Crise du financement

Les cinéastes invités à se rassembler

Cinéma québécois : crise de financement


Robert Lepage a dénoncé l'hégémonie montréalaise. Quarante-trois réalisateurs ont critiqué la productrice Denise Robert. Fabienne Larouche a accusé deux fonctionnaires d'avoir abusé de leurs pouvoirs... Mettons fin aux guerres intestines, disent une quarantaine d'artisans du cinéma, qui invitent leurs collègues à se rassembler pour trouver des solutions face à la crise du financement du cinéma québécois.
Luc Picard, Pascale Buissières, Ken Scott, David La Haye, Christian Larouche et François Girard ont signé une lettre ouverte publiée aujourd'hui en page A19, dont les porte-parole sont les producteurs Roger Frappier (La Grande Séduction) et Pierre Even (C.R.A.Z.Y.). Contrairement aux 43 réalisateurs qui ont aussi uni leurs voix la semaine dernière, ils ne s'opposent pas aux enveloppes à la performance, remises par Téléfilm Canada aux producteurs dont les films ont eu du succès. Ils vantent "une cinématographie nationale qui ne dédaigne ni les succès commerciaux ni les succès critiques".
Selon René Malo, Louis Bélanger, Ghyslaine Côté, Pierre Falardeau et Yves Pelletier, la "crise relève d'abord et avant tout d'un manque crucial de fonds". Ils appellent "toutes les forces vives du milieu à travailler ensemble afin de convaincre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial" d'investir dans la production cinématographique.
"Nous sommes tous dans le même bateau. Le problème fondamental du cinéma québécois est le financement", dit Roger Frappier.
"Il y a eu beaucoup d'interventions sur le comment des choses, poursuit Pierre Even. Il faut se concentrer sur le vrai problème."
Vendredi dernier, la ministre de Patrimoine Canada, Bev Oda, a refusé d'octroyer le fonds d'urgence de 20 millions que demandaient une quinzaine de producteurs, dont Denise Robert, Roger Frappier, Pierre Even et Marc Daigle. La ministre a fouillé en vain dans tous les fonds de tiroirs des programmes du Ministère. "Il n'y a pas d'argent frais pour cette année", a réitéré hier Véronique Bruneau, attachée de presse de Bev Oda.
Véronique Bruneau rappelle que la politique du long métrage est en révision. "Il faut une politique solide pour que l'argent soit distribué de façon efficace, dit-elle. Il n'y a pas de consensus même à l'intérieur de l'industrie. Des gens sont satisfaits du système des enveloppes, d'autres non. "
Pierre Even et Roger Frappier sont en faveur du programme des enveloppes, dont ils ont d'ailleurs déjà bénéficié. Mais selon eux, le débat n'est pas là. Il faut d'abord et avant tout rassembler le milieu.
"La crise du financement n'est pas causée par le système des enveloppes. Si on enlève les enveloppes, il n'y a pas plus d'argent, dit Pierre Even. On manque de financement pour répondre au foisonnement créatif."
Dans leur lettre, les deux producteurs et leurs collègues acteurs, distributeurs et réalisateurs mettent de la pression sur Ottawa, mais aussi sur Québec. "Dès que Charest sera de retour d'Europe, nous avons l'intention de le rencontrer. Il faut que la SODEC ait plus de moyens ", dit Roger Frappier.
En 2003, le ministère de la Culture a augmenté le budget de la SODEC (dont l'aide financière octroyée aux cinéastes est uniquement sélective). Mais trop de projets sont soumis pour l'argent disponible. Depuis le début de l'année, 16 longs métrages ont été financés, sur plus de 50 projets. "Il faut faire des choix selon la diversité des oeuvres, des genres et des cinéastes ", dit la porteparole Nancy Bélanger.
Selon Roger Frappier, le budget de la SODEC doit augmenter. "Le cinéma est une industrie qui crée de l'emploi. Elle a une double fonction économique et culturelle."
Le producteur énumère d'autres solutions, dont La Presse faisait état samedi dernier : imposer une taxe à billetterie comme en France, puiser dans les surplus de la Régie du cinéma, favoriser les coproductions, augmenter les crédits d'impôts, favoriser le financement privé, etc.
Pour Roger Frappier, Pierre Even et leurs collègues qui ont signé la lettre ouverte publiée aujourd'hui, baisser les budgets des films ou le nombre de productions financées n'est pas une solution. "Revenir à des budgets réduits serait un désastreux retour en arrière et produire moins de films équivaudrait à renoncer à occuper notre marché national et restreindre l'accès de certains de nos films au marché international ", écrivent-ils.
La " crise " tombe mal, souligne Roger Frappier. " Le cinéma québécois a atteint une grande maturité dans les dernières années. On l'a vu avec le succès des Invasions barbares, de la Grande Séduction et de C.R.A.Z.Y.. Non seulement ces films ont du succès au Québec, ils percent le marché international. C'est la première fois en 20 ans que trois films québécois, coup sur coup, ont du succès en France et dans plusieurs territoires. "


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