Le putsch

ADQ - les dérives

Il est bien connu que les erreurs les plus courtes sont toujours les meilleures, et il ne reste pas beaucoup de temps à l'ADQ pour corriger celle qu'a été l'élection de Gilles Taillon.
Cela fait du bien de rire un peu à l'occasion, mais les pitreries de l'ADQ ne sont même plus drôles: une course à la direction qui vire au freak show, un chef choisi par Infoman, un président prétendument neutre qui finance un candidat en sous-main, un chef parlementaire amoureux de la vice-première ministre... De grâce, n'en jetez plus!
Ce n'est qu'une question de temps avant que les deux «vieux partis» ne s'arrachent les dépouilles de l'ADQ. En fin de semaine dernière, Pauline Marois a ouvert la porte du PQ à Éric Caire et à Marc Picard. Hier, le premier ministre Charest a nié toute «démarche formelle» visant à débaucher des élus adéquistes, mais cela peut très bien se faire à la bonne franquette.
Selon les informations de mes collègues du Devoir en poste à l'Assemblée nationale, les quatre députés qui n'ont pas encore démissionné s'apprêteraient à demander à M. Taillon de rentrer dans ses terres. En bon français, on appelle cela un putsch.
Même le député de Beauce-Nord, Janvier Grondin, dont l'appui de dernière heure avait été décisif dans la victoire de M. Taillon, en serait venu à la conclusion que son départ est le prix à payer pour l'unité de ce qui reste du parti. Devant une telle unanimité, on voit mal comment il pourrait s'accrocher.
Quand il s'était lancé dans la course, au printemps dernier, son principal lieutenant, François Bonnardel, avait déclaré qu'il allait devoir démontrer sa capacité d'agir en homme d'équipe. Depuis ce jour, il n'a cessé de faire la preuve du contraire.
Ses attaques personnelles contre Éric Caire ne pouvaient que causer de profondes et incurables blessures. S'il est vrai que l'ADQ est sans le sou, son souhait d'assumer aussi les fonctions de directeur général relève davantage de l'homme-orchestre que de l'homme d'équipe.
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Le climat ne serait pas tellement meilleur si Éric Caire avait été élu chef. Avant que M. Taillon et lui ne commencent à s'étriper, il s'en était pris de façon grossière au troisième homme dans la course, Christian Lévesque, qui a semblé être le seul à réaliser qu'il y aurait un lendemain.
Les séquelles laissées par la course n'expliquent cependant pas à elles seules ce qui s'est passé depuis un mois. Entre les deux principaux candidats, il y avait également un fossé idéologique beaucoup trop profond pour qu'une entente soit possible.
Durant la course, M. Taillon avait accusé son principal adversaire non seulement d'être un tricheur, qui avait falsifié son curriculum vitæ, mais également de défendre des positions d'extrême droite invendables au Québec. Inversement, M. Caire et ses partisans ont vu en lui un véritable renégat, qui tournait le dos aux principes fondateurs de l'ADQ.
Même si M. Taillon accepte de s'effacer, le remplacer par son malheureux rival ne réglerait rien, et l'ADQ n'a certainement pas les moyens d'organiser une nouvelle course. La seule solution semble être de s'entendre sur quelqu'un d'autre et de le couronner sans plus de forme.
Dans les circonstances actuelles, le seul qui pourrait faire office de médiateur semble être le député de Chauveau, Gérard Deltell. Son discours au conseil général de mai dernier en avait convaincu plusieurs qu'il ferait un bon chef. Après quelques jours de réflexion, il avait décliné l'invitation, ce qui dénotait un certain bon sens.
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Hier, M. Deltell a refusé de discuter de son avenir politique, mais il compte bien en avoir un. S'il n'envisageait sans doute pas une promotion aussi rapide, il pourrait difficilement refuser de répondre à un SOS aussi pressant, à moins de vouloir enfoncer lui-même le dernier clou dans le cercueil de l'ADQ.
Au cours des derniers jours, le maire de Huntingdon, Stéphane Gendron, a rappelé que son intérêt pour la politique provinciale n'avait pas disparu. Dans un courriel envoyé à mon collègue Vincent Marissal, de La Presse, M. Gendron a prédit, d'ici la fin de 2010, la création d'un nouveau mouvement de droite qui récupéra les restes de l'ADQ. Il n'a pas dit expressément qu'il en prendrait la tête, mais il est permis de croire qu'il serait disponible.
Cette perspective n'est certainement pas de nature à plaire à M. Deltell. Quand il avait été question que le maire de Huntingdon se lance dans la course à la succession de Mario Dumont, il avait clairement dit qu'il ne voyait pas en lui l'homme de la situation, et je doute fort qu'il ait changé d'idée.
Mes excuses
Dans ma chronique de samedi, j'ai reproché à Thomas Mulcair d'être demeuré silencieux après que douze de ses collègues du NPD eurent voté en faveur du projet de loi conservateur qui vise à émasculer le registre des armes à feu. J'ignorais que M. Mulcair était intervenu à deux reprises sur les ondes de la radio. Toutes mes excuses.
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mdavid@ledevoir.com


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