La réaction des libéraux à la nouvelle position du PQ sur le référendum était prévisible. Pauline Marois a encore l'intention de tenir un référendum, a prévenu la ministre de l'Environnement, Line Beauchamp.
Il serait sans doute plus juste de dire que Mme Marois souhaite toujours être en mesure de tenir un référendum, mais Mme Beauchamp a raison: même si la conjoncture semble actuellement défavorable, la possibilité d'un référendum, donc l'incertitude, demeure. «On ne va pas s'empêcher d'en tenir un, si on le juge pertinent», a déclaré Mme Marois.
En réalité, le conseil national de la fin de semaine n'a strictement rien changé à cet égard. Certes, le programme adopté au congrès de juin 2005 paraissait catégorique: le référendum aurait lieu «le plus tôt possible à l'intérieur du prochain mandat». Aussi bien Bernard Landry qu'André Boisclair avaient cependant pris bien soin de souligner que le mot à retenir était «possible». Comme dans la phrase: «S'il est possible de le gagner».
Autrement dit, peu importe ce que disait le programme, il n'y aurait pas eu de référendum si les «conditions gagnantes» n'avaient pas été réunies. Compte tenu du prix politique que le Québec a dû payer après les défaites du Oui en 1980 et en 1995, toute autre attitude aurait été totalement irresponsable.
On fait généralement une promesse que l'on doute pouvoir tenir dans le but d'amadouer les électeurs. Aux élections du 26 mars 2007, M. Boisclair s'était plutôt retrouvé dans la situation absurde de défendre un engagement impopulaire qu'il se savait parfaitement incapable de tenir.
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La façon dont le SPQ Libre voyait le référendum d'initiative populaire était assez astucieuse. Pour éviter de se faire imposer un référendum dont il ne voudrait pas, un gouvernement péquiste n'aurait eu qu'à attendre le moment propice pour déposer une loi qui permettait d'ouvrir les registres. Bref, il s'agissait simplement d'apposer une couche de vernis populaire sur un référendum décidé par le gouvernement.
En insistant pour que la proposition du SPQ Libre soit débattue au conseil national, même si la présidente d'assemblée l'avait jugée irrecevable, Mme Marois a voulu donner l'impression que le débat sur le référendum était clos, mais la seule façon de régler la question de façon définitive serait de s'engager formellement à ce qu'il n'y ait pas de référendum durant le prochain mandat, comme René Lévesque l'avait fait en 1981.
Bien entendu, elle n'en fera rien. La chef du PQ a indéniablement consolidé son leadership en fin de semaine, mais elle est allée à la limite de ce qu'elle pouvait dire sans sonner la démobilisation générale. À défaut de promettre la tenue d'un référendum, maintenir l'ambiguïté est essentiel à la survie du PQ.
Au-delà de son caractère loufoque, l'épisode de la «conversation nationale» illustre bien la difficulté de lancer un vaste débat sur la souveraineté, s'il ne doit pas déboucher sur une action décisive.
Au conseil national, les militants de l'Estrie ont proposé de ressusciter le projet de convoquer des États généraux de la souveraineté, afin de rallier les indépendantistes purs et durs qui ne se retrouvent plus dans le PQ.
La présidente du parti, Monique Richard, est aussitôt intervenue pour demander aux délégués de ne pas «s'encarcaner dans les modalités», plaidant la nécessité de conserver «toute la marge de manoeuvre».
Il est vrai qu'il ne serait pas très sérieux de tenir un exercice de ce genre, qui conclurait à coup sûr à l'urgence de la souveraineté, et d'en reporter ensuite la réalisation à une date indéterminée. Là encore, les militants ont obtempéré, même si le conseil national a déjà donné son aval à la tenue d'États généraux à deux reprises au cours des dernières années.
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Le problème, quand on ne sait pas trop quoi faire, est que l'on finit la plupart du temps par ne rien faire. Il faut dire qu'à partir du moment où Mme Marois exclut d'utiliser les fonds publics pour faire la promotion de la souveraineté, le choix des moyens se trouve passablement réduit.
Bien sûr, il y a les «gestes de gouvernance nationale». En fin de semaine, on a fait en sorte d'écarter tout ce qui serait inconstitutionnel, comme l'abolition du poste de lieutenant-gouverneur, ou encore susceptible de provoquer un confit immédiat avec Ottawa, comme la création d'une déclaration de revenus unique. Même la formation d'une équipe du Québec qui participerait à des compétitions sportives internationales a été exclue.
Les initiatives qui ont été retenues concernent surtout l'identité québécoise: constitution, citoyenneté, renforcement du statut du français, enseignement de l'histoire nationale, intégration des immigrants, etc.
Il en découle tout naturellement l'exigence de rapatrier les pouvoirs -- et les ressources financières correspondantes -- en matière de langue, de culture, d'immigration et de communications.
Cela ne représente qu'une petite partie des demandes qui avaient été formulées par l'ADQ dans son projet de «paix constitutionnelle» de 1999. Cela rejoint aussi les demandes que Robert Bourassa avait faites en 1992, avant de se rabattre en désespoir de cause sur l'entente de Charlottetown. Avec les libéraux, on ne sait jamais, mais il serait assez gênant pour l'ADQ de ne pas s'associer à ces demandes, même si elles étaient reprises par un gouvernement péquiste.
Au lendemain des élections d'avril 2003, qui annonçaient des années de vaches maigres pour la souveraineté, Pauline Marois avait proposé de revenir à l'idée des référendums sectoriels, mise en avant quinze ans plus tôt par Jacques Parizeau. Soit, elle y a renoncé depuis, mais s'il fallait tenir le compte de ses changements de cap depuis qu'elle est entrée en politique, on n'en finirait plus.
À défaut d'un référendum sur la souveraineté, pourquoi pas un référendum sur les pouvoirs essentiels à la préservation de l'identité québécoise? Ce n'est rien de neuf, direz-vous. En tout cas, mais cela n'a jamais été essayé. Bien entendu, Mme Marois ne ferait jamais quelque chose d'aussi hérétique.
mdavid@ledevoir.com
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