Les célébrations du 400e anniversaire de notre capitale nationale ont connu un succès populaire indéniable. Le peuple a été ravi. La beauté de ce qui s'est passé sur les plaines, ailleurs en ville et au «moulin», fut éblouissante. Le maire Régis Labeaume, Daniel Gélinas et leurs équipes méritent notre gratitude.
Notre nation tout entière est heureuse et fière d'avoir partagé la joie de cette célébration de la naissance de cette merveilleuse ville qui est sa capitale. La thèse réductrice de fête municipale est absurde et mesquine.
Albert Camus a écrit sur Québec, dans son journal de voyage en 1946, ces mots sublimes : «Le prodigieux paysage de Québec à la pointe du Cap Diamant devant l'immense trouée du Saint-Laurent, air, lumière et eaux se confondent dans des proportions infinies. Pour la première fois dans ce continent, l'impression réelle de la beauté et de la vraie grandeur. Il me semble que j'aurais quelque chose à dire sur Québec et sur ce passé d'hommes venus lutter dans la solitude poussés par une force qui les dépassait.» Peut-on rendre plus bel hommage à un lieu et à des gens ?
RENAISSANCE
Je suis un fervent de cette ville depuis toujours. Deux de mes trois enfants y sont nés. Les années les plus intenses de mon engagement public se sont passées dans cette ville que j'ai vue s'embellir et s'enrichir sous l'habile direction de Jean-Paul L'Allier puissamment secondé par notre État national. La science, la technologie -incarnées par l'Institut national d'optique en particulier -sont venus s'ajouter à la beauté des lieux. J'ai connu Saint-Roch pauvre et déprimé, je l'ai vu renaître beau et prospère.
Comme l'aspect spectaculaire des fêtes fut impeccable et qu'elles sont terminées, je me permets d'exprimer maintenant de très sérieuses réserves quant à leur symbolique globale et Paul McCartney n'est pas en cause. La France a bien invité la Grande-Bretagne au deuxième centenaire de sa révolution sans rancoeur pour la Guerre de sept ans !
D'abord, je n'ai pas aimé qu'une telle célébration soit inaugurée par la représentante de la reine d'Angleterre. Elle incarne une institution désuète, voire humiliante, et n'est aucunement la «successeur de Champlain». Elle n'évoque qu'une encombrante séquelle coloniale, en tout respect pour la personne...
ÉMERVEILLEMENT
De plus, notre épopée historique nationale n'a pas été évoquée convenablement. On a outrageusement occulté nos couleurs, nos symboles. Notre gouvernement a manqué de dignité devant l'argent fédéral. La fierté d'une nation n'a pas de prix et on a raté une occasion unique de le démontrer.
Mon voeu pour l'avenir de cette ville extraordinaire, c'est qu'elle devienne la capitale d'un pays «complet et reconnu» comme l'a dit René Lévesque, aux étudiants de l'Université Laval, quelque temps avant sa mort.
Il faut que dans ces lieux prédestinés se prennent un jour toutes les décisions concernant notre vie nationale et internationale, que s'y établissent de nombreuses ambassades et que son aéroport voie enfin défiler l'important trafic de la capitale d'un vrai pays. Ce jour-là, nous serons encore plus émerveillés qu'Albert Camus.
Québec nos amours
Québec 2008 - l'art de détourner le sens la Fête
Bernard Landry116 articles
Ancien premier ministre du Québec, professeur à l'UQAM et professeur associé à l'École polytechnique
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