Stratégie problématique : entre désarroi et dispersion

Tristesse et désolation dans notre gouverne à mentalité provinciale (2)

PQ - gouvernance nationale<br>Conseil national 14-15 et 16 mars

On mériterait mieux que ce gouvernement qui sabre allègrement dans des
acquis vitaux de cette Révolution tranquille qui nous a littéralement mis
au monde. Bien sûr elle a eu ses ratés, cette période d'intenses
bouleversements de la société québécoise, mais la renier c'est un peu comme
brûler notre certificat de naissance dans la modernité. Il est inquiétant
de voir au nom de quelles valeurs on veut nous faire revenir en arrière,
des valeurs qui ont fait leur preuves dans des exploitations de toutes
sortes et la création d'inégalités entre les citoyens. Il est en même
temps navrant de voir ce gouvernement tenter en douceur de nous incruster
et de nous «minoriser» dans le tableau canadien. Il est ahurissant , avec
tout le potentiel que nous avons, de les voir se contenter des lignes
mineures. Nous sommes équipés pour aller bien plus loin.
Le problème n'en est plus un de confiance, à preuve toutes les actions et
les réalisations de Québécois à travers le monde. C'est maintenant devenu
un problème de reconnaissance, de conscience. Conscience que notre voix
pourrait être plus influente, conscience que notre cri pourrait être mieux
entendu, conscience enfin que nous pouvons jouer un rôle plus grand dans le
monde, un rôle qui nous ressemble, qui nous rassemble.
Tant que le PLQ ne nous offrira pas autre chose que cette fossilisation
dans un pays maintenant incapable de se renouveler, tant que sa seule
fierté sera de se contenter d'un petit pain alors qu'il pourrait posséder
la boulangerie et tant qu'il se satisfera de concepts vides comme son
pseudo-statut de nation et son petit banc à L'UNESCO, il n'y rien à
attendre de ce parti insipide qui nous conduit vers une banalisation sans
retour. D'ailleurs, si cette reconnaissance factice de la nation
québécoise a réussi à jeter un peu de poudre aux yeux ici, elle n'a pas
leurré le reste du monde. Jean Charest est maintenant reçu à l'étranger un
peu comme le maire d'une grosse ville.
L'ADQ, ça ne fait vraiment pas sérieux. Elle a des culottes bien trop
courtes. Ça manque vraiment de profondeur, de substance. Il s'agit d'une
idéologie en friche. Mario Dumont est un champion de l'ambiguïté, un élève
de Robert Bourassa, grand provincial devant l'Éternel. Nous n'irons jamais
quelque part avec lui, cet adepte du faux-fuyant et de l'esquive. Ce qui
n'arrange rien, c'est que ça empeste le néo-conservatisme à plein nez. Il
faut qu'il reviennent ceux qui de bonne foi se sont laissés entraîner dans
ce mirage.
C'est certain que l'on pourrait aller plus loin avec Québec Solidaire ou
même avec la Parti Vert. Il y a des forces vives et beaucoup de conscience
sociale dans ces regroupements. Ils véhiculent des idées importantes et
incontournables mais ils oublient qu'il y a un combat préalable à mener
s'ils veulent avoir la chance de voir leurs idées progresser. Sans ce
passage obligé, il leur faudra se contenter de la marginalité perpétuelle.
Dans ce mode de scrutin britannique, ces partis, en voulant qu'on les élise
font le jeu de ceux qui nous enlisent.
Le PQ maintenant. Ce parti a deux problèmes principaux. D'abord, son
approche pédagogique est déficiente, souvent trop abstraite. Il rate
souvent de belles occasions de promouvoir la souveraineté. Il ne suffit de
le dire une fois dans un point de presse pour que le message passe. En
pédagogie, la recette est simple. Il faut que le message soit simple,
clair et répété, répété et répété. Surtout, il ne faut pas en manquer une.
L'autre problème est un boulet que ce parti traîne depuis trop longtemps.
Il s'agit de l'étapisme et de la stratégie référendaire qui ont amené le
Parti Québécois à se comporter comme un authentique gouvernement provincial
avec toutes les limites que ça suppose. Dans la routine de la gérance
subalterne, les acteurs ont tous tendance à se ressembler. Cette tentative
de bon gouvernement avant l'échéance référendaire a quelque chose de
pernicieux et de pervers. Elle a donné ses fruits et ils sont pourris. Le
problème, c'est qu'on met, dans la même grille d'évaluation de l'électeur,
l'usure de la gérance quotidienne et le projet de construire un nouveau
pays. C'est très porteur d'ambiguïté.
En plus, le gouvernement fédéral s'est efficacement appliqué à compliquer
cette démarche. Il faut trouver autre chose. Il n'est pas question
d'aller s'écraser sur ce mur, il faut le contourner.
Néanmoins, le PQ demeure encore le seul véhicule sérieux que nous avons
pour franchir la grande étape initiale. C'est ça la priorité. Continuer à
multiplier les chapelles indépendantistes, c'est se condamner à rester
provincial jusqu'à la fin des temps. Nous n'avons plus le temps de
recommencer à construire un nouveau parti indépendantiste, le temps presse.
Il faut se faire une raison. Il faut que tous ceux qui sont fatigués du
cadre provincial investissent le seul véhicule sérieux que nous avons pour
faire le premier pas. Ensuite, nous pourrons aménager la maison à notre
goût. À cet effet, il convient de louer le réalisme politique du SPQ Libre
qui a choisi de militer à l'intérieur du PQ où ils continuent à promouvoir
leurs idées. Présentement, il se passe des choses au PQ. Ça bouge. Des
choses sont peut-être en train de changer. Il faut espérer que
l'électoralisme ne prendra pas le dessus sur la stratégie à plus long terme
qui est de réaliser l'action fondatrice de notre nation.
Tout ça ne se fera pas sans le peuple. Mais le peuple est occupé à
survivre parfois entre «le confort et l'indifférence» mais parfois aussi
entre l'inconfort et la désespérance. Difficile de développer une
conscience quand les grands journaux très concentrés martèlent sans arrêt
les bienfaits de rester provincial. Difficile de ne pas sombrer dans
l'amnésie quand toute une école de nos historiens s'appliquent à occulter
des étapes importantes de notre cheminement comme nation. Il demeure tout
de même étonnant de constater que l'idée de souveraineté demeure encore si
présente malgré tout ça. L'option indépendantiste n'a pas de véhicule
médiatique imposant. C'est une carence qui nous fait très mal parce que ça
pourrait être la solution à notre problème de pédagogie donc à notre prise
de conscience.
Le Québec a une voix à faire entendre, un génie à faire connaître et ce
n'est qu'en entrant dans le grand concert des nations que l'on pourra le
faire plus efficacement. Ce n'est pas en restant une simple province dont
le cri se perd sous un tonneau.
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --

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Gilles Ouimet66 articles

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Né à Mont-Laurier en 1947. Études primaires à cet endroit. Études classiques à Mont-Laurier et Hull entre 1961 et 1968. Diplômé en histoire de l’Université Laval en 1971. Enseignant à la polyvalente de Mont-Laurier entre 1971 et 2005. Directeur d’une troupe de théâtre amateur (Troupe Montserrat) depuis 2000. Écriture pour le théâtre, notamment une pièce à l’occasion du centenaire de Mont-Laurier en 1985 (Les Grands d’ici), une autre à l’occasion du 150e anniversaire du soulèvement des Patriotes (Le demi-Lys...et le Lion) en 1987 (prix du public lors du festival de théâtre amateur de Sherbrooke en 1988 et 2e prix au festival canadien de théâtre d’Halifax la même année). En préparation, une pièce sur Louis Riel (La dernière Nuit de Louis Riel). Membre fondateur de la Société d’histoire et de généalogie des Hautes-Laurentides. Retraité de l’enseignement depuis 2005.





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2 commentaires

  • Fernand Lachaine Répondre

    31 janvier 2008

    Bonjour monsieur Ouimet,
    Votre intervention interpelle et rejoint, j’en suis sûr, de nombreux lecteurs de Vigile. À la lecture de votre article, j’ai eu le sentiment que les points soulevés étaient véritablement ce à quoi les québécois devaient longuement réfléchir.
    Cependant comment pouvons-nous « faire prendre conscience que notre cri pourrait être mieux entendu, conscience enfin que nous pouvons jouer un rôle plus grand dans le monde, un rôle qui nous ressemble, qui nous rassemble » ?.
    En lisant votre article, je me posais les questions suivantes (toujours les mêmes quand je lis des articles qui interpellent de si belle façon, comme le votre) :
    "Le gars qui est sur la route avec sa voiture moyenne, qui gagne un salaire moyen, qui a une maison moyenne, qui a une famille moyenne, bref sa situation est moyenne. Ce gars-la, comment peut-il être interpellé ( être jeté par terre comme sur le chemin de Damas !) afin qu’un réveil puisse se produire pour qu’il réalise qu’un gars qui vit une situation similaire, mais dans son pays souverain, vit, en plus, de la fierté de faire partie de la société des nations, de la loyauté envers son pays face au reste du monde et de la solidarité envers son peuple."
    Comment monsieur Ouimet interpeller, un par un, ceux et celles qui se contentent de la situation moyenne sans issu de provinciaux ( vaincus d’avance).
    Le message et le messager ont besoin d’être forts car tous les médias, parlés et écrits ( sauf peut-être Le Devoir) du Québec martèlent chaque jour qu’il fait bon de vivre en provinciaux moyens.
    Votre article et d’autres qui apparaissent dans Vigile devraient être diffusés chaque jour dans chaque foyer québécois. Mais ce n’est malheureusement pas le cas et c’est, à mon avis, un bris à la démocratie vraie.
    Ma question est toujours la même : Comment réveillé le gars qui est sur la route……
    Merci monsieur Ouimet de votre message
    Fernand Lachaine

  • Gaston Boivin Répondre

    31 janvier 2008

    Votre texte, monsieur Ouimet, est un brillant résumé, à la fois exacte, pragmatique et judicieux de la situation, de notre situation. N'y manque que le défaut d'avoir abordé l'urgence et le péril où elle nous place et l'obligation qu'elle nous impose d'agir rapidement et de se repositionner devant le danger, avant qu'il ne soit trop tard, le tout eu égard à notre trop faible taux de natalité qui perdure depuis trop d'années, au taux de viellissement très élevé de notre population, et à notre immigration beaucoup trop grande et trop concentrée spatialement pour notre capacité valable d'intégration, déjà amoindrie par notre vulnérabilité dans cet ilôt franco-anglais qu'est devenue Montréal aux portes mêmes de l'anglicité nord-américaine. Je me promets d'ailleurs d'aborder prochainement ce sujet sur ce site. Puissiez-vous être entendu!