Il y a deux ans, quand l'Assemblée nationale avait à l'unanimité rejeté le projet de loi fédéral qui donnait plus de sièges aux Communes à trois provinces, c'était de 22 nouveaux élus qu'il était question. Les 75 sièges du Québec s'en trouvaient affaiblis, avait fait valoir Mario Dumont, qui avait amené le gouvernement Charest à se ranger à son avis.
Le projet fédéral n'a finalement pas été adopté, il a néanmoins cheminé. Le gouvernement ontarien était monté à l'assaut pour réclamer le double des 10 sièges qui lui étaient alors réservés et, en décembre dernier, le premier ministre Dalton McGuinty avait pu annoncer triomphalement à la presse qu'il aurait ses 21 sièges de plus.
C'est ce nouveau projet de loi qui serait maintenant en préparation: et cette fois, ce sont 34 nouveaux sièges qui seraient répartis entre l'Alberta, la Colombie-Britannique et l'Ontario, noyant davantage les élus québécois. La ténacité ontarienne, ponctuée notamment d'échanges de gros mots avec le fédéral, a payé.
Au Québec, cette ténacité n'existe plus. Une fois exprimées les pétitions de principe, on baisse les bras: la Constitution indiffère le bon peuple et embête les politiciens. Mieux vaut constater l'inéluctable: les provinces de l'Ouest grossissent, il faut leur faire de la place; le Québec n'a qu'à faire des bébés ou à retenir ses immigrants s'il en veut autant. Et puis, qui veut encore entendre parler des peuples fondateurs, ce vocabulaire du XIXe siècle qui fait tellement désordre à l'heure de la mondialisation? Soyons modernes: un électeur, un vote, c'est la seule maxime qui compte...
Ce calcul comptable n'a toutefois aucun sens: il n'est appliqué ni pour les Maritimes, ni pour le Yukon, ni pour la Saskatchewan, surreprésentés aux Communes eu égard à leur population. A fortiori, le Québec peut revendiquer des considérations particulières: le pacte confédératif reconnaît la distinction du Québec, qui était, est et restera foyer de la minorité francophone. Le prix du fédéralisme, c'est de protéger notre poids politique tant que nous resterons dans ce pays.
Le projet de loi qui va son chemin est une preuve par l'absurde que ce poids s'étiole: le gouvernement Harper n'a cure de l'Assemblée nationale et, vendredi, le chef libéral Michael Ignatieff s'en est tenu à des généralités. Le gouvernement Charest, lui, ne passera pas à l'offensive, n'échangera pas de gros mots avec Ottawa. Après tout, il n'a plus de Mario Dumont sur les talons. Ni de Benoît Pelletier qui restait ouvert à des revendications constitutionnelles.
Le Québec reste donc dans les limbes de la fédération. Le fruit n'est pas mûr, dit-on, pour discuter Constitution. Cela n'empêche pas la situation de pourrir.
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jboileau@ledevoir.ca
Le Québec aux Communes - Les limbes
Le prix du fédéralisme, c'est de protéger notre poids politique tant que nous resterons dans ce pays.
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