Le début de la fin du Canada?

Une veillée d’armes

Indépendantistes 2, fédéralistes 0

Chronique de Louis Lapointe

Les absents ont toujours tort! Tous ceux qui ont condamné la lecture du manifeste du FLQ à l’occasion du Moulin à paroles avaient vraiment l’air fou hier. Les organisateurs ont réussi le coup de maître de transformer une défaite en victoire. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Graeme Hamilton qui l’écrit dans l’édition du National Post de Toronto de ce matin, « No sign french lost Plains of Abraham ». Un succès qui accrédite après le fait la pertinence pour le mouvement indépendantiste d’avoir obtenu l’annulation des festivités organisées par la Commission des champs de bataille nationaux, un organisme fédéral, qui devaient souligner notre défaite sur les Plaines d’Abraham.
Nos opposants fédéralistes ont tenté de minimiser tant bien que mal ce revers qu’ils ont subi l’hiver dernier et qu’ils n’ont toujours pas digéré, en faisant porter l’odieux de l’annulation de la foire qui se préparait sur les Plaines à Patrick Bourgeois et Pierre Falardeau, qu’ils ont accusés d’incitation à la violence afin de noyer le poisson de leur propre bêtise.
Par tous les moyens, y compris les coupures de subventions, ils ont essayé de compromettre les événements de la fin de semaine dernière, reprochant même aux organisateurs de faire l’apologie de la violence en lisant le manifeste du FLQ. Le succès qu’a connu le Moulin à paroles et le climat serein dans lequel se sont déroulées les commémorations de la bataille des Plaines indiquent bien qu’ils ont échoué dans leurs vaines tentatives.
Quoi qu’en disent les éteignoirs patentés de la Presse, le résultat n’est pas le même ce matin dans l’esprit de plusieurs Québécois. Au lieu d’avoir ressassé le souvenir d’une défaite toute la fin de semaine, comme les chantres du fédéralisme inconditionnel le souhaitaient ardemment, nous nous sommes plutôt rappelé que nous étions toujours vivants. Malgré la défaite des Plaines, le Traité de Paris, la défaite des Patriotes, la grande noirceur, les événements d’Octobre 70, les deux référendums perdus de 80 et 95, des événements qui ont profondément marqué notre peuple et que nous nous sommes remémorés grâce à la lecture de textes inscrits dans notre histoire commune, dans un esprit qui atteignait parfois la solennité et le recueillement propres à nos grandes messes du dimanche.
***
En fait, à la veille d’une élection fédérale, parce que nos opposants fédéralistes ont décidé de leur propre chef de ne pas nous honorer de leur présence, cette manifestation a rapidement pris des airs de veillée d’armes. Une occasion de se dire collectivement que même si nous avions perdu toutes ces batailles, nous n’avions pas perdu la guerre ; que nous pouvions encore gagner les batailles décisives! Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir !
Si le Moulin à paroles a pris des allures de victoires du camp indépendantiste sur les Plaines d’Abraham en fin de semaine, reste à savoir comment les forces fédéralistes vont récupérer ces événements. Revanchardes comme elles sont, et convaincues qu’elles n’ont plus rien à attendre du Québec pour gagner la majorité qu’elles souhaitent tant avoir pour leurs partis à la Chambre des communes, je ne serais pas étonné que les prochaines élections fédérales se jouent sur le dos du Québec.
Il faudrait être naïf pour croire un seul instant que l’absence des fédéralistes était le résultat du hasard. Loin d’être improvisée, leur démarche semblait même orchestrée. Les uns après les autres, ils se sont désistés, appuyés en cela par le chef de la propagande fédéraliste au Québec, l’ineffable éditorialiste en chef de la Presse, André Pratte. C’est à boulets rouges qu’il a tiré sur les organisateurs du Moulin à paroles, un siège qui aura duré toute une semaine. De toute évidence, il a raté sa cible.
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Déjà, en novembre dernier, nous avions eu un avant-goût de la bassesse dont pouvait faire preuve Stephen Harper alors qu’il brandissait le spectre des dangereux séparatistes pour discréditer la coalition qui a vainement tenté de provoquer la chute de son gouvernement, sauvé in extremis par la collaboration avisée de la gouverneure générale du Canada.
La nomination de Michael Ignatieff à la tête du parti libéral du Canada, l’hiver dernier, nous a également permis de constater toute la veulerie dont cet homme était capable lorsqu’il s’agissait de passer de la parole aux actes. Si les Québécois forment une nation, cela n’aurait concrètement aucune signification. Un gouvernement libéral dirigé par Michael Ignatieff ne fera rien de plus que les conservateurs pour reconnaître le caractère distinct du Québec et protéger davantage le français dans la fonction publique fédérale et dans les entreprises de juridiction fédérale au Québec.
À cause de la démission des fédéralistes, les événements de la fin de semaine ont pris une saveur éminemment politique. Plutôt que d’être face à face, comme ce fut le cas il y a 250 ans, les forces anglo-saxonnes ont préféré capituler, préférant le champ de bataille des élections fédérales, où elles s’attaqueront sans vergogne à tout ce qui distingue le Québec du reste du Canada. Un terrain qui sera probablement le théâtre de toute la mesquinerie dont sont capables les conservateurs de Stephen Harper et de la lâcheté que les libéraux de Michael Ignatieff peuvent démontrer quand il s’agit de défendre les intérêts du Québec.
Si les partis fédéralistes canadiens ont refusé de participer aux Moulin à paroles en fin de semaine, tournant ainsi le dos pour une énième fois au Québec, tout indique qu’ils n’auront pas besoin du Bloc Québécois pour briser leur beau Canada, puisque les prochaines élections risquent de prendre des allures d’un moulin à viande où les partis fédéralistes charcuteront à qui mieux mieux le plus meilleur pays du Monde sans que les indépendantistes québécois aient un seul mot à dire, même si selon toutes les apparences ils en seront la cause, le seul sujet faisant l’unanimité de la plupart des Canadiens étant leur profond mépris de tout ce qui distingue le Québec du reste du Canada. Apparemment la seule stratégie que les conservateurs auraient trouvée pour obtenir une majorité à la Chambre des communes.
Le début de la fin du Canada?.

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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5 commentaires

  • Daniel Verret Répondre

    14 septembre 2009

    J'ai assisté au moulin à parole hier. Quel magnifique leçon d'histoire. Il faudrait que ces textes soient enseignés à nos jeunes.
    Je serais très curieux de voir les fédéralistes, qui ont boudés l'évenement, sauf M Benoît Bouchard, tenter la même expérience. Il ne le feront jamais car ce serait un suicide pour eux.

  • Archives de Vigile Répondre

    14 septembre 2009

    Merci à Madame Groulx et à Monsieur Poulin de leur brillant commentaire. Merci à vous d’afficher une maîtrise devant la bêtise, comme celle de Denise Bombardier. Certes, cette dame a écrit et a tenu le haut du pavé durant des années. Mais, il y a un élément de l’histoire (la finesse) qui émerge des années plus tard. Madame Bombardier n’en sera pas, de toute évidence...
    N'étant pas souverainiste (de fait, n’étant rien), je puis prétendre à tout, y compris au droit de parole. J’ai suivi avec intérêt le suspense qu’a suscité le « Moulin ». Un moulin, ça mout de la farine, pour faire du pain, pour nourrir un peuple. De là, on peut imaginer n’importe quoi, comme par exemple, de construire autre chose que des ponts en acier et des autoroutes de béton. Notre histoire est belle et riche quoique jeune. Entretenons-la sans préjugés. Car cette histoire s’alimente de chacun de nous. Quant à l’énervement du conquérant, il aura toujours le choix de tirer, prouvant sa couardise et sa petitesse.
    André Meloche
    P.S. Je dois avouer qu’à vous lire, je me sens moins seul et que je commence d’aimer mon pays peuplé de gens parfois dissimulés mais non moins intelligents, sensibles et vivants!

  • Michel Guay Répondre

    14 septembre 2009

    Ce Moulin à Paroles m'a donné un grand élan de fierté .
    Ça fait du bien de gagner à l'occasion et cette victoire en plus est naturelle n'a rien d'artificielle
    Cela donne un réel avant -goût d'une grande victoire finale
    Vive le Québec libre

  • Raymond Poulin Répondre

    14 septembre 2009

    Peut-être commençons-nous à comprendre qu'il ne sert à rien d'avoir peur de faire peur et que la pusillanimité ne nous a jamais rien valu. Si le Moulin à paroles nous a permis de réaliser cela, il aura beaucoup mérité de la patrie.

  • Archives de Vigile Répondre

    14 septembre 2009

    Oui, vous avez raison. La récupération est déjà commencée. Il fallait entendre tout le fiel d'une Denise Bombardier, ce matin, en entrevue chez Paul Arcand.
    La pauvre dame a perdu toute crédibilité par son manque d'objectivité, mais elle gueule, elle gueule....
    Il est clair que le succès du "Moulin" et de ses organisateurs les pique au vif, ces fossoyeurs de l'Histoire, et du côté duquel la madame a choisi de se positionner... faut le faire: "du côté des Sam Hamad, Labeaume, Charest, Verner et cie.
    D'ailleurs, je la plains plus que je ne la dénonce, il s'agit peut-être d'un début d'Alzeimer... dans son cas.