Climat de crise à la Caisse de dépôt

trois cadres du secteur du placement qui totalisent 42 ans d’expérience à la CDP font un portrait dévastateur de l’ambiance et de la gestion du PDG Michael Sabia.

L'affaire de la CDPQ - conséquences et réformes

Olivier Bourque - Même si la Caisse de dépôt et placement du Québec continue de dire que les récents changements de structure et à la direction sont souhaitables après l’année de misère 2008, une grogne interne s’est installée et ne vise pas seulement le programme de bonis mais aussi la gestion mise en place à l’institution.

Une lettre anonyme est parvenue à Argent dans les derniers jours. Dans celle-ci, trois cadres du secteur du placement qui totalisent 42 ans d’expérience à la CDP font un portrait dévastateur de l’ambiance et de la gestion du PDG Michael Sabia.
La lettre comprend également quelques informations dont celle du programme de bonification spécial «gênant» qui s’appuie sur le renversement de pertes sur papier et non sur la vraie valeur ajoutée. Une information qui avait déjà coulé aujourd’hui dans le quotidien La Presse.
Les signataires questionne également les «travaux cosmétiques en gestion de risques» effectués par la firme américaine McKinsey à coup de plusieurs dizaines de millions de dollars», une action qualifiée de visible et facile.
En raison du caractère anonyme de la lettre, l’identité des cadres qui l’ont écrite n’a pu être confirmée. Toutefois, selon plusieurs sources, les informations comprises dans la missive sont très précises et témoignent de l’expérience d’intervenants proches des dossiers courants du «bas de laine des Québécois» notamment sur la question des bonus et des firmes engagées.
Cette lecture de la situation est partagée par plusieurs sources externes évoluant tout près de la Caisse qui ont confirmé à Argent que «que la situation est très préoccupante». «Des personnes m'appellent et me disent si tu vois quelque chose pour moi, dis le moi, le climat est vraiment très difficile», nous a confié une autre source.
Appel à l’aide
Dans cette lettre, les gestionnaires lancent un véritable cri du cœur qui s’apparente également à un appel à l’aide. Ils ont donc décidé d’écrire cette lettre «parce que toutes les chaînes de communication sont actuellement brisées dans cette organisation avec la conséquence que s’y sont installées : nervosité, incompréhension, peur, dysfonction et absence de confiance envers nos patrons et le président».
Les signataires ne font pas dans le négativisme. Ils espèrent plutôt que cette lettre «éveillera les consciences et incitera le président et les hauts dirigeants à modifier leurs comportements et façons de faire».
Les signataires écorchent gravement le leadership du remplaçant d’Henri-Paul Rousseau. «Il nous est impossible d’avoir une discussion franche, que ce soit dans un cadre organisé ou non, puisque nous craignons la délation de la part de nos collègues», est-il écrit dans la lettre.
Il s’agit d’une lecture qui n’est pas partagée par la Caisse de dépôt. Selon l’institution, les changements étaient nécessaires et cela occasionne une période de turbulences.
«Je ne crois qu’on doit s’excuser pour effectuer des changements à la Caisse de dépôt après des pertes de 40 milliards de dollars l’an dernier. Les Québécois voulaient un changement et Michael Sabia a entendu», a estimé le porte-parole Maxime Chagnon lors d’un entretien.
Durant les derniers mois, plusieurs cadres sont partis de l’institution. Les deux-tiers du comité de direction sous Henri-Paul Rousseau sont disparus. D’autres sont en arrêt de travail notamment Suzan Kudzman, pour une cause et une période indéterminée et Ghislain Parent (numéro trois), qui selon nos sources serait en burn-out.
D’autres piliers de l’organisation sont également partis notamment Gilles Godbout, ancien sous-ministre aux Finances et qui était vice-président services financiers, et Ghislain Gauthier, grand responsable de l’investissement dans British Airport Authority (BAA) qui partirait à Citigroup.
La situation inquiète également Michel Nadeau, directeur-général de l’Institut sur la gouvernance des organisations privées et publiques. «Les nombreux départs non-prévus à la CDP amènent plusieurs questions et une période de flottement. Pourquoi ces gens-là sont-ils partis ?», se demande-t-il.
M. Nadeau se questionne aussi sur l’arrivée de tous ces nouveaux cadres qui connaissent moins les marchés boursiers canadiens et québécois. «C’est certain que c’est inquiétant pour la suite», a-t-il dit.


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