuple ait vu ça à la télé… que ça leur donne des idées…la boule de neige, on connaît… Pour plus d’info, amenons des voisins aux exposés de lundi prochain (Musée pour rire) à propos de la récente agression de la Cour Suprême Royale sur notre langue. Nourriture pour l’esprit en attendant la prochaine invitation du RRQ : 500 Québécois dans la rue ?

  • Frédérick Millette Répondre

    13 novembre 2009

    J'aimerai commencer mon texte en remerciant Caroline Moreno ainsi que
    Bernard Desgagné. Merci, merci beaucoup à vous deux d'avoir su
    reconnaître le travail difficile du RRQ, car rares sont les gens qui osent
    nous appuyer ouvertement. En effet, il est difficile, voire même pénible,
    parfois d'oser se lever et de manifester son désaccord pour contrer la
    décrépitude grandissante du Québec actuel et de faire face à l'indifférence
    de son propre peuple.
    Cette indifférence grandissante provient de nos politiciens qui sont supposé être au parlement pour protéger nos acquis et nos droits et qui finalement ne font rien, ne lève pas le petit doigt,
    regarde de haut ceux qui osent, ceux qui en ont assez de rester assis sur leurs divans et de chialer en se disant : « Bah à quoi bon! » Au lieu de nous appuyer, ils nous traitent avec mépris et les médias se précipitent aussi tôt pour nous faire passer pour des fanatiques ou des terroristes. Comment voulez-vous ne pas parfois être découragé?
    Est-ce criminel que d'aimer son pays, d'oser utiliser son droit d'expression pour défendre le peu qu'ils nous restent pendant que la plupart des Québécois sont trop blasés ou trop
    flancs mous pour oser agir? La preuve : la loi 101 est encore charcutée et les gens se disent : « Fais comme le bon peuple et tais-toi!» Peu à peu, si on ne fait rien, le Québec mourra. À qui en reviendra la faute? Les fédéralistes certes, mais en grande partie celle des Québécois de par leur
    inaction.
    La visite du prince Charles n’a pas soulevé beaucoup de passion lors de sa visite à Montréal. Pourquoi? Parce que les gens ne se reconnaissent pas en cette institution : pour nous la monarchie britannique est le souvenir de notre asservissement. Les gens vont-ils descendre pour autant dans la rue pour montrer leurs désaccords? Ben non voyons! Ils travaillent, il fait froid dehors, les manifestations c'est pour quand tu es jeune et ou étudiant car eux ils sont adultes maintenant, ils ont des obligations bien plus importantes que de sauver leur honneur. Après tout, on est en récession, un bungalow et une voiture ne se payent pas tout
    seul. Force est de constater qu'un Québécois moyen n'est fièrement Québécois
    que le 24 juin (et encore), le reste de l'année il se plaint.
    Moi aussi je travaille, moi aussi j'ai des obligations familiales mais j’étais présent malgré tout. Je l’aurais été sous la pluie, le vent, la neige, car MOI je me lève et crie haut et fort ma colère, non seulement envers nos ennemis mais envers mon propre peuple.
    Québécois(es) resterez-vous éternellement assis sur votre derrière pendant que l'avenir de votre pays se décide sans vous?

  • Archives de Vigile Répondre

    13 novembre 2009

    Autre petit commentaire.
    Si le député voulait dénoncer la monarchie, il n'avait qu'à se trouver dans la rue, à Montréal, à côté de ceux qui l'ont fait bravement, visière levée.
    Une fois de plus, je le croirai sincère,s'il descend dans la rue et démissionne de son poste. On ne peut pas, une autre fois, servir deux maîtres.
    NT

  • Archives de Vigile Répondre

    13 novembre 2009

    Je connais très bien de le député provincial de Matane. Lors de sa première élection, il s'est moqué de son serment d'allégeance à la reine d'Angleterre. La dernière fois (2008), il a été plus sérieux. On l'avait sans doute averti.Comme d'autres de son genre qui avaiennt fait de leur serment, en 2007, une bouffonnerie.
    Lorsqu'on fait un serment à la reine, ou à tout autre personne, on doit le respecter. Sinon, le serment n'a plus de sens. Ça fait partie des incongruités de notre société de dire qu'on jure et qu'ensuite, on s'en moque.
    On se moque de tout aujourd'hui, y compris de ce qui est fort sérieux, comme un serment, par exemple. Les jeunes qui regardent cela, et à qui on demande de respecter les institutions, doivent trouver ces gens-là bien peu sérieux.
    Si le député provincial en question est sérieux dans sa dénonciation de la monarchie britannique, qu'il démissionne de son poste car, il ne peut servir deux maîtres. Je le croirai sincère, le jour où il quittera son poste de député qui demande l'allégeance à la Couronne pour défendre ses idées dans la rue. A ce moment-là, je commencerai à comprendre qu'il est conséquent dans sa démarche.
    Il ne quittera pas son poste. Tout cela, pour moi, est de la comédie. Du théatre. Du...
    Il m'avait dit en 2003, dans ma bibliothèque, en compagnie de ma femme, qu'il allait au PQ pour le réformer. Je pense maintenant que c'est le PQ qui l'a déformé.
    NT

  • Caroline Moreno Répondre

    12 novembre 2009

    Félicitations au RRQ !

  • Archives de Vigile Répondre

    12 novembre 2009

    En effet, le député de Matane, il a dû se dépêcher à lire son bout de papier séditieux, avant que la Mère Supérieure Marois ne le gronde sévèrement. Il n’y a plus de doute, nous avons mordu trop longtemps à leur hameçon : nous avons élu des souverainistes fantoches. Il n’y a pas si longtemps, quand nous avons eu sur Vigile, le projet d’UNIR tous les indépendantistes du Québec pour rédiger un vrai programme indépendantiste pour la prochaine élection, nous avions déjà renoncé à convaincre la chef. Nous avions cependant proposé de récupérer les éléments encore sains(dont Bérubé?) dans le parti qui siège sous fausse représentation à Québec, pour les inviter dans la coalition. Ce regroupement des forces vives aurait enjoint à l’élue d’y acquiescer ou de démissionner. C’est le moins qu’on puisse faire actuellement pour éviter ce que vous dites : mourir à petit feu(la grenouille dans la marmite).
    Mais les 300 Québécois qui ont pris goût à se frotter aux robots, devant les Black Watch, ne s’arrêteront pas. Et ils font des petits. Il a suffi qu’on morde le jarret d’un gros goret pour qu’on nous montre dans les médias du monde. Quand t’as 20 ans, ça aiguise l’appétit. Des jeunes n’ont pas apprécié non plus de voir ces zombies aux yeux de poisson mâcher leur smoke meat en nous entendant gueuler… L’humiliation ne sied pas aux âmes bien nées. Les organisateurs du 10 novembre aussi contrôlent de mieux en mieux la désobéissance civile, la résistance pacifique. Ils en redemanderont et agrandiront leurs rangs. S’il faut dix ans, ils les prendront. Si nous nous usons, nous pouvons encore servir pour répondre aux éteignoirs. J’ai confiance de ne pas avoir écrit dans le vide quand j’ai expliqué aux bavards que les symboles monarchiques ne sont pas que décoratifs, mais hochets pour nous faire oublier que les juges de la Reine (Cour Suprême) nous frappent tous les jours en vue de l’extermination. Envoyé à Gilles Proulx, Denise Bombardier, Richard Martineau, Sylvain Racine. Peut-être qu’ils ne lisent tout simplement pas en dehors de leurs téléprompteurs assimilateurs…