Le débat sur l'exploitation des gaz de schiste a atteint son point d'orgue hier alors que la privatisation en douce de cette ressource publique par le gouvernement Charest est en voie de devenir une question centrale du débat.
Le Vérificateur général doit examiner les circonstances jusqu'ici fort obscures qui ont entouré la cession à des entreprises privées — et à des acteurs gouvernementaux, de société d'État ou même d'Hydro-Québec — des droits miniers que possédait la société d'État après y avoir investi des sommes importantes, mais inconnues jusqu'ici.
C'est ce qu'ont réclamé hier les membres du Comité des citoyens et citoyennes pour la protection de l'environnement maskoutain dans un mémoire percutant déposé devant les commissaires du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement.
Leur questionnement a été en quelque sorte élargi en soirée par le mémoire du mouvement Maîtres chez nous au 21e siècle (MCN-21). Selon ce groupe versé dans les questions d'énergie, la cession en douce du gaz contenu dans les shales gazéifères de la vallée du Saint-Laurent est le «vol du siècle», car le gaz, tout comme l'hydro-électricité, a été décrété ressource collective lors de l'élection quasi référendaire de 1962, expliquait hier au Devoir le porte-parole du groupe, Daniel Breton.
«Seul le peuple peut défaire ce que le peuple a décidé. Et certainement pas la ministre Nathalie Normandeau, derrière des portes closes et au profit notamment de cadres ou de personnalités qui n'arrêtent pas d'aller se réfugier l'une après l'autre dans cette industrie», ajoute-t-il.
Quant au mémoire des Maskoutains, il soulève une page fort nébuleuse de l'histoire d'Hydro-Québec, qui a pris son origine dans un projet du gouvernement Landry de 2002. À cette époque, André Caillé, aujourd'hui président de Junex et de l'Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ), était le p.-d.g. d'Hydro-Québec.
Cette société d'État propose donc en 2002 d'investir durant une décennie des sommes importantes pour prendre la direction d'une nouvelle industrie gazière et pétrolière au Québec. Sa proposition se retrouvera par la suite encadrée dans un plan formel d'exploration 2002-2010. Ce plan prévoyait qu'Hydro-Québec s'associe avec des entreprises privées dans des projets dont les profits s'ajouteraient à ses revenus, aux redevances et taxes versées à l'État.
Mais quand le gouvernement Charest prend le pouvoir, le nouveau p.-d.g. d'Hydro-Québec, Thierry Vandal, «démantèle la division Pétrole et Gaz et offre sur un plateau d'argent à des compagnies privées, dont la plupart sont formées par d'anciens employés de la Soquip et d'HQ Pétrole et Gaz, les permis d'exploitation dont Hydro-Québec avait été titulaire depuis 40 ans. Ces permis furent cédés cinq ans à peine après la découverte de structures géologiques laissant croire à la présence de pétrole dans la région», poursuit le mémoire des citoyens maskoutains.
Junex, où on retrouve alors André Caillé, a été une des entreprises qui a obtenu des claims jusque-là détenus par Hydro-Québec.
«Pourquoi, poursuit le mémoire des Maskoutains, avoir démantelé en catimini, sans débat public, des structures d'État alors que les premiers indices positifs de découvertes d'hydrocarbures abondaient? Et juste au moment où il était logique d'entrevoir des profits dans un avenir rapproché? Et pourquoi retrouve-t-on autant de personnes qui étaient au courant de la chose à la tête d'entreprises de l'APGQ? S'agit-il de délit d'initié? Voilà pourquoi nous demandons que le BAPE demande au Vérificateur général de faire une enquête approfondie sur tout cet aspect de la filière des gaz de schistes».
Gaz de schiste
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