Non, je ne voterai pas cynique...

La vision étriquée du néo-libéralisme que pratique le PLQ nous conduit tout droit à la catastrophe.

Tribune libre 2008


C'est bien beau de penser qu'il faut voter pour les libéraux parce qu'ils semblent avoir plus de chance d'avoir une majorité, mais c'est encore plus important de choisir le genre de gouvernement qu'on veut. Il faut réfléchir à ça plutôt que de voter pour celui qui ment le mieux.
Je viens de regarder le débat. Ce qui me frappe le plus, c'est que Jean Charest a refusé de parler de son propre bilan. Il a surtout refusé de parler des résultats de la Caisse de dépôt et placement (CDP). Il a prétendu que les gouvernements ne doivent pas se mêler de la façon de fonctionner de la CDP pour justifier son refus de divulguer les résultats. La suite vous démontrera qu'il a fait le contraire de ce qu'il dit.
On dirait qu'on a tous oublié qui a inventé la CDP et quel gouvernement lui a fait connaître son plus grand essor.
C'est un fonctionnaire de l'État, appelé Jacques Parizeau, qui a proposé au gouvernement de Jean Lesage de créer un outil financier pour gérer les fonds de pension des employés de l'État et tout l'argent mis dans le Régime des rentes du Québec. C'est finalement sous le gouvernement de René Lévesque que Jacques Parizeau, devenu ministre des finances, a pu mettre en oeuvre son idée d'utiliser la CDP pour, à la fois, gérer prudemment les actifs de la Caisse par des investissements judicieux et utiliser une petite partie pour aider des milliers d’entreprises à se développer et créer des emplois .
Nos entreprises québécoises, soit dit en passant, ont toujours eu de la difficulté à obtenir du capital de risque parce que les gestionnaires privés de nos propres fonds de pension, de notre propre argent, ont toujours préféré investir ailleurs qu'au Québec. Il a fallu Jacques Parizeau et le PQ pour croire que nos économies pouvaient aussi servir notre propre développement économique.
Quand on a des milliards $ en jeu et qu'on investit de façon prudente, il est possible de faire quelques erreurs, mais si les bons coups sont plus nombreux, on finit par être gagnant. C'est ce qui s'est passé pendant les 18 ans de gouvernement du Parti Québécois. Et pendant cette période, les actifs de la CDP ont fait un bond énorme, ainsi que l'économie du Québec qui a pu compter sur la vitalité exceptionnelle de la petite et moyenne entreprise auxquelles les mesures économiques mises en place par le PQ ont été extraordinairement profitables. Les actifs de la CDP en 1976, à l'arrivée du PQ, étaient de 5 milliards $, en 2003, ils étaient de 139 milliards $. Heureusement, pendant les neuf années du gouvernement libéral, de 1985 à 1994, la CDP a pu continuer de jouer le rôle que lui avait destiné le PQ de sorte que ses actifs ont continué de croître tout en appuyant les entreprises d'ici.
Malheureusement, à l'arrivée de Jean Charest qui, il ne faut pas l'oublier, était un conservateur qui aspirait à devenir le premier ministre du Canada, le parti libéral a adopté le néo-libéralisme à l'américaine où régnait une pensée magique :
"Laissez faire l’entreprise privée, elle gère tout mieux que l’État!"
Arrivé au gouvernement en 2003, Jean Charest s'est donc empressé de transformer le rôle de la CDP et de réduire considérablement les investissements dans les entreprises québécoises parce qu'il n'a jamais cru à l'intervention de l'État dans ce domaine. Il s'est aussi employé à changer la philosophie d'investissement de la CDP pour passer à une gestion dite active et plus opportuniste qui fait beaucoup plus de place à des investissements étrangers et à des types de placements plus risqués comme les papiers commerciaux. La CDP, sous la gouverne de Jean Charest, a troqué la prudence et le souci d'aider nos propres entreprises pour l'appât du gain. Aujourd'hui, on apprend que la CDP aurait été obligée de transformer des pertes sur papier en des pertes réelles afin de réunir les liquidités dont elle a besoin pour payer les pensions et les rentes dues aux citoyens. Comment Jean Charest, qui a ainsi transformé le rôle de la CDP, peut-il prétendre qu'il ne peut pas, aujourd'hui, répondre de sa gestion?
Il y a une différence fondamentale entre le Parti Libéral et le Parti Québécois. Le PLQ pense que l'entreprise privée peut tout faire mieux et qu"il faut donc réduire la taille de l'État, tandis que le PQ croit que l'État a un rôle essentiel à jouer dans certains domaines qui touchent tous les Québécois (santé, éducation, justice, etc). Le PQ croit aussi qu'il nous faut préserver les outils modernes (Hydro-Québec, Caisse de dépôt et placement, etc.) qui ont été créés pour faire avancer le Québec, pas les livrer à rabais à l'entreprise privée (souvent des amis du régime) qui en sortira tous les profits possibles avant de les laisser décrépir. Car elles ne sont pas nombreuses les entreprises privées qui survivent plus d'une génération. Nos cycles économiques sont d'ailleurs fortement liés à ce phénomène.
Ça ne veut pas dire que l'État doit être dépensier. Au contraire, on se rend compte qu'un état moderne doit aussi être efficace et qu'il doit utiliser les meilleures méthodes de gestion. Mais pour qu'un État se transforme ainsi, encore faut-il qu'on y croie, en cet État. Ce qui n'est manifestement pas le cas du PLQ ou de l'ADQ.
Le PQ, avec Bernard Landry, a toujours joué un rôle proactif dans l'économie, c'est à dire qu'il indiquait certaines voies prometteuses et qu'il invitait ensuite les entreprises privées à s'y engager. Le PLQ, quant à lui, s'en est trop souvent remis au seul bon vouloir des entreprises et il a toujours cru qu'il suffisait de baisser les impôts pour que l'économie se mette à progresser de façon magique.
Le gouvernement du PQ n'a jamais pratiqué le dirigisme. Il a plutôt joué le rôle de visionnaire en vantant les qualités des entreprises et des travailleurs d'ici et en réussissant à attirer au Québec bon nombre de grandes entreprises internationales en même temps qu'il mettait en place des programmes créatifs qui ont permis l'essor de nos propres entreprises.
La vision étriquée du néo-libéralisme que pratique le PLQ nous conduit tout droit à la catastrophe. C'est cette vision qui a prévalu depuis trop longtemps aux États-Unis. On peut en voir les résultats aujourd'hui. Une étude récente vient de démontrer que le rêve américain n'est plus possible aux États-Unis à cause de la trop grande différence de revenus entre riches et pauvres. Cette même étude révèle que c'est plutôt en Suède et dans les pays nordiques que le rêve américain est en train de se concrétiser. Des pays qui croient dans les vertus de la sociale-démocratie et dans la solidarité sociale.
En passant, le rêve américain, c'est de croire qu'on peut s'élever dans l'échelle sociale par son travail!
Il n'y a qu'une façon de passer à travers des crises comme celle qui nous attend : c'est de faire appel à la solidarité et à la créativité de tous. "Le riche marchand qui n'a plus de client tombera lui aussi!"
Il ne faut pas laisser s'effondrer l'ensemble de nos activités sociales, économiques, culturelles ou communautaires. Il ne faut pas laisser tomber les moins favorisés d'entre nous. Nous en bénéficierons tous.
Si vous croyez encore que les libéraux gèrent mieux l'économie, allez-y.
Cordialement,
André Kahlé, ing.

Brossard
PS : Je n'ai pas parlé d'indépendance, mais imaginez quel impact cela pourrait avoir, un chantier où l'on construit un pays.


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