Langue libérée

Le peuple québécois doit se libérer de cette mentalité de peuple colonisé. Pour ce faire, il doit se libérer point à la ligne.

Le «français québécois standard»


C’est avec beaucoup d’intérêt que j’ai lu la chronique de Gil Courtemanche
publiée dans l’édition du quotidien [Le Devoir parue le samedi 10 novembre.->10237]
Cette chronique se concentrait sur la langue française, que l’on croit être
de bas niveau au Québec. Or, malgré tout le respect que j’ai pour Monsieur
Courtemanche, je me dois de remettre en question certaines des conclusions
de son article.
Avant tout, je tiens à préciser que je me préoccupe aussi de la qualité du
français des élèves et de leurs enseignants, étant moi-même un ancien
étudiant en enseignement. Cela dit, sans vouloir en minimiser
l’importance, le débat sur la qualité de la langue m’apparaît être un faux
débat ou du moins un débat de second ordre. En fait, le français n’est pas
de meilleure qualité qu’il ne le fut à une autre époque. Dans l’article [«
Le français change... et dérange! »->10189] de Monsieur Nadeau et de Madame Barlow,
on apprend par exemple que le français des élèves parisiens d’aujourd’hui
n’est pas meilleur que celui de la cohorte de 1850! Le « bon vieux temps »
où on s’exprimait parfaitement à l’écrit et à l’oral ne serait donc qu’une
illusion. Cette impression voulant que l’on maîtrisait mieux notre langue
il y a quelques décennies serait due au fait qu’autrefois seule une
minorité très douée pouvait mener à terme ses études, alors que ceux qui
formaient la majorité abandonnaient les uns après les autres.
On rate la cible lorsqu’on s’attaque au français. Gaston Miron l’avait
bien compris : le vrai problème au Québec n’est pas le français, mais
l’anglais. Que l’on dise « joual » ou « cheval », tant que l’on ne dise
pas « horse ». Si le joual n’est que du franglais, alors il est
condamnable. Toutefois, le joual n’est pas nécessairement du franglais.
Par ailleurs, n’est-il pas courant d’entendre à la radio des personnes
employant un français soutenu utiliser tout de même des expressions telles
que « mettre l’emphase sur », anglicisme ayant pris la place de « mettre
l’accent sur »? Là est le vrai problème : la soumission de la langue
française à la langue anglaise. Il s’agit d’un problème qui prend
maintenant des horizons internationaux. Même la France, berceau de la
langue de Molière, laisse des mots tels que « e-mail » envahir son
vocabulaire plutôt que d’opter pour « courriel ». Dernièrement, la
Mère-Patrie a même ratifié le [Protocole de Londres->rub579], législation qui met fin
à l’obligation de traduire les brevets en français. Les Murailles de Chine
sont en train de trembler face à l’invasion mongole…
La plus grande victoire de la Conquête aura sans doute été de faire de
nous un « petit peuple », toujours obligé de se prouver à lui-même qu’il
peut être suffisamment civilisé pour être digne des autres nations. Cela
affecte nécessairement ce que nous pensons de notre langue. Pourtant, les
anglophones sont-ils vraiment mieux que nous? Emploient-ils parfaitement
la langue de Shakespeare lorsqu’ils communiquent entre eux via la
messagerie instantanée par exemple? Poser ces questions, c’est y répondre.
Le peuple québécois doit se libérer de cette mentalité de peuple colonisé. Pour ce faire, il doit se libérer point à la ligne.
Maxime Schinck
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --


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