La Caisse de dépôt change de cap

L'affaire de la CDPQ - conséquences et réformes




Hélène Baril - (Montréal) Pour la première fois de son histoire, la Caisse de dépôt a offert à ses déposants d'investir dans des portefeuilles indiciels plutôt que de laisser ses gestionnaires professionnels faire fructifier leur argent.
La proposition, qui est actuellement à l'étude dans les comités de placement des différents déposants, est un changement de cap majeur pour la Caisse: depuis sa création, l'institution emploie des dizaines de professionnels dont le mandat est justement de faire mieux que les indices boursiers.
La Caisse n'a pas voulu faire de commentaires sur ce changement de cap. «Ce sont des discussions entre eux (les déposants) et nous, et il n'est pas question de les faire sur la place publique», a dit son porte-parole, Maxime Chagnon.
Même si la Caisse a pour raison d'être de battre les indices de référence, elle n'y parvient pas toujours. Ça n'a pas été le cas l'an dernier, alors que la Caisse a affiché un rendement de -25%, comparativement à -18,5% pour les indices de référence. Ce ne sera vraisemblablement pas le cas cette année non plus, parce que le rendement de la Caisse s'annonce encore beaucoup moins bon que celui des indices, soit autour de 5 ou 6% comparativement à de 10 à 12% pour les indices.
Les déposants, aussi mécontents soient-ils de cette contre-performance, sont obligés par la loi de confier leur argent à la Caisse de dépôt.
Mais ils pourraient être tentés par le changement.
La Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) est en train d'y réfléchir. «Un mélange de gestion indicielle et de gestion active nous conviendrait très bien», a fait savoir le porte-parole de la CSST, Pierre Turgeon.
Un portefeuille en gestion indicielle est composé des mêmes titres que ceux d'un indice boursier de référence et dans la même proportion.
Une telle formule a l'avantage être moins risquée et plus transparente, a-t-il expliqué, et mieux adaptée aux objectifs de long terme d'un organisme comme la CSST.
À la Commission de la construction du Québec (CCQ), autre déposant de la Caisse, la proposition de placer une partie de leurs avoirs en gestion indicielle suscite beaucoup d'intérêt. «On reçoit bien leur ouverture à ce sujet, il y a de la flexibilité», dit leur porte-parole, André Martin.
La CCQ, qui critique depuis longtemps la gestion de la Caisse, pourrait saisir l'occasion. De toute façon, souligne son porte-parole, «on voit que, depuis quelque temps, ils étaient en bas des indices».
Le pitoyable rendement de la Caisse en 2008 a aussi fait un gros trou dans le bas de laine de la Régie des rentes du Québec, qui pourrait vouloir réduire le risque associé à la gestion active. Mais son porte-parole s'est montré prudent à ce sujet. «La Caisse est en train de revoir la structure de ses portefeuilles, a expliqué Herman Huot. La Régie des rentes jugera, en temps et lieu, de l'offre qui lui sera faite par la Caisse au sujet des portefeuilles de placement disponibles. Il est prématuré de se prononcer à ce moment-ci.»
Si elle plaît aux déposants, l'ouverture de la Caisse à la gestion indicielle risque relancer le débat sur l'utilité de la Caisse de dépôt. Elle risque aussi de mécontenter ses gestionnaires.
S'il était à la Caisse, le gestionnaire de portefeuille Luc Fournier, de l'Industrielle-Alliance, ne serait pas content du tout. «C'est en quelque sorte un désaveu pour eux», dit-il.
Ce n'est pas non plus nécessairement bon pour la Caisse elle-même, ajoute le gestionnaire, parce qu'elle verra ses revenus de gestion diminuer de façon importante si elle fait moins de gestion active.
Par contre, ça peut être une bonne stratégie de donner le choix aux déposants, selon lui. «Devant des performances pas très reluisantes, c'est peut-être une bonne idée pour regagner la confiance des clients», estime Luc Fournier.


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