À moins d’un an des élections fédérales, le premier ministre Trudeau, percevant les obstacles sur sa route vers une réélection, vient de découvrir son thème de prédilection.
Dénonçant les politiciens qui carburent aux émotions, Justin Trudeau estime, en son for intérieur, que François Legault, pour respecter l’une de ses promesses électorales, flirte avec les anti-immigrants en annonçant une baisse du nombre d’immigrants que recevra Québec l’an prochain.
Il ne s’agit pas de faire un procès d’intention au premier ministre Trudeau, mais de décrypter les propos qu’il tient sur tous ceux qui s’opposent à la politique migratoire que son gouvernement impose tambour battant. Une politique qui s’inscrit dans la logique multiculturelle de son Canada postnational, où chacun se définit d’abord comme individu, sans référence à l’histoire commune du pays.
Populisme
Justin Trudeau, le prototype du mondialiste économique et culturel, se définit comme rationnel et intelligent. Il se méfie de ceux qu’il qualifie de politiciens émotifs et favorables au populisme de droite ou d’extrême droite, alors que lui, l’ami de Castro dont il vantait jadis les mérites, semble refuser l’étiquette de populiste aux politiciens de gauche.
Il se réclame ici de son père, grand intellectuel et débatteur, aussi intelligent que cinglant, qui faisait trembler ses contradicteurs. Hélas, Justin Trudeau pose un regard plutôt illuminé et simpliste sur l’immigration, source à ses yeux de progrès, d’ouverture ; ce serait un modèle culturel dégagé du nationalisme craintif exprimé avant tout par les Québécois, qui se sentent bousculés dans leur identité problématique. Poussé dans ses derniers retranchements, Justin Trudeau pourrait même faire des amalgames entre Québécois et La Meute, ce mouvement anti-immigration qui sévit chez nous.
Or, en réalité, les Québécois, le premier ministre Legault d’abord, s’opposent à la politique officielle des libéraux tout en prenant leurs distances de celle plus à droite des conservateurs. Et ils ont des réserves quant à ce pacte mondial des Nations Unies, signé par nombre de pays peu prisés par des immigrants qui, eux, préfèrent le Canada. Un pacte qui propose de bien surveiller toute critique sur l’immigration.
Offensive
Dans les mois à venir, nous allons assister à une offensive contre les médias et les adversaires, que le pacte de l’ONU décrit comme une menace à la démocratie mondiale des pays aux frontières fluides. Rappelons-nous le cri du cœur de Trudeau, lançant que tous les réfugiés étaient les bienvenus au Canada.
La moralisation du discours pro-immigrationniste de Justin Trudeau accole une étiquette d’intolérance à quiconque éprouve des doutes sur notre capacité collective d’intégrer des immigrants à court terme par manque de moyens suffisants. L’insulte à la mode est d’accuser de populisme tous les Québécois qui expriment des malaises.
À l’évidence, François Legault est plus représentatif de l’état d’esprit québécois que Justin Trudeau. Celui-ci devra être prudent dès l’an prochain et s’interdire lui aussi de « souffler sur les braises de l’intolérance », pour citer la formule de son admirateur Philippe Couillard, qui en stigmatisant la fragilité identitaire des Québécois a payé cher son antinationalisme. Comment un premier ministre peut-il confondre son peuple avec un groupuscule anti-immigration ?