Le Point écrit que le modèle québécois, «ce système hybride, qui mélange l’individualisme des colons et la recherche du bien-être national, reflète le double héritage du libéralisme anglo-saxon et d’un sens très français du collectif.» Sur notre photo, les festivités de la Fête nationale sur les plaines d’Abraham, à Québec, le 23 juin dernier. (Photo archives Reuters)

Louise Leduc - «Le Québec, c’est une société chaleureuse dont les habitants ressemblent à des Français de bonne humeur.»

Qui a écrit cela? [L’hebdomadaire français Le Point->14376], qui consacre à son tour un numéro aux 400 ans de Québec en un dossier intitulé «Le Québec, bienheureux cousin d’Amérique».
La poutine et les dépanneurs sont bien sûr évoqués, entre deux envolées sociologiques.
Sur le tutoiement : «Plus qu’une familiarité, c’est un signe de parité dans une société minoritaire qui a dû se serrer les coudes pour survivre. (…) Le tutoiement marque l’appartenance à une société distincte, d’origine paysanne, qui tient à ses racines et met ses citoyens sur un pied d’égalité.»

Sur le modèle québécois: «(Il) a réussi le mariage rare d’un libéralisme économique performant et d’un filet de solidarité sociale. Ce système hybride, qui mélange l’individualisme des colons et la recherche du bien-être national, reflète le double héritage du libéralisme anglo-saxon et d’un sens très français du collectif.»
Ceux qui ont été choqués d’entendre Gilles-Martin Chauffier, rédacteur en chef de Paris Match, qualifier ce printemps les Québécois de «paysans avec des cartes de crédit» (à l’émission de Christiane Charrette) trouveront peut-être ici quelque réconfort.
Au Québec, les rapports sociaux «sont beaucoup plus naturels. (…) Le Québec est une cure de simplicité et ça m’a fait le plus grand bien», dit Alain Juppé, ex-premier ministre français qui a passé un an au Québec après que sa carrière politique en France eut été interrompue par une affaire de fraude.
À l’inverse de Paris Match, surtout, qui avait multiplié les références montréalo-montréalaises dans son numéro sur le 400e anniversaire de Québec, Le Point a bien vu que ce 400e, c’est au premier chef celui de la ville de Québec. C’est bien dit, sans que cela empêche Le Point de couvrir large.
«Pendant longtemps, nous étions à la fois vos «cousins» et les «maudits Français». Où en est-on de cette relation amour-haine?» demande le reporter Dominique Audibert.
Réponse d’Yvan Lamonde, professeur d’histoire à l’Université McGill : «Les Québécois se sont décolonisés mentalement de la France. (…) Les Français sont devenus moins condescendants, les Québécois plus affirmés.»
Plus affirmés, mais pas à une contradiction près. Se trouve ainsi cité Michel Venne (ex-commissaire du groupe de travail sur le financement du système de santé), décrit comme un «souverainiste convaincu», qui déclare pourtant: «La vieille peur de disparaître comme nation ne s’est pas effacée. La langue française n’est plus menacée, les francophones ont fait leur chemin dans la vie économique et la richesse moyenne des Québécois s’est accrue. Il n’y a plus de raison objective de vouloir à tout prix faire un pays.»
Qu’en conclure? Coup de fil à Michel Venne. «Il aurait fallu que le reste de ma pensée soit consigné», dit-il. Les raisons objectives ne sont peut-être plus là, mais l’intérêt de faire la souveraineté demeure, «pour des questions d’identité et pour être maîtres chez nous».
Un coup de chapeau est par ailleurs donné à la Loi 101, sans laquelle «le Québec francophone ne serait probablement qu’une curiosité linguistique en voie de disparition». La paternité de cette loi est bien attribuée à Camille Laurin, décrit comme «un psychiatre aux cheveux teints».
Enfin, l’histoire ne dit pas qui est cet «amateur local» qui a décrit la poutine comme «un paquet de frites qui débandent dans de la sauce brune avec du fromage qu’aurait copulé avec du pop-corn».