Joseph Facal n'a jamais hésité à défendre vigoureusement ses opinions, qu'elles plaisent ou non. La controverse semble même lui procurer un certain plaisir.
Au printemps 1999, il s'était attiré les foudres de Lucien Bouchard, qui l'avait rabroué en plein conseil national, quand il avait défendu l'approche «gradualiste» vers la souveraineté, qui constituait une forme d'étapisme revu et corrigé par l'ancien président de la SSJB Guy Bouthillier et le politologue Denis Monière.
Devant les membres de l'Action nationale, il n'allait certainement pas atténuer son plaidoyer en faveur d'une pause dans la quête de la souveraineté, en attendant que les Québécois décident de «se remettre en mouvement».
Qu'il se joigne ou non à un nouveau parti dirigé par François Legault, M. Facal représente un courant de pensée auquel adhèrent bon nombre de souverainistes «lucides» qui constatent que le projet souverainiste est dans l'impasse.
Les fédéralistes qui craignent de pactiser avec le diable auraient tout intérêt à se joindre au mouvement. M. Facal croit sans doute sincèrement que «l'appétit vient en mangeant», mais c'est loin d'être évident. Si, contrairement à ce qu'ont toujours soutenu les souverainistes, il est possible de faire valoir nos «formidables atouts» et de redresser les systèmes de santé et d'éducation dans le cadre fédéral, les Québécois pourraient très bien être rassasiés.
Stéphane Dion a toujours présenté la Charte de la langue française comme une grande loi canadienne qui démontrait que le français pouvait s'épanouir au sein de la fédération. Depuis des années, la population assiste même à son érosion dans la plus grande indifférence.
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M. Facal connaît trop bien Mme Marois pour penser qu'elle se lancera tête baissée dans un référendum perdant. Mais il sait aussi que les éléments les plus pressés du PQ la forceront à garder la porte ouverte et il craint non sans raison que la société québécoise tout entière soit condamnée à demeurer sur un qui-vive paralysant.
La lettre d'une cinquantaine de jeunes militants que Le Devoir a publiée dans son édition d'hier n'est pas de nature à rassurer ceux qui partagent cette crainte. Même si aucun poids lourd du PQ n'a voulu y apposer sa signature, plusieurs députés partagent la méfiance des jeunes envers le «plan Marois», qui s'apparente dangereusement à une tentative de renouvellement du fédéralisme ou, au mieux, à une perte de temps.
À six mois d'un congrès où Mme Marois devra se soumettre à un vote de confiance, la menace est transparente, quoi qu'en disent les auteurs de la lettre: «Si la chef du Parti québécois veut continuer d'associer son leadership à la poursuite et à la défense de cet objectif, de ce plan Marois, c'est son droit le plus légitime. Les militants devront quant à eux tirer leurs conclusions...»
Depuis la fondation du PQ, les débats sur la définition de l'article 1 du programme et sur le leadership du chef ne font qu'un. Ceux qui craignaient la disparition des «caribous», qui donnaient déjà des cauchemars à René Lévesque il y a plus d'un quart de siècle, peuvent être rassurés: ils se reproduisent de façon remarquable.
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Il est un peu curieux de lire sous la plume des jeunes contestataires que l'ABCD de la souveraineté, c'est-à-dire la tournée de conférences des députés Jean-Martin Aussant, Yves-Francois Blanchet, Alexandre Cloutier et Bernard Drainville, «est sûrement la démarche la plus intéressante entreprise au PQ depuis des années». Pourtant, dans leur présentation, ces députés s'emploient à faire la promotion du «plan Marois». Est-ce bien le plan ou plutôt la chef qui fait problème?
Les auteurs de la lettre soulignent également «la force et la détermination» avec lesquelles Gilles Duceppe affirme sur toutes les tribunes que le Québec n'a plus rien à attendre d'Ottawa, alors que Mme Marois entend placer le rapatriement de pouvoirs au centre de la «gouvernance souverainiste». Pourtant, en juin dernier, le chef du Bloc déclarait que c'est «la bonne stratégie» à adopter. Quand et pourquoi a-t-il changé d'idée?
La présidente du Comité des jeunes du PQ, Christine Normandin, a déploré hier que les contestataires aient choisi d'exprimer leur point de vue dans les médias plutôt que dans les instances du parti. Devinez pourquoi!
Les opposants à Mme Marois sont certainement minoritaires, mais elle aurait tort de les prendre à la légère. Si tous les membres du parti étaient invités à se prononcer sur son leadership, elle n'aurait aucun problème, mais un congrès péquiste est toujours une boîte à surprise. En 2005, à peine quelques dizaines de voix ont fait la différence entre un confortable 80 % et un fatidique 76 % qui a entraîné le départ de Bernard Landry.
Erratum
Quand j'ai rédigé ma chronique de samedi dernier, je n'avais pas pris connaissance du rectificatif publié sur le site vigile.net, qui avait erronément attribué au député péquiste de Lac-Saint-Jean, Alexandre Cloutier, la paternité d'un texte dans lequel un de ses homonymes plaidait en faveur du référendum d'initiative populaire. Je remercie les lecteurs qui me l'ont signalé et je présente toutes mes excuses à M. Cloutier.
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mdavid@ledevoir.com
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