"Hors de Montréal, point de salut !"

Robert Lepage réclame plus d'équité envers les régions dans le financement du cinéma

Cinéma québécois : crise de financement

Robert Lepage et le producteur de la défunte boîte Ex aequo, Mario St-Laurent, considèrent que les organismes de financement du cinéma devraient donner une petite chance aux régions, qui ont bien du mal à livrer une saine compétition à la puissante industrie montréalaise du film.
"La télévision aujourd'hui, c'est quoi ? C'est des téléséries qui se passent à Longueuil et à Outremont, s'insurge Lepage. C'est ça le Québec ? Ce n'est pas vrai, il y a une province énorme. Il y a le même nombre de personnes qui habitent en dehors de la ville et de la région immédiate de Montréal."
Mais bien souvent, ces gens ne sont pas bien représentés, tant au petit qu'au grand écran. Car les Téléfilm de ce monde ne démontrent pas une très grande sensibilité envers les régions, affirme Mario St-Laurent. "Nous nous étions donné comme mission de développer l'industrie cinématographique de Québec, mais on dirait que ça nous a désavantagés. On a bien tenté de défendre notre point de vue devant Téléfilm. On leur a dit à quel point le projet de La Trilogie des dragons était important pour la région de la capitale. Mais regardez le résultat... Ils n'ont aucun intérêt pour le développement régional. En dehors de Montréal, point de salut !"
Depuis 2003, depuis La Face cachée de la lune, la capitale n'a en effet accueilli aucun tournage majeur. Une situation inquiétante pour les artisans de l'industrie, mais aussi pour la diversité culturelle québécoise. Car selon Robert Lepage, il est naturel que l'industrie cinématographique soit concentrée dans la métropole pour des questions pratiques, "mais pas que la culture québécoise y soit polarisée. Aussi bien mettre la clé dans la porte du Québec, aussi bien fermer la province. Ça va être moins compliqué pour Montréal", ironise-t-il.
Système injuste
Le réalisateur affirme en outre que le système de financement de Téléfilm est injuste puisqu'il ne favorise pas le cinéma d'auteur "C'est très clair que si tu fais Boys 6 et que tu fais du cash, tu n'as pas besoin de présenter un scénario l'année d'après et tu fais Boys 7. Et les gens qui gagnent des prix, qui représentent le Canada ailleurs, ça n'a pas de valeur."
Mario St-Laurent est du même avis. Selon lui, il est inacceptable que la performance des producteurs au box office soit aussi importante lorsque vient le temps d'octroyer des subventions. Et il donne l'exemple de Denise Robert, qui part toujours avec une longueur d'avance puisqu'elle récolte beaucoup plus d'argent, plus "d'enveloppes à la performance" que les autres en raison de la popularité de ses productions (Les Invasions barbares, Ma vie en cinémascope). "Tous les producteurs devraient pourtant être égaux", lance-t-il.
Malgré tout, M. St-Laurent n'a pas perdu tout espoir de continuer à faire du cinéma dans la capitale. Il souhaite toutefois que la présente crise de confiance qui secoue Téléfilm Canada contribuera à revaloriser le cinéma d'auteur, à changer les règles et à redonner aux régions la voix qui leur fait cruellement défaut.


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