Les farceurs

Heureusement, le ridicule ne tue pas. Sinon, il y a fort à parier que le cabinet Harper serait décimé. Surtout quand il s’agit de l’Afghanistan.

Afghanistan - torture, mensonges, censure et cafouillage


M. Harper et ses acolytes n’ont donc rien à craindre. Ce sont plutôt les soldats canadiens qui risquent leur vie, à l’autre bout du monde. Et quoi que l’on pense de la mission des militaires là-bas, ces derniers méritent mieux que le concert de maladresses, de mensonges et de paranoïa qui entache désormais la politique du Canada vis-à-vis de l’Afghanistan.
Si le gouvernement Harper voulait dégoûter à jamais de la mission canadienne l’opinion publique, les diplomates, les soldats, les travailleurs humanitaires, les journalistes et même les extraterrestres, il n’agirait pas autrement.
Il ne suffit pas de multiplier les appels au patriotisme le plus débile pour que tout le monde se mette au garde-à-vous.
Faut-il rappeler le contrôle maniaque de l’information exercé par le bureau du premier ministre, y compris sur de vulgaires statistiques? Ou le clair-obscur qui entoure les contrats attribués par le Canada en Afghanistan, dont certains ont peut-être profité à un homme soupçonné de crimes de guerre? Faut-il parler du groupe d’officiers qui sèment la pagaille en révisant les demandes d’accès à l’information? Et que dire des études pour manipuler l’opinion? L’une d’elles allait jusqu’à déconseiller l’utilisation d’expressions jugées négatives, comme «11 septembre» ou «protéger les Canadiens».
Le comble du ridicule a été atteint lorsque le ministère des Affaires étrangères a censuré son propre rapport sur les droits de l’homme en Afghanistan. Le ministère a commencé par nier l’existence du document. Puis il en a diffusé une version tellement censurée qu’on aurait pu la confondre avec un manuel d’introduction au ski nautique.
Même en présence d’un gorille de 500 kilos en train de casser la baraque, le gouvernement persiste à dire que tout va bien.
L’été dernier, le ministre de la Défense de l’époque, Gordon O’Connor, déclarait encore que l’armée afghane pourrait commencer à remplacer les troupes canadiennes dès 2008. Du délire à l’état pur.
Cet automne, malgré l’accumulation de preuves sur la torture dans les prisons afghanes, le premier ministre affirmait que ce n’était qu’une calomnie répandue par les talibans.
Et quand le Canada a cessé de transférer ses prisonniers aux autorités afghanes, cela n’a pas empêché le ministre des Affaires étrangères, Maxime Bernier, de soutenir le contraire, avec son assurance de coq persuadé que son chant réveille le soleil tous les matins.
Cette semaine, un comité présidé par l’ancien ministre John Manley s’étonnait que les Canadiens restent «dubitatifs» au sujet de la mission en Afghanistan. Il appelait le gouvernement à des échanges plus «ouverts» avec eux.
Voilà qui est joliment formulé. En termes moins diplomatiques, cela signifie que les Canadiens en ont ras le bol qu’on les prenne pour des imbéciles.
«La diplomatie, dit-on, c’est l’art d’envoyer quelqu’un au diable en lui expliquant la chose de façon à ce qu’il ait vraiment hâte d’y aller.»
Le plus étonnant, dans les circonstances, ce n’est pas que 66 % des Québécois s’opposent à la présence de militaires canadiens en Afghanistan. C’est que 34 % y croient encore.
Il faut conclure que ces gens sont indulgents. Ou que l’Afghanistan leur tient vraiment à cœur. Ce qui n’empêche pas une certaine désillusion, comme en témoigne cette blague.
Deux personnes se croisent au ministère des Affaires étrangères, à Ottawa.
«Tu connais la dernière blague politique qui circule dans le ministère? demande l’un.
— Tu peux me la raconter, mais je te préviens, répond l’autre. Tu ne m’as pas reconnu, mais je suis Maxime Bernier, le ministre.
— Ça ne fait rien, je t’expliquerai jusqu’à ce que tu comprennes.»
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