À l’automne 2014, quand Bernard Drainville avait proposé de reporter le référendum au-delà de 2022, faute de temps pour le préparer adéquatement, Jean-François Lisée s’était aussitôt opposé à cette idée. Si la population ne voulait pas de référendum dans un premier mandat, elle ne voudrait pas davantage d’un gouvernement qui le consacrerait à sa préparation. Pourquoi ce qui était une mauvaise idée quand elle a été proposée par M. Drainville deviendrait-il bon parce que l’idée a été remâchée par M. Lisée ?
Bien entendu, libéraux et caquistes se sont empressés de donner raison à Lisée première manière. « Une campagne référendaire de six ans », a lancé François Legault. Le prix de la meilleure « ligne » revient toutefois à Gaétan Barrette, qui a parlé d’un « concours de menuiserie » pour déterminer qui construira le plus beau « casier à homards ». Après tout, le député de Rosemont se réclame de Jacques Parizeau, dont il était le conseiller en 1995. Si le problème n’est pas le référendum, mais le projet souverainiste lui-même, comme le croient les libéraux, l’échéancier que choisira le PQ importe peu.
À la différence de Bernard Drainville, M. Lisée assure qu’il ne puisera pas dans les fonds publics pour faire la promotion de l’indépendance. Cette retenue risque de susciter la méfiance des militants péquistes. M. Parizeau n’avait pas hésité à utiliser l’argent des contribuables pour financer les études Le Hir. Le gouvernement Landry, qui n’envisageait pourtant pas de référendum à court terme, avait consacré 600 000 $ à l’actualisation des études de la commission Bélanger-Campeau en 2002. Pauline Marois aurait aussi utilisé les fonds publics pour confectionner son livre blanc sur l’avenir du Québec.
Nul ne peut douter de l’intarissable imagination de M. Lisée. L’an dernier, il avait fait une série de propositions pour le moins originales dans le but de « refaire fleurir le goût de l’indépendance ». Par exemple, créer un réseau de « Cafés-bistrots de l’indépendance », mettre sur pied une Unité permanente d’idéation indépendantiste créatrice (UPIIC), ou même de former un groupe baptisé Bold Anglos for Independance pour vendre la souveraineté aux anglophones.Sans les ressources de l’État, tout cela sera toutefois bien insuffisant.
Quand elle était chef du PQ, Pauline Marois avait demandé à M. Lisée d’explorer les possibilités d’entente avec Québec solidaire, tout comme Pierre Karl Péladeau en avait confié le mandat à Véronique Hivon. Si cette dernière cherche désespérément à éviter toute déclaration qui pourrait nuire à la « convergence », M. Lisée y a manifestement renoncé.
Françoise David et Andrés Fontecilla l’ont dit sans détour lors de leur passage au Devoir lundi : si l’enjeu de l’élection d’octobre 2018 est simplement de battre les libéraux, il n’y aura aucune alliance possible. Si ce n’est pas pour faire l’indépendance, pourquoi QS devrait-il sacrifier ses ambitions électorales à celles de son principal adversaire ? Il est difficile de prétendre que remplacer le PLQ par le PQ constitue un projet de société.
Les reproches que Mme Hivon a adressés à M. Lisée devraient s’appliquer aussi bien au favori dans la course, Alexandre Cloutier, qui ne semble pas davantage croire à la « convergence ». En annonçant officiellement sa candidature, il n’a pas repris à son compte le constat de M. Péladeau, qui avait accepté la fin du monopole péquiste sur le projet souverainiste. M. Cloutier est plutôt revenu à l’ancienne conception selon laquelle le PQ forme lui-même la « vaste coalition » qui fera du Québec un pays.
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