LE SCRUTIN PROPORTIONNEL

Un piège pour la vraie démocratie!

Tribune libre - 2007


Au lendemain des dernières élections, les partisans inconditionnels du mode de scrutin à la proportionnelle sont repartis en mission afin de convaincre les citoyens du Québec du bien-fondé de leur projet. Même les plus grands démocrates s’y sont laissé prendre, l’éditorialiste du Devoir en tête et d’autres journalistes, sans oublier Christiane Charrette qui a reçu les «adeptes» du mode de scrutin à la proportionnelle comme de grands seigneurs de la démocratie «sic» et comme si on devait obligatoirement épouser leur pensée et les suivre dans leur désir d’entrer à l’Assemblée nationale du Québec?
Dans aucun cas on ne doit se laisser prendre par leur objectif qui est avant tout, d’entrer, (j’allais dire d’envahir) l’assemblée nationale par la porte arrière, puisque les électeurs et les électrices refusent par leurs votes, de leur ouvrir la porte avant de cette auguste assemblée des élus! Voilà pourquoi ils utilisent d’autres arguments, peu crédibles par ailleurs, afin de nous convaincre de modifier le mode de scrutin que nous connaissons, qui par ailleurs ne nous a pas si mal servi, en tentant de nous convaincre que la démocratie, ( qu’ ils nomment démocratie nouvelle?) serait mieux servie en permettant aux tiers partis de siéger à l’assemblée nationale, même s’ils n’ont obtenu qu’un petit pourcentage du vote exprimé, 8% au total pour le parti Vert et le parti de Québec solidaire.
Refuser de jouer le jeu anti-démocratique, sous le couvert d’une nouvelle démocratie!
Dans un premier temps, il nous faut nous opposer à modifier le mode électoral comme le suggèrent tous ces supposés démocrates s’identifiant dans «différents» groupes sous le couvert de démocratie nouvelle et d’autres mouvements semblables, mais se référant toujours à une supposée démocratie nouvelle. En répondant à leurs attentes, c'est le pouvoir indéfini que nous donnerons aux anglophones, eux qui votent massivement, (souvent à 100%) pour le Parti Libéral du Québec., ce que les résultats des dernières élections générales ont de nouveau démontré.
Légitimer la présence des députés à l’Assemblée nationale!
Pour contrer ce mouvement, il nous faut prévoir un mode de scrutin qui viendrait légitimer la présence des députés au parlement. Il est assez aberrant de constater que l'on veuille donner une voix aux petits groupes, pour ne pas dire aux groupuscules, sans jamais songer à légitimer la présence d'un député dans notre parlement. Est-ce que la démocratie ne serait pas mieux servie par ce mode de scrutin que par celui qui veut promouvoir la présence de petits partis dans un système à la proportionnelle rejeté par la France au cours des dernières années. (Ce mode de scrutin avait permis au groupe de M. Jean-Marie Le Pen d’entrer à l’Assemblée nationale de France) Ne serait-ce que pour ce motif, il nous faut éviter de tomber dans le piège des petits partis qui veulent absolument être présents à Québec.
Question ?
Pourquoi ces honorables personnes ne proposent-elles pas ce système à Ottawa, où un certain parti gouverne presque sans arrêt, tout en étant élu par moins de 40% de l'électorat ? Est-ce que par hasard elles craindraient une fin de non recevoir des fédéralistes?

Élection à deux tours!
Ce qu'il nous faut plutôt promouvoir, c'est une élection à deux tours, où les deux candidats ayant les meilleurs résultats au 1er tour pourraient être présents lors du 2ème tour. Voilà qui légitimerait la présence de nos élus à Québec, et qui ne brimerait en rien nos concitoyens Anglophones, puisque leurs candidats seraient tous élus au premier tour de scrutin, ce que vient de confirmer encore une fois la dernière élection générale au Québec.
Note : Nous pourrions, dans toute notre magnanimité, permettre que les partis minoritaires soient représentés à Québec, par leurs chefs (ou une personne élue), s'ils reçoivent au moins 5% des votes exprimés et s’ils n’ont aucun candidat élu à la députation . Voilà qui nous éviterait de tomber dans le piège des ennemis du Québec, et de l'instabilité politique du mode de scrutin à la proportionnelle.
Plutôt promouvoir un projet de constitution!
Si nous voulons vraiment faire avancer la démocratie et notre idéal, (même la modification du mode de scrutin) ne serait-il pas préférable de nous donner des moyens pédagogiques de faire la promotion de l’émancipation politique du Québec? Dans ce sens, définir le contenu d'une constitution d'un Québec indépendant serait un moyen pédagogique de grande valeur pouvant convaincre nos frères et nos soeurs du bien-fondé de l'indépendance du Québec de langue «française» en terre d'Amérique.
Nous sommes convaincus que lorsque les Québécois auront défini leur pays, comme nous le disions dans notre mémoire soumis à la commission de Montréal siégeant sur l’avenir du Québec (7 février 1995) et dans plusieurs articles de l'Action Indépendantiste du Québec, qu’ils ne pourront se refuser l'émancipation politique qui seule peut leur permettre de profiter du pays qu'ils auront défini.
Nouvelles élections à court ou à moyen terme!
La présence d’un gouvernement minoritaire à Québec, et l’imminence de nouvelles élections, devraient nous convaincre qu’il est urgent d’œuvrer à la mise sur pied d’une constitution toute québécoise, construite par les citoyens de toutes les régions du Québec!
L'indépendance du Québec, et la volonté de nous donner, et de donner à nos enfants et petits-enfants, un pays indépendant de langue française, doit nous guider dans nos actions.
Ne nous laissons pas endormir par les intellectuels du mode de scrutin à la proportionnelle. Notre cause est trop importante pour cela.
Jacques Bergeron


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    24 avril 2007

    Après une éphébie de deux ans, l'éphèbe, qui a maintenant 20 ans, prête le serment qui fait de lui un hoplite, un soldat-citoyen d'Athènes égal aux autres :
    « Je ne déshonorerai pas mes armes sacrées et je n'abandonnerai pas mon voisin là où je serai en rang ; je défendrai ce qui est sain et sacré, et ne remettrai pas à mes successeurs la patrie amoindrie, mais plus grande et plus forte, agissant seul ou bien avec tous, j'obéirai à ceux qui, tour à tour, gouvernent sagement, aux lois établies et à celles qui sagement seront établies. Si quelqu'un entreprend de les détruire, je ne le laisserai pas faire, agissant seul ou bien avec tous, et j'honorerai les cultes ancestraux. Que connaissent de ce serment, les dieux, Aglauros, Hestia, Ényo, Ényalos, Arès, et Athéna Areia, Zeus, Thallô, Auxô, la Conductrice, Héraclès, les bornes de la patrie, les blés, les orges, les vignes, les olives, les figues[1]. »
    Les mots-clés à retenir sont « obéir aux lois et gouverner tour à tour ». Les principes fondateurs de la démocratie sont 1) l'isogonie (égalité de naissance) 2) l'isonomie (égalité de partage) et 3) iségorie (l'égalité de parole).
    Pour mettre en pratique ces principes d'égalité, les Athéniens, une élite masculine ne formant qu'une classe en dépit des inégalités de richesse et de talent, font usage du tirage au sort pour être gouvernés et gouverner tour à tour, à travers un ensemble de charges publiques qu'ils exercent pendant une courte période. Les citoyens athéniens se distingue des autres citadins qui eux n'ont pas accès aux charges publiques du tout.
    Le diagramme à l'adresse suivante illustre le système de gouvernement athénien au IVe siècle :
    [
    http://diagrammes.republiquelibre.org/aristote-constitution-athenes.png->http://diagrammes.republiquelibre.org/aristote-constitution-athenes.png]
    Une compréhension éclairée de la démocratie athénienne n'a été acquise que récemment. C'est la découverte inespérée d'un papyrus égyptien, en 1879, qui jeta le plus de lumière sur la constitution de la polis antique. Le papyrus décrit la Constitution des Athéniens (Athênaíôn politeía) que les hélénistes attribuent à Aristote. [2]
    Pour ce qui est du système dans lequel nous vivons actuellement, sorte d'oligarchie élective, il est à des années-lumières des principes de la démocratie. Mais en nous donnant un corps de représentants digne de ce nom, nous aurions fait un énorme pas en avant.
    Ce qu'à une autre époque on espérait accomplir avec des élections fréquentes et la liberté de presse, c'était le replacement rapide des gens aux pouvoirs et la surveillance permanente de ceux-ci par des citoyens éclairés. On espérait ranimer des principes mal compris par des moyens jamais testés. La démocratie reste un idéal encore aujourd'hui et on est toujours aussi peu certain des moyens qu'il faut prendre pour qu'elle advienne. Mais la réflexion se poursuivit, à la lumière des expériences passées, réussies ou ratées, et des réalités nouvelles que nous observons.
    Empêcher une minorité de députés issue d'un même parti politique (parti qui n'a la faveur que de 30% à 40% des électeurs) de contrôler l'Assemblée nationale à elle seule à partir de l'exécutif usurpé annoncera peut-être le retour des idées démocratiques styles 19e professées par entre autre par Louis-Joseph Papineau en ces termes :
    «Je pense [...] que le cabinet est trop nombreux, mal comparativement léger; que la Chambre est trop peu nombreuse, constituée sur un principe d'injustice, dans un but d'iniquité; mal immense, auquel, sans perte de temps, il faudrait s'efforcer de porter remède, sans quoi le prétendu gouvernement responsable ne sera qu'un leurre, et son fonctionnement à peine meilleur entre les mains les plus pures que dans les plus corruptrices. Quant au personnel ministériel, il offre une combinaison de talents et de principes aussi bonne que le comportait la composition de la Chambre. Ce ne serait pas en changeant quelques-uns de ses membres contre quelques autres qu'il serait amélioré, ce serait en en diminuant le nombre, pour que la responsabilité du cabinet fût plus directe, plus personnelle, pour que les fonctionnaires qui, d'après la nature de leur emploi, ne doivent pas être des hommes politiques dirigeant en délibération secrète dans le conseil, mais des administrateurs actifs agissant sous les regards du public, soient facilement comptables de tout ce qu'ils auront publiquement fait.»
    «La principale objection à un ministère disproportionnément nombreux résulte de l'exiguïté du nombre des représentants et de l'exagération des dépenses publiques. Avec le temps, ceux qui sont placés et ceux qui désireraient être placés viendraient à former une si forte proportion d'hommes personnellement intéressés à faire prévaloir les décisions qu'ils auraient prises en secret, entre hommes réunis à cause d'une communauté d'opinions et d'intérêts, que le reste de la Chambre n'aurait pas sur eux le libre et entier contrôle qu'elle doit conserver sur toutes les autorités. Que la Chambre sente à chaque instant sa dépendance de l'opinion publique, éclairée par la discussion la plus libre possible; et que les hommes en pouvoir sentent à chaque instant leur dépendance d'un corps représentatif très indépendant d'eux: voilà le gouvernement responsable dans son essence, non tel qu'on l'a fait jusqu'à présent pour les Canadas.[3]»
    Parmi les partisans d'une véritable réforme du scrutin, nous sommes nombreux à être convaincu qu'un scrutin de liste inspiré des pays scandinaves ou un système mixte à l'allemande, nous fera progresser dans la bonne voie. Nous attendons toujours que les adversaires de ces systèmes avancent des arguments qui tiennent debout.
    1. Texte relevé sur une stèle du IVe siècle av. J.-C., cf. L. Robert, Études épigraphiques et philologiques, 1938, p. 293–301. Traduction de Jean-Marie Bertrand, Inscriptions historiques grecques, Belles Lettres, coll. « Roue à livres », 1992, p. 48.
    2. Claude Mossé, introduction à Constitution d'Athènes, Les Belles Lettres, « Classiques en poche », 1996.
    3. «Discours parlementaire», dans L'Avenir du 8 avril, 1848