Michaëlle Jean, écueil protocolaire entre Québec et Ottawa

Embouteillage politique dans la capitale aujourd'hui, apogée des fêtes du 400e

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Québec 2008 - l'art de détourner le sens la Fête

Québec -- Il y aura embouteillage politique dans la capitale aujourd'hui au moment de l'apogée du 400e anniversaire de Québec, ce qui crée des tensions protocolaires, surtout au sujet de la place occupée par la gouverneure générale Michaëlle Jean, a appris Le Devoir.
D'autres tensions sont à prévoir, liées à une manifestation antimilitariste contre un défilé de soldats, à une autre de citoyens réclamant des fêtes plus historiques, et à une dernière des syndiqués de la Ville de Québec voulant protester contre le maire Régis Labeaume.
Pour préparer le Salut à Champlain, cérémonie solennelle prévue ce matin, les négociations ont été âpres, a appris Le Devoir. Selon des sources au gouvernement du Québec, la place importante que Mme Jean a occupée depuis le début des festivités en France et au Québec en a irrité plusieurs et a même donné lieu à des conversations formelles entre les parties, où l'on a tenté de régler ce «problème». En théorie, selon les règles fédérales du protocole, un premier ministre d'une province canadienne ne peut parler qu'après la gouverneure générale, le premier ministre fédéral, tout ministre fédéral présent, le chef de l'opposition à la Chambre des communes, le lieutenant-gouverneur. Mais après de nombreuses discussions et une dizaine de projets-scénarios, on avait finalement opté, vers 16h30 hier, pour un ordre dans lequel le maire de Québec parlerait en premier (après une cérémonie autochtone), suivi par Jean Leclerc, président des Fêtes du 400e. Michaëlle Jean prendrait la parole par la suite, peu avant le lancement de «l'événement pancanadien» «Résonnons à l'unisson», où «les cloches des églises et institutions de plus de 600 villes canadiennes résonneront», qui aura lieu à 11h. Non seulement des cloches vibreront dans toutes les capitales des provinces et des territoires, mais aussi dans plus de 5000 communes de France. Ce n'est qu'après que le premier ministre du Québec prendra la parole. Chapelet de discours qui sera clos par l'allocution du premier ministre canadien Stephen Harper.
Un expert des questions de protocole a expliqué au Devoir que «ce n'est pas tant le fait [que Mme Jean] parle qui pose problème», mais le fait «qu'elle ait tendance à ne pas respecter sa fonction», qui devrait la contraindre, puisqu'elle n'a pas de légitimité démocratique, à «des propos de circonstance». Jamais Jeanne Sauvé [gouverneure générale de 1984 à 1990] -- «qui avait été ministre, elle» -- ne se serait permise de «réclamer une politique culturelle unique pour le Canada», illustre l'expert en faisant référence à une interview accordée par Mme Jean à un magazine canadien, révélée par Le Devoir plus tôt cette semaine.
Marois, «chiqueuse de guenilles»?
La chef péquiste Pauline Marois participera aux activités officielles mais aussi à une activité parallèle, soit au «cérémonial» du groupe «Commémoration Québec 1608-2008» (commemoration1608-2008.org). Ce spectacle qui aura lieu au parc de l'Amérique française, à côté du Grand Théâtre, veut proposer une vision «davantage historique» de la fête. Il a été organisé ces deux dernières semaines autour du chanteur Luck Merville, qui l'animera aux côtés d'Éric Waddell, professeur associé au département de géographie de l'Université Laval. Plusieurs personnalités connues des milieux nationalistes seront présentes, dont un invité d'honneur, le chansonnier Raymond Lévesque, Biz, du groupe de rap Loco Locass, la comédienne Marie Tifo, le romancier Yves Beauchemin, le documentaliste Hugo Latulippe, le peintre Luc Archambault. Les historiens Michel Lessard et Gaston Deschênes y seront aussi.
Aux yeux du chef de l'opposition officielle Mario Dumont, la présence de Pauline Marois à cet événement envoie un signal d'indécision et d'incohérence de la part d'une élue importante: «Quand tu te présentes à la fête, tu fêtes à plein et tu fêtes avec tout le monde, sinon il y a une expression au Québec [pour ça]: casseux de party ou chiqueux de guenilles.» L'attaché de presse de Mme Marois a estimé hier que cette déclaration révélait un «manque total de savoir-vivre» chez le chef de l'opposition. «Mme Marois n'est pas indécise ou "casseuse de party", elle participera à toutes les activités, celles officielles et celles parallèles», a répondu Marie Barrette.
Au reste, M. Dumont s'est inscrit en faux contre la vision fédérale de la fête, selon laquelle la fondation de Québec correspond à la fondation du Canada et Champlain constitue le premier «gouverneur du Canada», une affirmation répétée le 1er juillet par M. Harper. M. Dumont a déclaré que ce que «Champlain a installé ici, c'est la [...] première installation en Amérique et c'est ça qu'on célèbre cette année». Certes, a-t-il ajouté, «le Canada, c'est une construction politique qui est arrivée au cours des années et à laquelle le Québec a participé».
Horaire fou
L'horaire de la journée a été qualifié de «très lourd» par l'entourage du premier ministre Charest. Ainsi, MM. Harper et Charest auront peu de temps pour s'adresser à la presse, sauf le matin, où ils ne répondront qu'à une question de Radio-Canada et à une autre de la CBC. En après-midi, les deux chefs de gouvernement assisteront, aux côtés de quelque 700 dignitaires, au spectacle commémoratif Rencontres, où le comédien Yves Jacques personnifiera Samuel de Champlain. Par la suite, M. Harper devra partir en trombe pour Calgary, en Alberta, où il doit assister au Stampede. M. Charest se consacrera en soirée à son principal invité français, le premier ministre François Fillon. Le chef libéral Stéphane Dion et le chef bloquiste Gilles Duceppe seront aussi à Québec.


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