Dion et le Québec

S. Dion, chef du PLC


La victoire électorale des libéraux fédéraux n'est possible que s'ils réussissent à reconquérir le Québec. Or, Stéphane Dion, le nouveau chef qu'ils se sont donné contre toute attente ce week-end, est profondément impopulaire dans sa province d'origine. Voilà l'équation toute simple que doit résoudre le PLC et qui explique l'état de choc dans lequel se trouvent ses militants québécois.
Est-ce immuable? Stéphane Dion peut-il s'imposer au Québec ou à tout le moins y réduire le niveau d'animosité dont il est l'objet? C'est peut-être possible, du moins en partie, s'il réussit à comprendre la dynamique qui a mené à son impopularité et s'il réussit à mettre en valeur ce que l'on pourrait appeler le "Dion nouveau".
L'hostilité de beaucoup de Québécois à l'égard de Stéphane Dion est un phénomène mesurable, sans doute le mieux symbolisé par les caricatures de Serge Chapleau, qui le représentaient en rat. À quoi tient-elle? Au fait que M. Dion, comme ministre, a combattu avec vigueur les thèses souverainistes. Un combat où il a souvent eu raison, ce qu'on ne lui a pas pardonné. Mais aussi un combat où il a souvent manqué de sensibilité, assez pour qu'il soit perçu comme antiquébécois.
Une image qui s'est incrustée parce qu'il est devenu l'incarnation de la ligne dure du gouvernement Chrétien. Et pourtant, Stéphane Dion, comme ministre, n'était pas un partisan du plan B, n'était pas en faveur de la loi sur la clarté, et avait, à l'égard du Québec, une attitude bien différente de celle de son chef. Mais la vie politique est souvent injuste, et c'est M. Dion qui est devenu l'objet de toutes les rancoeurs que les Québécois pouvaient exprimer à l'égard du gouvernement Chrétien.
Peut-il s'en sortir? Peut-être. Parce qu'il a changé, et que le contexte a changé. Quatre éléments nouveaux peuvent transformer la donne. L'un d'entre eux joue contre Stéphane Dion, deux jouent en sa faveur. Quant au quatrième, on ne sait pas.
Le premier facteur, négatif, c'est que l'image antiquébécoise de Stéphane Dion sera renforcée par la nature de sa victoire. Dans le débat sur la nation québécoise qui a déchiré le PLC, M. Dion avait une position nuancée: même s'il accepte de définir le Québec comme une nation, au sens sociologique du terme, il n'en fait pas une priorité et il refuse d'en faire un débat, ce qui ne l'a pas empêché de voter pour la motion de Stephen Harper. Par contre, son succès dans certaines parties du Canada s'expliquait par son image de dur envers le Québec et sa victoire de samedi tient largement à l'appui des disciples les plus béats de la culture trudeauiste. Ce sera un boulet s'il ne parvient pas à corriger le tir.
Par contre, ce qui aidera Stéphane Dion, c'est qu'il a changé. Son passage à l'environnement, et ensuite cette campagne au leadership, l'ont transformé et en ont fait un politicien plus habile et plus complet. Le citoyen moyen ne s'en est pas aperçu, parce qu'on ne suit pas de très près les campagnes au leadership. Mais il s'agit de quelqu'un qui, sans qu'on y croie, à (sic) réussi à battre des adversaires solides, ce qui dénote une faculté d'adaptation et des talents politiques indéniables. Sa fonction de candidat au leadership l'avait transformé. Son nouveau rôle de chef de parti et de chef de l'opposition permettra sans doute de poursuivre le processus.
Ce qui aidera aussi Stéphane Dion, ce sont ses idées. Il a mené une campagne d'idées, sur un programme et des projets, et c'est là un des facteurs qui expliquent sa victoire. Plus particulièrement, il propose une conception du développement qui associe économie et environnement. On sait que les Québécois sont sensibles à ce thème et que c'est là le talon d'Achille des conservateurs. C'est Stéphane Dion, dont la crédibilité est grande en environnement depuis le sommet de Montréal, qui a le message le plus convaincant.
Le dernier élément, dont les effets sont plus imprévisibles, c'est le style politique de M. Dion, son sérieux, son refus de la politique-spectacle, mais aussi son absence de charme et de chaleur. Ce peut-être (sic) un avantage, parce que la probité, la rigueur, le parler vrai peuvent séduire des électeurs désabusés par la politique.
Mais la raison ne suffit pas. Stéphane Dion ne s'est pas illustré comme un rassembleur naturel. Or, pour gagner, il ne faut pas seulement des idées. Il faut aussi ressouder le parti, former une équipe, stimuler les militants, démontrer que l'on peut diriger un pays. Tout cela, c'est le leadership. Le véritable test sera là.


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    8 décembre 2006

    Vous dites que Dion n'était pas en faveur de la loi sur la clarté! Mais pouquoi diable s'en attribue-t-il encore récemment la paternité ???