Soulagement au PQ

Chronique de Patrice Boileau


Les électeurs de la circonscription de Rousseau, un château-fort péquiste, ont décidé lundi dernier de continuer d’accorder leur confiance à la formation indépendantiste. Après la dure défaite dans le comté très francophone de Rivière-du-Loup, cette victoire évite le pire à Pauline Marois, chef du Parti québécois.
La déconfiture adéquiste à ce scrutin partiel permettra également à la dirigeante péquiste d’éviter momentanément de se retrouver sous les projecteurs des médias. Une accalmie qui sera brève cependant, puisque la course au leadership qui malmène l’ADQ connaîtra son dénouement en octobre prochain.
Plusieurs indépendantistes auraient néanmoins souhaité que le candidat libéral l’emporte. Seul ce type d’électrochoc aurait provoqué de profonds changements dans le programme politique du Parti québécois, selon eux. Des remises en questions majeures telle que l’élaboration d’une nouvelle loi 101, où la fréquentation des cégeps francophones aurait été imposée à tous les étudiants désireux de poursuivre leurs études. Inutile de se conter fleurette davantage : les statistiques des dernières années montrent que la langue française perd du terrain au Québec. Parlez-en à Louise Harel!
La principale réforme que le Parti québécois refuse d’entreprendre, celle qui concerne évidemment son mode d’accession à la souveraineté, aurait finalement été enclenchée. La mécanique étapiste rebute tellement les Québécois que ceux-ci préfèrent endurer un gouvernement qui croule sous les scandales de corruption, et qui coule à pic, parce qu’incapable de supporter le poids des déficits budgétaires qui s’alourdit sans cesse. Voilà qui n’est pas peu dire!
Le courage et l’audace qui ont longtemps caractérisé le PQ, au prix de débats internes parfois virulents, sont deux qualités qui seraient certainement réapparues, si le résultat électoral du 21 septembre avait été différent. L’attentisme aurait enfin cédé le pas à une dynamique proactive. Plus question d’imposer un ultime référendum aux Québécois, une joute sans lendemain face à un adversaire qui n’a aucunement l’intention de respecter la Loi sur la consultation populaire du Québec.
En conservant son château-fort de Rousseau, l’intelligentsia péquiste conclura que sa présente démarche est la bonne. Elle misera sur cette bonne vieille recette qui veut que l’usure qui afflige un parti qui en est à un troisième mandat au pouvoir, le mène toujours à sa perte. C’est donc manifestement par la petite porte que le PQ compte accéder au gouvernement du Québec. Navrant.
Ceux qui dorment sur cette « stratégie » ont-ils réfléchi, un tant soit peu, sur l’état de délabrement extrême dans lequel sera le poste de pilotage, lorsqu’ils s’installeront aux commandes de l’appareil étatique en perdition? La cote de solvabilité du Québec sera en chute libre, tout comme les montants qui seront à leur disposition pour concocter un budget. De plus, de gros nuages sombres menaceront l’horizon québécois, parce que le gouvernement fédéral dictera de nouvelles règles du jeu fiscal pour éponger son propre déficit. Face à de pareilles turbulences, celles qu’on accole au projet souverainiste paraissent futiles.
Le prochain appel aux urnes comportera un enjeu capital qui interpellera les Québécois. Quelle solution en effet voudront-ils retenir pour réparer les dégâts que la tempête économique aura laissés derrière elle? Quels outils choisiront-ils pour entreprendre ce grand nettoyage? Ne pas leurs en proposer, en choisissant le statut quo, enfoncera davantage le Québec dans la misère parce qu’il est certain que son état de santé sera le dernier des soucis d’Ottawa, préoccupé uniquement par le sien. En conséquence, le Parti québécois doit offrir son article 1 aux gens. Il serait irresponsable de sa part de ne pas le faire.
Quelques années séparent les Québécois de leur prochain rendez-vous électoral. Voilà qui donne du temps aux ténors du PQ pour construire des ponts avec des partenaires indépendantistes, afin de peaufiner une stratégie qui informera la société civile que la voie électorale sera dorénavant décisionnelle. Advenant l’obtention d’une majorité absolue des suffrages exprimés autour d’un projet de pays, l’administration arc-en-ciel qui hériterait du mandat serait autorisée à aller de l’avant. Une victoire sans l’appui de plus de 50% des gens pourrait entraîner le refus de celle-ci de gouverner. Aux fédéralistes minoritaires de se casser la gueule au pouvoir, muselés par le cadre fiscal fédéral, jusqu'à ce que les Québécois en aient assez de ce supplice.
Évidemment, un programme semblable exige le courage et l’audace évoqués plus haut. Des qualités qui apparaissent lorsque l’heure est grave. Dieu sait pourtant qu’elle l’est! Malheureusement, la victoire du Parti québécois à l’élection partielle de lundi dans la circonscription de Rousseau, confortera ses apparatchiks. Soudainement, ils oublieront les signaux très inquiétants des derniers mois et auront l’illusion qu’ils ont l’appui des indépendantistes. Espérons qu’ils se réveilleront avant qu’il n’y ait plus suffisamment de temps pour donner un véritable sens à la prochaine élection générale.
Patrice Boileau




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3 commentaires

  • Luc Bertrand Répondre

    28 septembre 2009

    C'est malheureusement l'histoire qui continue de se répéter, monsieur Boileau. Le Parti québécois, depuis le départ précipité de Jacques Parizeau, ne réalise toujours pas qu'il tourne en rond et continuera de le faire tant qu'il se bornera à jouer les règles de la petite politique provinciale québécoise. On a passé un rassembleur comme Lucien Bouchard, le meilleur tribun du parti en Bernard Landry, une soi-disante nouvelle génération de souverainistes en André Boisclair et, maintenant, on s'est rabattu sur Pauline Marois simplement pour tenter de racheter "l'erreur" de l'avoir ignorée lors de la course à la direction de 2005. Cependant, peu importe la personnalité ou les mérites du chef, le Parti québécois persiste à ignorer la réalité qui, jour après jour, élection après élection, ne cesse de démontrer l'effondrement de l'État québécois et, plus particulièrement de son potentiel à devenir un pays indépendant de langue, de culture et d'histoire commune françaises. Car, ne nous le cachons pas, à quoi servirait l'indépendance du Québec si ce n'était de voir la majorité francophone détenir enfin les pouvoirs décisionnels qui lui reviennent de droit.
    Monsieur Boileau, vous connaissez toute l'histoire des Québécois pour leur indépendance. Ne nous comptons pas d'histoires, car aucun progrès n'est possible en se coupant de la réalité quelle qu'elle soit, surtout quand on ne contrôle pas et de moins en moins les moyens de la changer. Vous savez très bien qu'à part les Robert Laplante et Patrick Bourgeois, il n'y a guère de vraie relève dans le leadership du mouvement indépendantiste. Oui, bien sûr, il y a d'autres personnes plus connues (Pierre Curzi, Bernard Drainville, Maka Kotto) à qui le PQ fait appel pour soi-disant incarner un renouveau dans le combat pour l'indépendance, mais leurs convictions pour la cause sont remisées au placard pour ne pas nuire aux chances d'élection du parti. Pauline Marois a préféré des opportunistes comme Scott McKay, des candidats dociles ou des candidatures douteuses comme celle de sa teneuse de bordel à Notre-Dame-de-Grâce à des gens d'honneur et d'action comme Jean-Claude St-André. Nous venons de perdre Pierre Falardeau que le PQ ne conservait que pour attirer les jeunes au parti comme il l'a fait avec Pierre Bourgault et Jacques Parizeau. Le parti n'est plus qu'une coquille vide sans âme, car il n'y a plus de place depuis des années au PQ (et au Bloc) qu'à des travailleurs d'élection et des quidams pour remplir artificiellement les salles lors des congrès et assemblées partisanes. En attendant, le robinet d'entrée des "votes ethniques" est grand ouvert, le PLQ poursuit sa vente de feu de l'État québécois et les amis du régime (Michael Sabia et autres serviteurs de la haute finance de Bay Street) s'en mettent plein les poches à nos dépens.
    D'ailleurs, la dernière "trouvaille" de matante Pauline (son Plan pour le Québec souverain: une rupture avec l'attentisme) tente de faire croire aux Québécois qu'un futur gouvernement péquiste, sans demander aux électeurs de mandat clair pour faire l'indépendance et à l'intérieur même du système politique que nos adversaires d'Ottawa ont mis en place pour nous faire disparaître comme peuple, mettra fin aux invasions de compétences d'Ottawa avec pleine compensation, assumera avec succès ses compétences reconnues (provinciales) et s'emparera des pouvoirs du fédéral qu'il choisira afin de rapprocher les Québécois de l'indépendance sans la faire. Quelle mauvaise foi et d'insulte à l'intelligence des Robert Laplante et Sasha Gauthier de détourner ainsi le sens des "gestes de rupture" en les plaçant dans une situation d'échec probable et s'en servir pour faire croire aux derniers souverainistes du parti que celui-ci n'a pas oublié sa raison d'être et les inciter à demeurer au sein du parti! Même si le programme était adopté par le parti (pas avant le Congrès national de mai 2011!), quelle garantie aura-t-on de la direction du PQ de le respecter, elle qui, sous André Boisclair pas plus tard que depuis le dernier Congrès national du PQ, l'a ignoré, malgré son adoption par les membres? D'ailleurs, ce plan ramène encore le sempiternel référendum comme moyen d'accession à la souveraineté sans préciser quand on compte l'employer. Après la question vague et non décisive de 1980, le détournement vers le confédéralisme de 1995 et la nébuleuse et insignifiante "feuille de route" provinciale de Boisclair en 2007, quel autre détournement de mandat les membres du PQ sont en train de se faire servir!
    Et, pourtant - et c'est ce qui est le plus frustrant -, les Québécois semblent toujours croire que seul le PQ peut et veut faire l'indépendance du Québec (à moins qu'il ne soit finalement parvenu, à l'élection du 8 décembre, à fédérer tous les fédéralistes déçus de Jean Charest et les désabusés de l'ADQ en plus des nationalistes mous). L'équation d'avant le Congrès de novembre 1974 était si simple et a été si éloquemment démontrée depuis: le pouvoir sans l'indépendance est une illusion; l'indépendance sans le pouvoir est impensable. Ottawa et les fédéralistes québécois ne respecteront la volonté du peuple québécois que le jour où il élira un parti avec le mandat de déclarer effective son indépendance par rapport au Canada et à son illégitime constitution de 1982.

  • Archives de Vigile Répondre

    22 septembre 2009

    Continuons le combat démocratique et libérateur
    Seule la convergence de la majorité des Québécois vers leur statut de souveraineté nationale à travers le PQ peut résoudre la crise de division sociale et politique que nous vivons aujourd’hui au Québec, afin d’éviter des lendemains beaucoup plus instables socialement et économiquement, dû à la mondialisation démographique et économique ainsi qu’aux pillages des ressources fiscales et naturelles du Québec
    JLP

  • Gilles Bousquet Répondre

    22 septembre 2009

    Tout un programme de M. Boileau : «Aux fédéralistes minoritaires de se casser la gueule au pouvoir, muselés par le cadre fiscal fédéral, jusqu’à ce que les Québécois en aient assez de ce supplice.»
    Quand ils se cassent la gueule, ils nous la cassent en même temps. Vous préconisez la politique du pire qui, selon M. Duceppe est la pire des politiques.
    Faudrait, selon vous, se réjouir des victoires du PQ, pas de celles du PLQ comme dans Rivière-du-Loup, juste pour que les Péquistes aient plus de chances de débarquer Mme Marois pour la remplacer par un autre chef qui va devoir être remplacé rapidement à son tour parce qu'il n'y aurait pas un nombre suffisant de souverainistes, ce qui serait la faute du chef péquiste qui n'en parle pas assez comme le chef du PI qui en parle tout le temps, lui ou qui n'est pas assez à gauche comme les chefs de Québec solidaire qui le sont bien plus.