Défendez-vous, Pauline Marois

Tenez bon Pauline Marois. Tout un électorat vous juge dès à présent. La bataille est déjà commencée.

Pauline Marois - entre urgence et prudence

Le P.Q. est à la croisée des chemins, et toute sa péquisterie (référendaire) est devant un terrifiant dilemme : un troisième référendum, un troisième de la même sorte que les deux premiers, ne PEUT pas être gagné. Et si tenu, malgré tout, il ne DOIT pas être perdu : les conséquences en seraient trop graves… Ce serait un « pensez-y bien ».
Évidemment, on peut nier qu’il y ait un dilemme. Les souverainistes n’en seraient pas à un premier déni. On peut croire en une victoire référendaire pépère. Cela est réconfortant et parfaitement légitime.
Je soumets simplement que les Québec de 80 et 95 ont disparu. Les deux référendums ont donné une mesure certaine des forces. En 40 ans, les sondages n’ont pas démenti les résultats référendaires. Je soumets aussi que ce n’est pas la souveraineté-association elle-même dans le temps qui fut un truc, mais bel et bien le référendum lui-même. Sans l’idée du référendum, en effet, René Lévesque serait aujourd’hui aussi inconnu du public que son homonyme, Gérard D.
Je soumets aussi—je suis étonné qu’il soit nécessaire de le rappeler si souvent—qu’il y a au Québec une minorité canadian irréductible à toute idée d’indépendance du Québec, à toute idée de la simple affirmation nationale des frenchs, Nous, que cette minorité a pesé lourd lors des deux premiers référendums, et qu’elle a pris du poids depuis 1995. Cette minorité piège la démocratie québécoise, lamine tout mouvement émancipateur, et bloque littéralement notre société. Le P.L.Q. agit pour elle à la manière d’un verrou.

Que faire, qui reste démocratique ?
Même s’il était « gagné », l’obsessif et hypothétique Référendum, tenez, même à 55%--rêvons-- faudrait bien que l’Assemblée Nationale déclare « kekchose », tôt ou tard, « kekchose » de négociable et « kekchose » de non-négociable, pour que « kekchose » soit reconnu, tôt ou tard, par la communauté internationale.
Pas plus Ottawa que la communauté internationale ne demeureraient hypnotisés ou paralysés par un référendum québécois, un troisième… Encore moins ils ne« reconnaîtraient » simplement un « résultat », provenant, lui, d’un référendum unilatéral du Québec. Le gouvernement du Québec ne pourrait pas se promener bien longtemps avec son « score » dans sa poche. Serait rapidement ramené sur terre : « What does Quebec want NOW ? ».Vous voulez « kekchose » ? Dites-le.
Welcome !
Welcome alors dans la Realpolitik des états.
Nous avons pourtant déjà un État. Nous sommes une nation. Ce n’est absolument pas important que notre nation soit déjà reconnue à ce stade-ci de sa libération. Tout le fling flang de Gilles Duceppe à ce sujet ne rime à rien, si ce n’est à se « spinner » lui-même. Il incombe qu’elle se reconnaisse d’abord elle-même, notre nation. Qu’elle s’affirme très solennellement. Ce qui est bien différent que quêter sa reconnaissance à Ottawa auprès des fédéralistes anglophones.
C’est un gouvernement issu d’une Assemblée Nationale, majoritairement souverainiste, à Québec, qui pourrait initier « kekchose », une déclaration solennelle de la Souveraineté de l’Assemblée Nationale. Pas un simple parti à la Chambre des Communes.
Qui d’autre que l’État québécois lui-même, PUISQU’IL EXISTE DÉJÀ, pourrait créer notre État-Nation ? Certainement pas des partis, des mouvements, des lobbys ou des rassemblements « citoyens ». Le gouvernement est au cœur de l’État québécois.
Et cet « État » du Québec, le seul « État » au monde, le nôtre incidemment, serait contraint, lui seul dans tout l’univers —juste-juste-nu’autes, hein! Pôôôv’ti peup, va -- de procéder par l’unique moyen du référendum préalable ? Fermons tout de suite les livres alors, les fédéraux auraient gagné, et demandons à Charest de poster la signature de ralliement du Québec à la « constitution de 82 ».
***
Le P.Q. a un Plan. Un Plan discutable. Mais « Plan » quand même. Un Plan d’État, de Gouvernement, qui ne se cache pas, lui, derrière des artifices et des arguties « citoyens ». Un Plan réaliste qui, pour une fois, va très précisément à l’essentiel : la « faire » la souveraineté. Pas la dire, la rêver, la chanter ou la marcher, LA FAIRE… Mais en face… En face, là, par terre, le P.L.Q. ne propose plus rien, que l’abandon et la reddition. Et ce gouvernement libéral qui râle parlerait pour Nous ?
Il parle, oui, hélas oui, il parle même beaucoup de Nous. Mais ayant déjà épuisé toute sa légitimité, il ne parle plus pour Nous, et devrait se taire.
Qui parle pour Nous ? Car enfin, c’est bien Nous qui sommes au cœur du Projet, si tant il est vrai qu’il n’y en a un !
Qui a le plus peur de Nous ? Non, ce ne sont pas les libéraux. C’est la gôôôche québécoise, celle-là encore largement inefficace. Tout l’arc-en-ciel dominé par le rouge, qui part de Gilles Duceppe, qui passe par le SPQ-Libre, pour aboutir à Françoise David. Cette gauche multiculturaliste, qui voudrait faire croire que l’avenir de notre nation passe par sa dissolution.

Même si les gouvernements libéraux du passé n’étaient pas souverainistes, tant qu’ils le pouvaient, ils essayaient parfois, peut-être et tant bien que mal, de « préserver l’avenir » des Tremblay d’Amérique dans la Fédération. Ce n’est plus le cas. Les libéraux actuels, cette gang… Nous a abandonnés, trahis. Ils ont peur de Nous et peur de tout maintenant, et jusqu'à la clause nonobstant. Des fédéralistes ! C’est pourtant bel et bien des fédéralistes qui ont inventé la clause nonobstant! Ont peuuur aussi les libéraux! Et ils voudraient bien qu’on ait peur avec eux, mais pour d’autres raisons.
La législation canadienne, la loi Dion, celle des libéraux et de tous les fédéraux, sur la Clarté en tout premier lieu, (ainsi que le jugement de la Cour Suprême sur l’obligation de Négocier) sont des items déjà connus et accessibles aux capitales du monde.
Ces lois et jugements font DÉJÀ partie des pratiques diplomatiques à l’égard de la souveraineté canadienne. Ils ne sont pas oubliés. La diplomatie a justement pour caractéristique d’avoir la mémoire très longue. Sélective, mais longue. Au surplus, on peut compter sur Ottawa pour qu’il rappelle à intervalle qu’il ne tolèrerait aucune ingérence extérieure lors de la tenue, avant et surtout après, la tenue d’un très hypothétique référendum gagnant québécois.

C’est bien d’ailleurs cette quasi-doctrine qu’est venu affirmer reconnaître le président Sarkozy —cela est apparu comme une trahison par les souverainistes-- lorsqu’il est venu affirmer que « le monde n’avait surtout pas besoin de divisions supplémentaires ». Le Canada avertissait là que son contentieux avec l’État québécois était une affaire « interne ». Et le président Sarkozy, oui-oui, le président de la France, s’est incliné. L’État français s’est donc incliné poliment devant l’État canadien.
Mais il ne s’est pas incliné pour toujours… Le président français et la diplomatie française étaient et sont dans la Realpolitik et les RAPPORTS DE FORCE. Cela existe.

L’idée du référendum n’est plus dans la Realpolitik— cependant, elle l’a déjà été— elle est maintenant dans un cul-de-sac.
Et ce n’est pas parce qu’un chef du P.Q.—quel qu’il soit par ailleurs—écrirait 100 fois dans le Programme du Parti « nous allons tenir BIENTÔT mes amis, TRÈS BIENTÔT, un référendum » que quelque chose serait changé au dilemme. La réalité est bien plus têtue que tous les péquistards du référendum. Ce qu’il faut —il le fallait déjà, il le faudra bien d’ailleurs, puisque l’idée du référendum opère désormais et depuis déjà un certain temps dans une nouvelle réalité, pas très fantaisiste, dans un contexte politique et juridique totalement différent de ceux de 80 et 95 -- c’est changer le moyen, s’y prendre autrement, le modifier et l’ajuster en cours de route, sans changer la fin. Rester fidèles et livrer bataille… pas livrer encore une messe référendaire. Ou plutôt la messe après la bataille. Cela fait si longtemps que les souverainistes ne se sont pas battus, mais battus… Ils auraient bien plus « de chien » qu’ils ne le croient ! Et puis rester démocratiques, certes, certes et re-certes… mais… mais pas plus que ce qui est requis et nécessaire.
Assurément, cette proposition de tenir « bientôt » référendum ne convaincrait pas l’électorat aux prochaines élections —une distraction parfaitement inutile, qui pourrait même avoir un effet repoussoir profitable aux libéraux, à la recherche qu’ils sont de la moindre bouée— tout au plus, (cela en vaut-il tellement la peine?) cela rassurerait parmi le mince électorat militant, parmi lui cette minorité active et supposément inquiète, mais déjà convaincue par ailleurs. Alors… Alors que le temps presse…
Alors Wake up P.Q. Sors du sac !
Sors de l’enfermement idéologique auquel te convie une certaine nostalgie ! Sors TRÈS OUVERTEMENT ET RÉSOLUMENT du stratégisme (référendaire) à deux sous, du vieux « comment » de Gilles Duceppe, du vieux « calendrier » de Jacques Parizeau et du ratoureux « bientôt » de Bernard Landry. Tout cela, hélas, mille fois hélas, n’a jamais mené loin.
Tenez bon Pauline Marois. Tout un électorat vous juge dès à présent. La bataille est déjà commencée. Défendez-vous !
Défendez-Nous !


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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    11 novembre 2010

    Salut Marcel Haché
    Avez-vous remarqué que quand il veut nous écoeurer ou nous river notre clou, Jean Charest agace Pauline Marois avec le référendum, sa date, sa question etc.
    Il me semble que le Plan Marois s'oppose à l'idée du: "sans référendum, point d'action indépendantiste possible". L'Etat du Québec existe, il parle en notre nom (sauf quand c'est Jean Charest qui est premier ministre) et il peut et doit agir en notre nom dans l'intérêt du peuple québécois en posant des gestes décisifs sur la loi 101 et le français, sur la laïcité et l'égalité homme-femme, sur la citoyenneté québécoise française et enfin en rédigeant un projet de Constitution.
    Si on a compris votre superbe, excellente et pertinente analyse monsieur Haché, Bernard Landry est à côté de la plaque en voulant un engagement ferme pour un référendum "bientôt" ou "le plus vite possible". Un référendum, semble-t-il, à l'ancienne mode comme les deux premiers. Il y aurait de bonnes questions à poser à Bernard Landry, juste pour savoir s'il a suivi les débats sur Vigile. Il semble que non. Pierre Cloutier pourrait nous aider à comprendre la stagnation de sa pensée. On rappelle son animosité à l'égard de Pauline Marois. Bernard, appliquez votre principe: la patrie avant tout et au-dessus de tout. C'est difficile mais il le faut. Comme l'homme d'Etat que vous voulez être.
    Quant à Jacques Parizeau et Lisette Lapointe, l'idée de mieux se préparer par un Comité de la souveraineté ou autrement, ne remet pas en question le plan Marois.
    J'ai une suggestion pour Pauline Marois en supposant que ses recherchistes font leur travail...et lisent Vigile. Les députés du Parti québécois qui ont attendu les attaques de Jean Charest à l' Assemblée nationale pour connaître l'existence du site Vigile.net sont bien distraits. Si certains d'entre eux lisaient Vigile, ils auraient déjà fait des pressions sur leurs collègues qui ont voté la motion de blâme contre Yves Michaud pour qu'ils reconnaissent leur erreur et regrettent leur geste de moutons. On ne fera pas l'indépendance avec des moutons.
    Ma suggestion: Chaque fois que Jean Charest parlera du référendum, lui rappeler qu'il a déjà dit lors d'un voyage en France que le Québec a toutes les ressources pour devenir un pays souverain.
    Je ne prends pas de chances. J'envoie tout à Bernard Drainville.
    Un détail. Je parlerais plutôt de la loi Chrétien-Dion dite loi sur la clarté. Il y a assez que Chrétien se cache derrière Chuck Guitté, Alfonso Gagliano et tous les autres voleurs y compris le mari d'une vedette de la télévision dans le scandale des commandites et que des juges lui donnent raison. Tout le monde est responsable du scandale des commandites sauf Jean Chrétien. Quelle monumentale farce entérinée par des juges nommés par qui? Ce fut la même chose pour Richard Nixon. Tout le monde autour de lui était responsable sauf lui. Où sont les émules des Woodward et Bernstein au Canada et au Québec? Daniel Leblanc a fait sa part et Ma Chouette aussi.
    Un sujet suggéré aux journalistes d'enquête: Jean Charest et l'argent.
    Voir en priorité Patrick Bourgeois. "La Nébuleuse" - Petit voyage au cœur des relations non recommandables de Jean Charest
    Le Québécois www.lequebecois.org/ jeudi 20 novembre 2008
    Robert Barberis-Gervais, 11 novembre 2010

  • Archives de Vigile Répondre

    11 novembre 2010

    D'accord avec M. Haché, Mme Marois prend un autre chemin que celui de ses prédécesseurs qui ont échoué, afin de ne pas recommencer les mêmes erreurs. Pas bien difficile à comprendre.