Mitraillée de questions par l'opposition péquiste, hier à l'Assemblée nationale, la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, a révélé les dégâts subis par deux fonds de l'État québécois, déposant de la Caisse de dépôt. Photo La Presse Canadienne
Tommy Chouinard (Québec) Autre coup dur pour les finances publiques du Québec. Avec le dérapage financier de la Caisse de dépôt et placement, le Fonds d'amortissement des régimes de retraite (FARR) a perdu 8,7 milliards de dollars en 2008, soit le quart de ses avoirs. Et le Fonds des générations, créé pour rembourser la dette, a fondu de 326 millions de dollars, une baisse de 22,4%.
Mitraillée de questions par le député péquiste François Legault, la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, a révélé hier à l'Assemblée nationale les dégâts subis par ces deux déposants de la Caisse de dépôt. Québec refusait jusqu'à maintenant de les dévoiler, même si les pertes totales de la Caisse, 40 milliards pour 2008 (-25,6%), étaient connues.
La saignée de 8,7 milliards du FARR a une incidence directe sur les finances publiques, déjà étranglées. Québec sera forcé de renflouer les pertes sur un horizon d'environ 10 ans. La dette gonflera donc encore davantage. Par conséquent, les intérêts que le gouvernement doit payer chaque année seront aussi en hausse. Le service de la dette atteint déjà sept milliards de dollars cette année.
«Effectivement, il va y avoir un impact. Je vais déposer bien sûr un budget très prochainement, avec un détail sur ce volet-là», a affirmé Monique Jérôme-Forget, refusant d'aller plus loin. La ministre a déjà annoncé que le budget, attendu le 19 mars, sera écrit à l'encre rouge. Les pertes désastreuses du FARR rendent son casse-tête encore plus complexe.
Au 31 décembre 2008, 26,1 milliards se trouvaient dans les coffres du FARR, une baisse de 25,6% en un an. Ce fonds a été créé en 1993 pour capitaliser une dette de 67 milliards qu'a le gouvernement envers les régimes de retraite de ses employés. Québec ne finance pas le FARR à partir de ses revenus. Il emprunte pour faire les dépôts nécessaires. Le gouvernement a fait le pari que les rendements enregistrés par la Caisse, chargée de faire fructifier le fonds, seront supérieurs aux intérêts payés sur les emprunts. Les résultats de la Caisse pour l'année 2008 rendent ce pari encore plus risqué.
Le Fonds des générations est passé de 1,626 à 1,3 milliard en un an en raison d'un rendement de -22,4%. Le gouvernement Charest a créé ce fonds en 2006 afin de rembourser la dette du Québec. Il a décidé de ne pas rembourser directement ce fardeau qui dépasse les 125 milliards de dollars. Il a plutôt demandé à la Caisse de faire fructifier les sommes versées au fonds et provenant entre autres de redevances d'Hydro-Québec.
»Pas une bonne nouvelle»
Le gouvernement prévoyait un rendement de 7,7% par an en moyenne. Mais comme le rendement a été de 5,6% en 2007 et de -22,4% en 2008, les débuts du fonds sont très difficiles. «Ce n'est pas une bonne nouvelle», a convenu Monique Jérôme-Forget hier. Elle a déjà soulevé la possibilité de suspendre les versements prévus au Fonds des générations - 822 millions l'an prochain - pour amoindrir le déficit. La dette, elle, n'a toujours pas diminué.
La ministre se défend d'avoir appris et caché les pertes de la Caisse et de l'un de ses déposants, le Fonds des générations, lors de la campagne électorale. François Legault a rappelé qu'à titre de ministre responsable du Fonds, elle reçoit un «état de situation» chaque mois. Il a cherché à savoir à quel moment Mme Jérôme-Forget a su que les pertes étaient inquiétantes.
La ministre dit avoir appris le 17 octobre, avant le déclenchement des élections, que le Fonds des générations fondait de 8,9%, ce qu'indiquait le rapport de septembre. «Ce n'est qu'au retour de l'élection, le 10 décembre, qu'il y avait une perte de 18% au Fonds des générations. Donc, en campagne électorale, c'est clair, c'était moins de 9% qui était perdu au Fonds des générations», a-t-elle affirmé à la période des questions.
Selon l'attaché de presse de Mme Jérôme-Forget, Catherine Poulin, le ministère des Finances a reçu «vers la fin novembre», donc en pleine campagne électorale, le rapport du mois d'octobre révélant les pertes de 18%. «Mais la ministre n'était pas là. Elle était candidate», a-t-elle dit.
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