Le spaghetti italien, ce vilain raciste

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Le totalitarisme progressiste fait des ravages

Nous vivons une époque formidable, mais un peu délirante sur les bords, au cours de laquelle on ne rigole plus avec l’injustice. Ça, non!


En Grande-Bretagne, des parents veulent bannir le conte de La Belle au bois dormant des écoles primaires. Imaginez. Le Prince charmant donne un bisou à la Princesse endormie sans avoir obtenu son consentement! Un très mauvais exemple pour la jeunesse! Ne faites pas semblant que vous l’aviez oublié, bande d’inconscients!


D’accord, je vous le concède. Il n’est pas toujours nécessaire d’interdire. Parfois, il suffit de corriger. Récemment, l’opéra de Florence a réécrit la finale tragique du chef-d’œuvre Carmen, composé en… 1875. On trouvait qu’une jeune bohémienne tuée par un brigadier fou de jalousie, ça ne fait pas très moderne. Dans la nouvelle version, Carmen s’empare d’une arme et elle abat son agresseur. Un dénouement plus acceptable, semble-t-il.


Des fois, on s’ennuie de la réponse servie par Serge Gainsbourg à l’académicien Michel DROIT, qui se scandalisait de l’entendre chanter La Marseillaise sur un air reggae.


— On n’a pas le con d’être aussi DROIT.


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À défaut de changer un monde profondément injuste, on se réfugie dans l’imaginaire. À défaut de faire avancer le train immobilisé, on ferme les rideaux et on secoue un peu le wagon, pour que les passagers croient que l’engin est reparti.


L’an dernier, la British Medical Association a recommandé à ses membres de cesser d’utiliser des expressions comme mères ou femmes enceintes. Elle craignait que cela insulte les transgenres qui ont un enfant. On suggère plutôt l’expression personnes enceintes, qui ne cause de chagrin à personne.


En 2015, à l’Université d’Ottawa, la Fédération étudiante a fait annuler un cours de yoga. Pour elle, il s’agissait d’un emprunt scandaleux à la culture indienne. À la limite du pillage colonial. Même chose en Grande-Bretagne, où des chefs cuisiniers se sont fait rabrouer pour avoir baptisé des recettes «ragoût jamaïcain» ou «riz tunisien». On estimait qu’ils avaient commis une «microagression» raciste contre les Jamaïcains et les Tunisiens.


Fiou. Si la tendance se maintient, notre spaghetti italien et notre pâté chinois n’ont qu’à bien se tenir… 


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De gauche ou de droite, les censeurs sont tous les mêmes. Ils veulent protéger nos esprits fragiles contre ce qui est impur. À commencer par les mots. 


— Chez nous, Québec Solidaire a décidé de remplacer le mot patrimoine par l’expression héritage culturel, jugée moins sexiste.


— Aux États-Unis, la National Rifle Association, le puissant lobby des armes, déteste le mot silencieux. Trop associé à des criminels comme Al Capone. Elle aime mieux parler de suppresseur. On a tout de suite l’impression que ça tue plus gentiment, avouez-le.


— En France, plusieurs documents officiels n’utilisent plus le mot chômeur. Ils lui préfèrent l’expression bien javellisée de salarié en transition.


Surtout, défense d’applaudir. En 2015, l’aile féministe de l’Union nationale des étudiants britanniques a banni les applaudissements. Pas pour abréger ses réunions, rassurez-vous. L’organisation assurait que le bruit des applaudissements peut «créer de l’anxiété» chez certaines personnes. Pour montrer son approbation, lors d’un discours, les gens étaient plutôt invités à utiliser «les mains jazz», un geste silencieux.


Plus surprotecteur, tu obliges aussi le port d’un tuba et de palmes, pour pouvoir affronter une inondation soudaine.


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Ce n’est qu’un début, continuons le combat. À quand une nouvelle version du film Titanic, dans lequel le navire gagne enfin contre l’iceberg? Ça nous changerait. En plus, ça donnerait une finale provoquant beaucoup moins d’angoisse dans le public.


Et le petit chaperon rouge? Vous avez pensé à l’histoire du Petit chaperon rouge? Aujourd’hui, il apparaît complètement démodé de parler d’un grand méchant loup. Même que ce genre d’insulte salit l’image d’un honnête prédateur essentiel à la biodiversité. De plus, le petit chaperon rouge ne transporte plus de pot de beurre, car il est certainement devenu végétalien. Ajoutons aussi que la grand-mère n’est plus malade, depuis qu’elle déguste les multiples variétés de mangers mous parrainés par notre ministre de la Santé, Gaétan Barrette.


Quant au chasseur, faut-il vraiment qu’il fasse partie de notre histoire 100% jovialiste? À la rigueur, on lui offre un rôle s’il se reconvertit au tricot. Ou à la pétanque. Parce qu’entre nous, l’idée de se promener dans les bois pour chasser un animal appartenant à une espèce menacée, c’est complètement out. Un cas classique de «spécisme», si vous voulez mon avis. Et le premier qui demande de quoi il s’agit sera privé de son dessert sans sucre et sans gluten, est-ce bien compris?