Dion doit 50 000 $ à un de ses conseillers à la transition

S. Dion, chef du PLC


par Hugo de Grandpré, La Presse

Le nouveau chef du Parti libéral, Stéphane Dion, a une dette de 50 000 $ envers l'un des deux hommes qu'il vient de nommer pour le conseiller dans la gestion de ses nouvelles fonctions, a appris La Presse.
Rod Bryden, qui fera partie de l'influent comité de transition formé par M. Dion, lui a prêté cette somme durant la campagne à la direction qui a pris fin samedi.
Ancien propriétaire des Sénateurs d'Ottawa, M. Bryden est un bailleur de fonds de longue date du Parti libéral.
Son nom a été mentionné à au moins deux reprises dans le cadre de controverses impliquant le gouvernement Chrétien.
Hier, des membres du gouvernement et de l'opposition sont montés aux barricades, disant que le nouveau chef perpétue la vieille tradition de marchandage d'influence chez les libéraux.
«M. Dion a beaucoup d'explications à fournir», a déclaré à La Presse le président du Conseil du Trésor, John Baird, joint par téléphone en fin de journée. «Visiblement, il ne mentait pas lorsqu'il a dit qu'il a appris la politique de Jean Chrétien», a ajouté M. Baird qui a déposé un projet de loi à la Chambre des communes sur la responsabilité pour améliorer les murs politiques dans la foulée du scandale des commandites.
Rod Bryden et Marcel Massé, président du Conseil du Trésor sous Jean Chrétien, se sont vus confier la délicate tâche de monter l'équipe qui entourera le chef de l'opposition. Les deux hommes doivent donc conseiller M. Dion sur la composition de son cabinet fantôme et l'embauche de ses proches collaborateurs.
Invité à réagir, le porte-parole de Stéphane Dion, André Lamarre, dit qu'il ne voit rien de répréhensible dans cette nomination. «M. Bryden est un homme dont les compétences dans le domaine de la gestion sont reconnues», plaide-t-il.
M. Lamarre précise que le nouveau venu n'est pas rémunéré. Il ajoute que la pratique qui consiste à nommer des organisateurs de campagne pour mettre sur pied un bureau de leader est chose courante en politique. «Il n'y a aucun retour d'ascenseur: il n'est pas payé! Il ne fait qu'analyser les besoins et les ressources du cabinet.»
Rod Bryden, 65 ans, est un homme d'affaires bien connu à Ottawa. Lorsqu'il était propriétaire des Sénateurs, il n'était pas rare de le voir en compagnie de politiciens dans sa loge. En 2000, il avait réussi à convaincre le ministre de l'Industrie d'alors, John Manley, d'investir de l'argent des contribuables dans un programme pour venir en aide aux équipes de la Ligue nationale de hockey. À l'époque, l'affaire avait fait grand bruit et M. Manley, député d'une circonscription de la capitale, avait dû revenir sur sa décision.
En 2003, les deux hommes ont été mêlés à un autre scandale, lorsqu'un quotidien torontois a révélé que M. Manley est intervenu auprès de la CIBC au sujet d'un prêt consenti au club. Le ministre de l'Industrie a été blanchi par le conseiller fédéral en éthique, qui a jugé que l'intervention avait été faite dans le seul intérêt de sa circonscription.
Cette absolution n'a pas empêché Rod Bryden, en 2003, de se placer sous la protection de la Loi sur la faillite après la débandade financière des Sénateurs. Or, en 2004, l'homme d'affaires évitait la faillite en convenant avec ses créanciers de ne rembourser que 600000$ des quelque 60 millions qu'il avait garanti.
Aujourd'hui, M. Bryden est propriétaire de SC Stormont, une firme qui conseille les dirigeants d'entreprise en échange de parts ou d'actions.
«Voilà une illustration parfaite de la relation incestueuse qu'entretient la politique canadienne avec le financement à grande échelle», a commenté hier le député du NPD, Pat Martin. «Personne ne devrait être en mesure d'acheter une élection ou un politicien. Or, ces prêts consentis aux libéraux durant la course au leadership sont l'équivalent de donations corporatives, à mon avis. C'est très dangereux.»
M. Dion, élu chef samedi par les délégués libéraux, a contracté 430 000$ en prêts. Parmi ses autres créanciers, on trouve Stephen Bronfman (50 000$); un francophone d'Edmonton, Marc de la Bruyère (100 000$); et Mamdouh Stéphanos, de sa circonscription de Saint-Laurent (150 000$).


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