Intersection politique

Robert Bourassa - 10e anniversaire


Robert Bourassa est désormais immortalisé dans le bronze dans les jardins de l'Assemblée nationale. À Montréal, une grande artère portera son nom. Pour réaliser une sorte de rencontre post-mortem de deux hommes dont les routes politiques ont été entremêlées, on a voulu que cette avenue croise le boulevard René-Lévesque.



On peut voir dans cette décision un clin d'oeil amusant, voire un symbole. Pourtant, si Robert Bourassa fut tenté de suivre René Lévesque en 1967, au moment où celui-ci quitta le Parti libéral pour créer le Mouvement Souveraineté-Association, le jeune député de Mercier préféra plutôt oeuvrer au développement du Québec au sein de la fédération canadienne.
Personne ne peut nier que Robert Bourassa fut toujours animé par un fort sentiment nationaliste. Comme bien des Québécois, il fut tenté à certains moments de sa vie de constater que le fédéralisme conduisait le Québec dans un cul-de-sac. Au lendemain de l'échec de l'accord du Lac-Meech, nombreux ont d'ailleurs été les souverainistes qui ont cru qu'il allait les rejoindre. La déclaration faite alors à l'Assemblée nationale -- «Le Québec est aujourd'hui et pour toujours une société distincte, libre d'assumer son destin et son développement» -- les aura trompés quant à ses intentions réelles. Ultimement, il devait refaire le choix fait en 1967.
Comme René Lévesque en 1980 avec son «À la prochaine fois !», Robert Bourassa a voulu aussi entretenir par cette phrase, que l'on retrouve inscrite sur le socle de son monument, l'espoir du changement. Au-delà de l'ambiguïté qu'on peut y voir, elle est signifiante en ce qu'elle affirme clairement que le débat sur l'avenir politique du Québec n'est pas clos et que les Québécois ne sont pas liés par leur statut actuel au sein de la fédération canadienne. Elle est une inspiration aussi bien pour les souverainistes que pour les fédéralistes, du moins pour ceux d'entre eux qui n'acceptent pas l'exclusion constitutionnelle dont le Québec a été l'objet en 1982 lors du rapatriement de la Constitution.
D'avoir ainsi rappelé ces mots de Robert Bourassa à l'occasion de ce dixième anniversaire de sa mort aura permis de réaliser la persistance de l'impasse constitutionnelle. Jean Charest disait jeudi que, «pour nous qui dirigeons aujourd'hui le Québec, cette phrase trace le chemin à suivre», ce qu'aurait aussi pu dire le chef du Parti québécois, André Boisclair.

Quel est ce chemin ? Il est bien sûr différent selon que ce sont les péquistes ou les libéraux qui le définissent. Le premier ministre Charest et son ministre responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes, Benoît Pelletier, veulent pour leur part une «franche reconnaissance» de la spécificité québécoise, selon les mots de ce dernier. On ne peut dire toutefois que l'actuel gouvernement québécois est «pro-actif» pour l'obtenir. Du côté péquiste, le chemin est référendaire. Malgré un niveau d'appui élevé au projet de souveraineté, les Québécois hésitent à assumer ce destin. À l'image de Robert Bourassa, ils sont ambivalents, sinon velléitaires, ce qui permet à des Stéphane Dion de renvoyer dos à dos aussi bien les Benoît Pelletier que les André Boisclair en disant que le Québec et le Canada n'ont pas besoin de revoir leur relation. Malheureusement !


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