Guerre des religions 2.0.

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Antoine Robitaille : un vrai petit Canadien français incapable d'avoir une opinion claire sur un sujet tranché


Un ami français a une expression superbe pour dire qu’il n’a pas arrêté sa position, dans un débat précis : « Ma religion n’est pas faite là-dessus. »


Concernant le projet du gouvernement Legault sur la laïcité, c’est un peu mon cas.


Partout pourtant, on nous somme de choisir entre deux options : être un suppôt d’Adil Charkaoui ou un crypto-membre de la Meute.


La complicité avec l’islamisme radical ou le racisme larvé : choisissez votre camp !


François Legault a beau s’asseoir au bureau du premier ministre, prendre son air le plus sympathique, appeler au calme, le mauvais génie de la polarisation fait son œuvre inexorablement.


Accusations exagérées


Vous êtes sensible à l’idée que la neutralité des employés de l’État en autorité se traduise par un uniforme neutre ? Vous voilà complice de l’oppression des musulmans, voire des actes terroristes à leur endroit !


Dans le sabir de Justin Trudeau, le projet de loi 21, c’est carrément de la « discrimination basée sur la religion ». Quelle pensée informe ; démagogie travestie en tolérance.


Par ailleurs, vous admettez que cette jeune étudiante qui veut devenir policière ferait probablement un bon travail, même si elle continuait de porter son foutu voile.


Et à la petite école, vous vous rappelez qu’une religieuse voilée vous a enseigné. Vous avez le malheur de conclure : « Ça n’a pas fait de moi une grenouille de bénitier, je crois. »


Attention : vous manquez de sens critique contre l’horreur qu’est toute religion ! Contaminé par le « multiculturalisme », vous piétinez les valeurs humanistes de la laïcité et glissez sur la pente que savonnent les imams, les rabbins et les curés les plus rétrogrades !


Dos à dos


Je sais ce que vous pensez, dans chacun des deux camps : qu’il est commode de renvoyer dos à dos, comme je le fais ici, ces pôles exclusifs.


D’un côté vous me dites : « Tu as trop d’amis dans la gauche multiculturelle ! » De l’autre : « Tu ne veux pas décevoir tes amis chroniqueurs "identitaires" nauséabonds ! »


Sur les sujets brûlants d’une époque, je veux bien que parfois, il faille choisir son camp.


Sur cette question, je n’ai simplement pas envie. Pas envie d’embarquer dans cette surenchère de démonisation de l’adversaire ; de sa transfiguration en salaud absolu, déshumanisé. Cette guerre des religions 2.0.


J’aimerais seulement pouvoir choisir le camp de la nuance, de celui qui dédramatise les enjeux.


Peut-être en effet qu’il faut tracer une ligne, après 10 ans de débats. Bouchard et Taylor (avant que ce dernier ne vire sa veste) avaient de bons arguments pour étayer leur proposition d’interdire les signes religieux chez les agents de l’État au pouvoir coercitif.


Mais pourquoi ajouter les enseignants à ce groupe, comme le fait le gouvernement ? Leur autorité n’est-elle pas celle du savoir, avant d’être celle de l’État ?


Ma religion n’est pas faite sur ces questions, vous dis-je. C’est le cas de plusieurs d’entre vous, j’en suis certain.


Espérons qu’on pourra aboutir, collectivement, à une « religion » apaisée.