Ségolène dérape à nouveau?

Il n’y a vraiment que les Français pour mettre leurs politiciens dans un tel embarras.

Ségolène Royal en visite au Québec - septembre 2007



« Ségolène Royal dérape à nouveau », titrait hier Le Télégramme de Bretagne, en lui faisant dire qu’il « n’y aura pas de référendum sur l’indépendance du Québec ». « D’ailleurs, Pauline Marois me l’a dit. Je ne crois pas trahir un secret en disant cela », a ajouté Mme Royal au journaliste Ludovic Hirtzmann.
À Québec, le bureau de Jean Charest s’est précipité sur la nouvelle comme la misère sur le pauvre monde ou comme des mouches sur un pot de miel ! On a charitablement envoyé le texte aux journalistes québécois avec la note suivante : « Voici un article que nous portons à votre attention. »
Coup de fil immédiat à Pauline Marois. Est-ce vraiment ce qu’elle a dit à l’amie Ségolène ? Coup de chance, Mme Marois répond au téléphone avant que son attachée de presse ne lui enlève le cellulaire des mains. « J’ai dit à Ségolène exactement ce que je dis depuis le début, à savoir que pour le moment, il n’est pas question de parler de la mécanique référendaire, mais de parler du projet de pays, et que quand viendra le temps, on sera bien capable d’identifier le moment où l’on voudra se poser la question. »
Ségolène aurait-elle été citée hors contexte ? « On ne veut pas susciter de polémique », répond Mme Marois en refusant de s’engager plus loin sur ce terrain glissant.
L’anecdote illustre à quel point l’échéancier référendaire demeure un sujet délicat pour les péquistes. Il est plausible que Mme Marois ait dit à Ségolène Royal qu’elle n’entrevoyait pas de référendum sur la souveraineté dans un avenir rapproché. Au lendemain de son couronnement à la tête du PQ, elle a déclaré qu’il faudrait peut-être attendre deux ou trois mandats. Mais il ressort une chose de l’incident, c’est que la souveraineté du Québec a été évoquée pendant la rencontre avec Ségolène Royal, et que le discours de Mme Marois a été davantage rassurant que porteur d’un programme pressé pour faire la souveraineté. C’est suffisant pour énerver les orthodoxes qui se méfient comme la peste de leurs leaders, qu’ils soupçonnent de faire passer la recherche du pouvoir avant l’objectif souverainiste.
Autre résultat de ce petit incident : Mme Marois n’a sans doute pas apprécié que Ségolène relate leur discussion devant des journalistes sur un sujet aussi délicat. Et Ségolène ne sera pas très heureuse d’apprendre que le bureau de Jean Charest a envoyé à la presse québécoise un texte de la presse française qui vise à la mettre dans l’embarras. Mais ne vous en faites pas, tout ce beau monde continuera de se faire des éloges à la prochaine occasion. Diplomatie oblige, n’est-ce pas ?
Il y a des similitudes entre les résultats des élections complémentaires de lundi et l’appui accordé à Pauline Marois dans le sondage du Soleil sur Charlevoix, publié hier matin. Les appuis débordent les lignes partisanes et vont aux individus. C’est Thomas Mulcair qui a fait la différence dans Outremont, et c’est la crédibilité du maire Denis Lebel qui a permis aux conservateurs de gagner aussi fort dans Roberval.
Pauline Marois n’est pas élue dans Charlevoix, mais il est intéressant de voir que 40 % des libéraux de cette circonscription lui accordent leur appui dans le sondage. Si la loyauté libérale était bétonnée, tous les libéraux auraient appuyé Mme Marois pour bloquer la progression de l’ADQ.
Pour le reste, le meilleur sympathisant péquiste, adéquiste ou libéral dans un sondage fausse la donne s’il ne sort pas voter le jour du scrutin. Voilà pourquoi les péquistes feront sans doute des efforts surhumains pour faire sortir le vote, lundi. Il n’y a rien de plus dangereux, pour un politicien, que de s’asseoir imprudemment sur un sondage favorable.
***
Jean Charest est en train de démontrer qu’il y a une vie après la vie pour les gens qui prennent leur retraite. La nomination de Dan Gagnier au poste de chef de cabinet du premier ministre, jeudi, confirme une fois de plus les problèmes de recrutement de M. Charest, à qui les sondages donnent peu de chances de réélection. Qui a les moyens de quitter un emploi lucratif pour se retrouver en chômage six mois plus tard après une campagne électorale casse-gueule ? Les retraités, monsieur !
Dan Gagnier n’est pas seul à occuper ainsi sa retraite : les journalistes à la retraite de Radio-Canada Jacques Rivard et Pierre Bouillon travaillent aux bureaux des ministres Christine Saint-Pierre et Monique Gagnon-Tremblay. Qui a dit que Radio-Canada était un nid de séparatistes ?
L’arrivée de Dan Gagnier sera un heureux changement pour les ministres et le personnel politique du gouvernement Charest, qui n’aimaient guère le côté abrasif de l’ancien chef de cabinet, Stéphane Bertrand. Gagnier a plus d’expérience que Bertrand, et il n’a pas besoin de crier pour convaincre…


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