Affaire Bourgeois - Le Québécois

Perspectives nouvelles de l'indépendance

Dépasser la hargne et le ressentiment

Chronique de Gilles Verrier

Patrick Bourgeois écrit : « Désormais, laissons en arrière ceux qui refusent la lutte. On ne peut forcer personne à entreprendre les combats que la base militante devra mener. Cette lutte en effraie plus d’un. Et nous devons l’accepter. L’accepter pour mieux trouver ceux qui sont prêts à ne pas plier face à nos ennemis les plus redoutables. Si l’on veut un jour obtenir la victoire, (…) et travailler ensemble. Les militants feront le pays. Il n’y a qu’eux qui sont suffisamment libres pour le faire ! »
Cette nouvelle perspective ouverte par Patrick Bourgeois donne la possibilité aux militants qui ne l’auraient pas encore fait de mettre définitivement de coté la hargne et le ressentiment envers le PQ. La hargne et le ressentiment sont la première réaction de ceux qui sont frustrés dans leurs attentes. Or, les attentes formulées envers le PQ de la part des indépendantistes sont tout simplement irréalistes. Demander au PQ de définir un plan d’accession à la souveraineté, lui demander de naviguer comme le vaisseau amiral de la souveraineté, lui demander d’assumer le leadership de cette lutte conduit à un acharnement aussi inutile qu’improductif.
Par exemple, si le PQ a pu reconnaître l’absence de conditions gagnantes, il a amplement montré son incapacité à poser ne serait-ce que la première pierre pour les atteindre. Faut-il s’en étonner ? Non, et pour le comprendre il suffit de revenir à la nature même d’un parti politique constitué selon nos mœurs électorales. Tout parti regroupe en son sein une part de gens sincères et animés par de nobles idéaux mais il attire aussi des gens intéressés d’abord à l’exercice du pouvoir pour lui-même, même s’il est juste provincial. Au fil du temps, tout un appareil argumentaire a d’ailleurs été mis au point au PQ pour justifier l’occupation du pouvoir sans la souveraineté.
Le Parti québécois regroupe ainsi, à l’instar des autres partis, des gens qui y sont par ambition personnelle, des gens qui réprouvent tout engagement trop prenant. Naturellement, le PQ a de tout temps limité les formes de sa lutte politique à la lutte parlementaire. Nous avons la preuve aujourd’hui, si cela était encore nécessaire de la faire, que la lutte parlementaire et l’action politique qui s’y rattache ne suffisent pas pour mener à terme un combat global tel que l’indépendance du Québec. À l’intérieur du cadre restreint du PQ, celui des ambitions parlementaires, la lutte pour l’indépendance s’est avérée impossible à penser dans sa globalité. Elle ne le fut pas. C’est pourquoi la stratégie globale – en tout cas son amorce – peut venir plus facilement de ceux qui sans rejeter dogmatiquement la lutte parlementaire ne s’illusionnent pas sur elle, de ces jeunes militants assez convaincus pour résister avec des moyens atypiques et prêts à consentir des sacrifices que les parlementaires refusent.
Il est désormais acquis pour un nombre croissant d’indépendantistes que, en pratique, le vaisseau amiral se constitue hors du PQ et possiblement hors de tout parti politique. Ce n’est que lorsque le mouvement populaire sera puissant, aguerri par des batailles atypiques mais strictement légales et non violentes, batailles qu’il faudra inlassablement expliquer en mettant graduellement sur pied des moyens de communication de masse, que nous nous rapprocherons des conditions gagnantes. Lorsque le fruit aura suffisamment mûri, grâce ou en dépit de certains partis politiques, ces derniers, pressés par l’opinion publique, voudront alors cueillir opportunément ce beau fruit pour nous accompagner dans le dernier droit menant à l’indépendance.
Le mouvement indépendantiste non partisan n’est certes pas dans la stratégie du PQ, mais le PQ – et les autres partis nationalistes – ne pourront résister longtemps à l’influence du mouvement de résistance si celui-ci réussit à faire bouger en sa faveur, par l’audace des gestes et de la parole, une opinion publique d’apparence inamovible.
Gilles Verrier

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Gilles Verrier140 articles

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Entrepreneur à la retraite, intellectuel à force de curiosité et autodidacte. Je tiens de mon père un intérêt précoce pour les affaires publiques. Partenaire de Vigile avec Bernard Frappier pour initier à contre-courant la relance d'un souverainisme ambitieux, peu après le référendum de 1995. On peut communiquer avec moi et commenter mon blogue : http://gilles-verrier.blogspot.ca





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4 commentaires

  • Rodrigue Larose Répondre

    23 février 2009

    Inspiré par l'attitude de Patrick Bourgeois lui-même, le ton posé de votre intervention incite à la modération dans les jugements portés sur les souverainistes mous. Ils sont disséminés un peu partout, même au gouvernement. Mais, on ne pourra faire l'indépendance sans eux. Continuons le combat tous ensemble.

  • Archives de Vigile Répondre

    23 février 2009

    Oups! Je parlais de ceux-celles qui ne signent pas leur propos...
    Le premier message est de moi.
    Nicole Hébert

  • Robert Bertrand Répondre

    23 février 2009

    Pour la première fois, il y avait une séquence d'échanges avec Madame Nicole Hébert qui nous conduit vers celle-ci qui devient l'aboutissement logique pour répondre aux besoins actuels de notre temps.
    Je dis OUI. Voilà un cheminement qui est parti et qui doit se poursuivre.
    On ne peut s'attendre à moins que rien de notre Assemblée nationale actuelle puisque tous les votes à l'unanimité n'ont strictement rien donné.
    L'Assemblée nationale, présentement, face à Ottawa, n'a aucune valeur de poids politique parce que divisée sur le fonds : le Pays du Québec, l'État du Québec. Cette Assemblée nationale est devenue, aux yeux de nos adversaires, une grande municipalité qui attend des ressources de l'extérieur alors que tout est sous nos pieds. On vit dans un PAYS EN ATTENTE.
    L'Assemblée nationale actuelle est seule, elle est déconnectée de la base, déconnectée du peuple. Il faut se l'admettre les décisions de l'Assemblée nationale à l'unanimité vallent encore moins qu'un groupuscule qui travaille avec ses membres.
    Il y a une lumière étincelante actuellement : elle est entre les mains du seul journal papier vraiment voué à l'Indépendance du Québec. Les responsables travaillent depuis des années avec leurs membres qui sont virtuellement connectés pour le Pays du Québec.
    Merci à vous Monsieur Verrier d'en faire état. J'appuie volontiers vos propos :
    « ...le vaisseau amiral se constitue hors du PQ et possiblement hors de tout parti politique. (...) Lorsque le fruit aura suffisamment mûri, grâce ou en dépit de certains partis politiques, ces derniers, pressés par l’opinion publique, voudront alors cueillir opportunément ce beau fruit pour nous accompagner dans le dernier droit menant à l’indépendance. »
    La constitution américaine ne débute-t-elle par par ces mots :
    « NOUS, LE PEUPLE »
    Puisque la voix de l'Assemblée nationale ne porte plus, c'est la voix de « NOUS, LE PEUPLE » qui fera avancer les choses.
    Robert Bertrand, rédacteur,
    Québec un Pays

  • Archives de Vigile Répondre

    23 février 2009

    Monsieur Verrier,
    J'aime tellement l'ensemble de votre propos. Mettre enfin de côté la hargne et le ressentiment! Des boulets, que traîne tout le Mouvement souverainiste ou indépendantiste. Nous n'avons pas de temps pour cela! Nous sommes un bon nombre à croire au PQ, que les autres ne peuvent balayer du revers de la main avec mépris. D'autres préfèrent d'autres partis. Bon!... Soyons des alliés, malgré nos divergences. Travaillons ensemble. Je crois qu'un parti politique est un contenant et que s'il est confondu avec le contenu, il y a méprise. Si le contenu est tiède et attentionniste, le contenant n'a aucun sens. Dans l'exemple de Patrick Bourgeois, le PQ a suivi. Une barque suit le courant d'une rivière et si elle doit avancer à contre courant, ça ne va pas! S'il n'y a pas de courant non plus. Je pense à la pétition de Bourgeois. Tous ces noms... Avec quelques propos haineux à travers venus, je crois, non pas des souverainistes mais des frustrés ou des "jem'enfoutistes" n'osant même pas signer leurs propos.